Le Saint-Siège résigné sur le dossier chinois

03 Juillet, 2021
Provenance: FSSPX Spirituality
Vente du dernier numéro de l’Apple Daily à Hong Kong

Le ministre des Affaires étrangères du Vatican estime qu’il ne sert à rien au Saint-Siège de s’exprimer sur la question des restrictions frappant Hong Kong. Un aveu qui augure mal de l’avenir des catholiques dans l’empire du Milieu, et qui hypothèque un peu plus l’accord passé avec Pékin en 2018.

La suppression de l’Apple Daily

Les coïncidences ont parfois valeurs de symboles. La veille de la conférence de presse donnée par Mgr Paul Richard Gallagher, secrétaire pour les relations avec les Etats, les habitants de Hong Kong faisaient la queue dans les rues afin d’acheter l’ultime numéro d’Apple Daily.

Ce quotidien populaire – de qualité discutable, mais viscéralement anti communiste – fondé par Jimmy Lai, un catholique désormais derrière les barreaux, a été définitivement supprimé, au terme de vingt-six années de critiques plus ou moins directes du Parti communiste chinois (PCC).

Cette mort soudaine a été vécue comme un coup de massue par les résidents de l’ancienne colonie britannique, qui pensaient, jusqu’à l’entrée en vigueur de la loi sur la sécurité nationale il y a un an, jouir de certaines libertés dans le cadre du statut octroyé par Pékin : « un pays, deux systèmes ».

Une fermeture s’ajoutant à la longue séquence qui voit monter crescendo l’emprise des mandarins rouges sur l’ancienne colonie britannique rétrocédée à la Chine en 1997.

Ainsi, le 23 juin 2021, le gouvernement central de Hong Kong, satellite de Pékin, achevait sa mue en régime policier : John Lee, jusqu’ici secrétaire pour la Sécurité, est devenu numéro deux de l’exécutif local, tandis que Chris Tang, chef de la police, le remplace à son poste.

La réserve impuissante de Rome

Dans ce contexte, Mgr Gallagher répondait le 25 juin dernier au journaliste demandant pourquoi le Saint-Siège agissait au Liban et pas en Chine : « on pourrait dire beaucoup de choses [à propos de Hong Kong, NDLR] qui seraient appréciées par la presse internationale », a reconnu le haut prélat, mais le Vatican n’est « pas encore convaincu que cela (ferait) une quelconque différence ».

Le constat de Mgr Gallagher illustre la méthode de la secrétairerie d’Etat qui, pour ménager l’accord passé avec Pékin sur la nomination des évêques dans l’empire du Milieu, s’efforce d’éviter tout commentaire désobligeant sur le régime de Xi Jinping.

D’un point de vue purement diplomatique, cette réponse fait preuve d’un certain réalisme : les protestations de la communauté internationale à l’encontre de Pékin n’ont pas desserré d’un cran l’étau des restrictions sur Hong Kong, ni sur les catholiques Chinois de façon plus générale.

De plus, il serait hypocrite de conférer à la Chine communiste le monopole du totalitarisme : il y aurait beaucoup à dire, dans notre Occident sécularisé, sur la promotion d’idéologies opposées au christianisme – tel le genre – aux dépens de la famille et de la vie en général.

D’un autre côté, plusieurs observateurs chinois, tel le cardinal Joseph Zen, ont noté que le silence du Vatican sur les violations des droits des catholiques chinois, lié aux échanges diplomatiques plus étroits par l’accord provisoire, pourrait être considéré comme une approbation tacite du régime.

Enfin, bien que le silence romain revête une dimension stratégique, nombreux sont ceux qui s’interrogent sur la capacité de l’Eglise à s’exprimer désormais de manière crédible sur d’autres crises civiles et politiques, comme au Liban ou en Birmanie.

Il semble que la secrétairerie d’Etat mise sur l’Eglise locale pour parler et agir plus directement sur le terrain : « nous espérons que le nouvel évêque de Hong Kong fera un bon travail », glisse aux journaliste Mgr Gallagher, évoquant la mission délicate confiée à Mgr Stephen Chow.

D’autant plus délicate que, depuis le 25 juin, à Zhongnanhai, le siège de l’exécutif à Pékin, on sait que le Vatican s’est officiellement résigné à une certaine impuissance.