« Luther 500 ans après » au Vatican

28 Avril, 2017
Provenance: fsspx.news

Le Comité pontifical des sciences historiques a organisé au Vatican, du 29 au 31 mars 2017, un colloque international sur le thème : Luther 500 ans après. Une relecture de la Réforme luthérienne dans son contexte historique ecclésial. Avec des chercheurs catholiques et protestants, « il s’agit de procéder à une relecture de la Réforme luthérienne en la replaçant dans son contexte historique et ecclésial », a présenté le père Bernard Ardura, président du comité pontifical. 

« Pendant des siècles, Luther a été perçu comme l’incarnation du Diable pour avoir rompu la communion ». Aujourd’hui, il ne s’agit pas de dire avec ce colloque que Luther a fait bien, a-t-il poursuivi, mais d’essayer de comprendre les raisons de cette rupture. « Luther voulait initialement une réforme de l’intérieur, il ne voulait pas provoquer un schisme », a déclaré le P. Ardura. Un chemin spirituel est à l’origine de la révolte de Luther, mais aussi un élément psychologique manifesté par de « l’orgueil », a-t-il confié à l’agence I.Media.

Ce colloque a donc voulu « étudier les conditions dans lesquelles est intervenue la rupture luthérienne » en se penchant sur « les circonstances politiques – en particulier les tensions entre les princes allemands et l’empereur –, ou économiques – telles les conséquences de la sécularisation des biens ecclésiastiques ». Le Rapport de la Commission luthéro-catholique romaine sur l’unité, intitulé Du conflit à la communion (17 juin 2013), soutenait déjà que « la recherche médiéviste a beaucoup contribué à changer la perception du passé de bien des manières ». Sachant que « les descriptions actuelles de la Réforme prennent aussi en compte un grand nombre de facteurs non théologiques : politiques, économiques, sociaux et culturels ».

Les participants à ce colloque ont été reçus en audience pontificale le 31 mars 2017. Le pape François, saluant cette « initiative louable du Comité », a souligné « qu’il y a encore peu de temps, un congrès de ce genre aurait été tout à fait impensable », pour affirmer que ce sont là « les fruits de l’action de l’Esprit Saint » ! Et de déclarer : « L’étude attentive et rigoureuse, libre de préjugés et de polémiques idéologiques, permet aux Eglises (…) de discerner (…) ce qu’il y a eu de positif et de légitime dans la Réforme ». Ce qui permet aujourd’hui, soutient le pape, « d’accomplir une purification de la mémoire » pour « raconter cette histoire d’une autre manière »…

A cette occasion et en un sens opposé, Nicolas Senèze citait dans le quotidien La Croix un extrait d’un article de Mgr Luigi Negri, archevêque émérite de Ferrare, paru dans la revue italienne Studi cattolici (n°673 de mars 2017) : « On ne peut pas, contre les décisions du concile de Trente et la meilleure tradition historiographique – pas seulement de l’Eglise – affirmer que Luther est un réformateur. Luther est la source de toutes les dégradations de la modernité, y compris le rationalisme, y compris le fidéisme, mais y compris, surtout, les grandes idéologies totalitaires qui ont appauvri la vie de l’Occident ».

« Luther a-t-il fondé une nouvelle religion ? A-t-il modifié la conception traditionnelle que l’on se faisait des rapports entre l’homme et Dieu ? Il faut répondre : oui, sans hésiter », écrivait Mgr Léon Cristiani (1879-1971) dans son ouvrage Du luthéranisme au protestantisme, récemment réédité chez Parthenon. Dans sa conclusion, il montre le lien étroit qui unit le libre examen luthérien et la multiplication des sectes protestantes : « Il [Luther] devait fatalement se heurter à cette Eglise qui se regarde comme infaillible dépositaire de la vérité révélée. A sa doctrine de la justification, il superposa dès lors une doctrine de l’Eglise. Il ne reconnut plus en elle une autorité enseignante, un magistère vivant, l’immortel apôtre du Christ, mais une assemblée invisible d’âmes directement éclairées par l’Esprit-Saint.

« Malheureusement, une Eglise invisible ne saurait constituer un corps social. Luther apprit bien vite à ses dépens que l’unité religieuse ne peut s’établir autour d’une doctrine abstraite, non plus qu’autour d’un livre mort. Laissés à eux-mêmes en face de la Bible, les esprits s’empressèrent d’y lire tout autre chose que ce que Luther y avait lu. De là des divisions doctrinales, des querelles intestines parmi les premiers luthériens. Le libre examen produisait les effets d’une force centrifuge. Il se révélait principe d’éparpillement et de discorde. » (p. 604)

Du luthéranisme au protestantisme, Léon Cristiani, docteur en théologie, docteur ès lettres, éd. Parthenon, octobre 2016, 19 € – www.editions-parthenon.com

(Sources : cath.ch /imedia/vatican/la croix/parthenon – FSSPX/Actualités 28/04/17)