Le pape François déçoit le clergé italien

10 Juin, 2023
Provenance: fsspx.news

On en sait un peu plus sur la dernière réunion des évêques italiens qui s’est déroulée à huis clos, du 22 au 25 mai dernier : ambiance lourde, reproches du Saint-Père, résistances par rapport au synode… Le pontife argentin n’a peut-être plus vraiment la cote de l’autre côté des Alpes.

« C’est un dialogue franc et serein qui s’est engagé dans l’après-midi du 22 mai 2023, entre le pape François et les quelques 200 évêques qui composent la Conférence épiscopale italienne (CEI), réunis pour leur 77e assemblée plénière au Vatican. »

La relation que le site officiel du Saint-Siège a faite de l’ouverture de la réunion printanière de la CEI mérite qu’on y prête attention, car les termes « franc » et « serein » sont souvent synonymes – dans la rhétorique vaticane – de remontée de bretelles.

La preuve en est donnée quelques lignes plus loin par le rédacteur de Vatican News : « Un changement de mentalité est nécessaire », a demandé le successeur de Pierre aux évêques italiens qu’il a appelés à adopter « un nouveau style », en référence au « chemin synodal », ainsi qu’à ne « jamais laisser tomber la charité ».

Point besoin d’être expert en novlangue pour comprendre le profond malaise persistant entre l’évêque de Rome et les évêques de la péninsule.

Un malaise confirmé par l’un des médias italiens les plus lus : le journal La Repubblica. Dans son édition du 2 juin 2023, le vaticaniste Filippo Di Giacomo – grâce à des indiscrétions – livre sa version : « Le pape François a en fait improvisé quelques réflexions que le secrétaire général de la CEI, Mgr Giuseppe Baturi, a résumées en soulignant “l’urgence d’un nouvel élan évangélisateur qui passe par un témoignage crédible”. »

Selon les informations du journaliste, le pontife romain a littéralement « passé un savon » (sic) aux membres de la CEI, évoquant pêle-mêle leur « rapport malsain à l’argent », leur reprochant une « inaction » dans la gestion de certains séminaires jugés « excentriques et défectueux » – y aurait-il une allusion à Traditionis Custodes ? – et déplorant qu’on ne « tienne pas suffisamment compte » de ses exigences.

On imagine le vent sibérien qui devait souffler dans l’aula synodale. La séance a ensuite été levée, et le lendemain, c’est au cardinal Matteo Zuppi – président de la CEI – qu’il revenait d’assurer le service après-vente.

Les prélats ont commencé à prier ensemble le psaume 74 de l’office de none prévu ce jour-là, un psaume que plus d’un évêque a jugé de circonstance, et qui exprime en ces termes le désarroi d’Israël : « Pourquoi, ô Dieu !, nous rejettes-tu pour toujours ? Pourquoi t’irrites-tu contre le troupeau de ton pâturage. (…) Nous ne voyons plus nos signes ; il n’y a plus de prophète. Et personne parmi nous qui sache jusqu’à quand… »

Le patron de la CEI a souligné, avec douceur, la nécessité de corriger les « excès de bureaucratie » existant au sein de l’épiscopat, se plaignant au passage de la « résistance » de nombreux prêtres diocésains au chemin synodal : signe que les curés de paroisse – tel Don Camillo – sont loin d’avoir tous perdu leur bon sens dans la patrie de Dante !

Mais Mgr Zuppi n’a pas vraiment réussi à convaincre : on lui souhaite plus de succès dans le cadre de la mission de paix qui lui a été confiée en Ukraine ; sinon les espoirs que certains fondent sur lui lors d’un prochain conclave risquent d’avoir le même avenir que les neiges d’hiver lorsqu’elles se mêlent à la raspoutitsa boueuse des steppes russes…

Et le vaticaniste de La Repubblica de conclure : « Que le clergé soit excédé, tout le monde le sait, mais personne n’ose pointer du doigt la véritable cause. » Et les yeux des lecteurs de se tourner, presqu’involontairement, avec inquiétude, du côté de la Maison Sainte-Marthe au-dessus de laquelle les nuages semblent assombrir un ciel pourtant printanier dans la Ville éternelle.