Le droit de vie et de mort

Source: FSSPX Actualités

Après la Hollande, la Belgique a adopté une loi légalisant en partie l’euthanasie. Il est évident que les barrières de protection prévues voleront en éclat comme ce fut le cas avec la loi Veil dans notre pays. La France est désormais la prochaine cible de ceux qui prétendent rétablir au nom du bien commun le droit de vie et de mort. Allons à l’essentiel concernant ce sujet : la question de l’euthanasie peut se résumer à deux considérations extrêmement simples.

• Le première tient du bon sens. Avant la Renaissance, tous les testaments commençaient par la formule suivante : « Rien n’est plus certain au monde que la mort, et rien n’est plus incertain au monde que le moment de sa venue ». Tout médecin sait qu’à un moment ou un autre il s’avouera vaincu face à la maladie. Il doit en quelque sorte “rendre les armes”. Son rôle se limitera alors à permettre à son patient de passer dans l’au-delà en limitant ses souffrances. Dans notre société moderne, cette attitude est qualifiée d’“euthanasie passive”. En fait, ce n’est pas de l’euthanasie, cela montre tout simplement que toute science a ses limites. Le chrétien n’est pas tenu de donner ou recevoir des soins extraordinaires. L’essentiel est d’accepter la mort et de mourir en paix vis-à-vis de Dieu, de sa conscience et des hommes.

• La deuxième équivoque délibérément entretenue concerne la fin de vie elle-même. On veut faire croire que l’euthanasie est pratiquée “en douce” (cela ne veut pas dire “en douceur”) lors de 60 % des décès et ceci sous couvert d’un traitement nécessaire pour soulager la douleur, ce traitement étant censé induire la mort. Concrètement, les doses de morphine administrées pour soulager les mourants entraînent la mort par dépression respiratoire, ce qui relèverait de l’euthanasie. De fait, à force d’augmenter les doses de ce produit, on abrège la vie des agonisants. Mais le devoir du médecin est de soulager et donc, il ne pourra se passer d’administrer de la morphine. Si l’action est faite en vue de soulager la souffrance et qu’effectivement les doses injectées abrègent la vie de quelques heures, cela est moralement permis. Il ne s’agit pas d’euthanasie, mais du désir très humain et chrétien d’aider les mourants à ne pas souffrir.

Mais nous savons que les promoteurs de l’euthanasie veulent utiliser ce moyen – ou d’autres comme l’administration d’une dose massive de potassium ou de curare – pour provoquer un arrêt de vie immédiat et délibéré. La différence avec le médecin qui souhaite réduire la souffrance et respecter la vie qu’il a entre les mains est tout d’abord dans l’intention, et se traduit ensuite par une administration de “calmants” proportionnée au maintien de la vie et non à la provocation de la mort. La marge de manœuvre peut être parfois réduite, à tel point que, dans certains cas, l’intention du médecin sera déterminante pour juger de la moralité de l’acte.

Les tenants de l’euthanasie active n’hésitent pas à arguer du grand nombre de cas d’“euthanasies passives” – la taxant d’euthanasie tout court – afin de demander une légalisation de ce qui se pratique couramment et permettre ainsi une action légale, là où il y aurait, pour l’instant, ce qu’ils taxent de hors-la-loi.

On le voit, la frontière entre le devoir de compassion et l’intention délibérée de tuer peut être fragile. Elle a toujours été respectée avec tact et mesure par les médecins. Les forces de mal veulent imposer le droit de tuer et le droit d’être tué. Au nom des Droits de l’homme. Ce serait une ultime liberté à conquérir.

Dr Jean-Pierre Dickès

Association Catholique des Infirmières et médecins