Londres et Belfast croisent le fer sur la question de l’avortement

08 Avril, 2021
Provenance: fsspx.news
Palais de Stormont, siège du parlement nord-irlandais

Les évêques d'Irlande du Nord protestent contre l’ingérence du gouvernement britannique qui entend forcer la province à appliquer, de la façon la plus large possible, la loi sur l’avortement imposée par Westminster en 2019.

Dépourvue d’exécutif depuis janvier 2017 à la suite d’un scandale politico-financier, la province britannique d’Irlande du Nord a vu, de longs mois durant, ses institutions politiques à l’arrêt.

Profitant de cette paralysie politique locale, les députés de Westminster ont voté deux amendements en juillet 2019, afin d’étendre à la province le droit à l’avortement et au mariage entre personnes du même sexe.

Mais depuis, le palais de Stormont – siège du Parlement nord-irlandais – goûtant modérément l’ingérence anglaise dans ses affaires, traine des pieds, s’impliquant assez peu dans la mise en place concrète de services d’avortements.

Face à une situation qu’il juge inacceptable, le gouvernement de Boris Johnson a donné carte blanche à son secrétaire d’Etat pour l’Ulster, Brandon Lewis, afin de forcer les ministres, les départements ainsi que les organismes de santé concernés, à appliquer, le plus largement possible, la loi sur l’interruption volontaire de grossesse (IVG).

Si l’exécutif nord-irlandais ne coopère pas, Brandon Lewis prendra les pleins pouvoirs en avril 2021, afin de promulguer les décrets élargissant l’accès à l’avortement : « J’ai avancé sur cette réglementation car aujourd’hui, les femmes et les jeunes filles d’Irlande du Nord se voient toujours privées du droit d’accéder à des soins d’avortement », a déclaré le secrétaire d’Etat dans The Guardian, le 23 mars dernier.

Londres estime en effet que plus de 100 femmes ont encore cherché à se faire avorter en Angleterre, depuis l’Irlande du Nord, et ce malgré les risques sanitaires.

Pour sa part, le parti conservateur unioniste protestant DUP – farouchement opposé tant au Brexit qu’à l’avortement – a averti qu'une intervention anglaise aurait de « graves conséquences » sur le futur de Stormont.

L’épiscopat nord-irlandais n’a pas non plus tardé à dénoncer la pression exercée par Londres : « ce que Westminster cherche à imposer, contre la volonté claire d’une majorité de personnes ici, est une loi qui sape de manière flagrante le droit à la vie des enfants à naître et promeut un préjugé odieux et indéfendable contre les personnes handicapées, avant même leur naissance », ont déploré les prélats d’Ulster dans un communiqué commun.

Comme le DUP, les évêques voient dans l’intervention de Westminster une violation flagrante des accords du Vendredi saint, qui avaient permis, en 1998, de mettre fin à trente années de trouble ayant fait près de 3 500 victimes.

L’Irlande du Nord a été la dernière partie des îles britanniques à légaliser l’avortement : l’Angleterre, l’Ecosse et le Pays de Galles ont dépénalisé l’IVG en 1967 ; l’Eire, en 2018, par référendum.

Selon le ministère de la Santé d’Irlande du Nord, 1 345 IVG ont été pratiquées depuis l’entrée en vigueur de la loi le 31 mars 2020. Mais de nombreuses femmes continuent de se rendre en Angleterre afin de pouvoir avorter.