Pie XII et les juifs : les archives livrent leurs secrets

09 Février, 2022
Provenance: fsspx.news

Le pape Pie XII a personnellement sauvé plus de quinze milles juifs durant la seconde guerre mondiale : c’est le dernier résultat de l’étude fouillée menée par un historien allemand sur des documents inédits des archives du Vatican, inaccessibles jusqu’alors. La légende noire d’un pape silencieux et complice a définitivement vécu.

L’archiviste du Bundestag, Michael Feldkamp, a passé une partie de sa vie à tenter d’y voir un peu plus clair sur l’attitude de l’Eglise catholique à l’égard des juifs, durant la seconde guerre mondiale, faisant de lui un expert reconnu comme tel en la matière.

Ayant eu récemment accès à des documents inédits, l’historien balaie d’un revers de main la thèse d’un Pie XII ignorant et indifférent par rapport à l’horreur de l’univers concentrationnaire : « Ce qui est nouveau maintenant, même si nous l’avons toujours pressenti, c’est qu’il est établi que Pie XII était au courant de tout, depuis le début », explique Michael Feldkamp.

Mieux renseigné que les services secrets américains, le pontife romain d’alors avait même alerté l’Occident encore libre, sans être écouté : « concernant l’extermination systématique des juifs européens, le pape Pacelli envoya un message au président américain Roosevelt en mars 1942 – deux mois après la conférence de Wannsee.

« Il y prévenait qu’il se passait quelque chose en Europe dans les zones de guerre. Ces messages n’étaient pas alors considérés comme crédibles par les Américains ». Les silences ne sont donc pas là où on le croyait…

Eugenio Pacelli faisait également tous les jours le bilan des exactions nazies : « tous les rapports lui remontaient, il avait même créé un bureau dédié au sein de la deuxième section de la secrétairerie d’Etat, où le personnel devait s’occuper exclusivement de ces questions. Il y avait Mgr Domenico Tardini et Mgr Dell’Acqua, deux futurs cardinaux, qui lui exposaient quotidiennement la situation », explique l’historien allemand.

L’étude des plus récentes archives déclassées récemment permet ainsi d’estimer « que Pie XII a personnellement sauvé quelque quinze mille juifs par ses efforts personnels : en ouvrant les cloîtres des monastères pour que l’on pût s’y cacher. Les découvertes que je viens de faire au Vatican qui démontrent à quel point le pape italien était informé avec précision », ajoute-t-il.

Des faits nouveaux sont enfin apparus au grand jour : ainsi, « des soldats de la garde suisse ont même dû faire face aux hommes de la Waffen SS et à des officiers de la Wehrmacht pour parvenir à cacher des juifs dans la basilique romaine de Sante-Marie-Majeure », rapporte Michael Feldkamp.

« De cette façon, nous pouvons maintenant corriger bon nombre d’inexactitudes, parfois même des accusations, notamment celle des “silences” de Pie XII », déclare l’historien.

En effet, la non-dénonciation des crimes que l’on reproche au pape d’alors, peut être « considérée comme raisonnable, étant donné que cela lui permettait de mettre des personnes à l’abri, au moyen d’opérations secrètes, car à cette époque, il n’était pas question d’attirer davantage l’attention du public sur soi en organisant des manifestations ou en écrivant des notes de protestation.

« Mais au contraire, pour détourner l’attention, Pie XII a mené des négociations avec l’ambassade d’Allemagne et les forces de police italiennes, avec Mussolini lui-même et le ministre italien des Affaires étrangères. Il a toujours essayé d’obtenir le plus possible par la négociation. »

Néanmoins, Michael Feldkamp est conscient que les mensonges ont la vie dure, et qu’il ne sera pas aisé de rétablir la vérité sur le pontificat de Pie XII : « certains ne peuvent pas imaginer que pendant soixante-dix ans on aurait cru à des mensonges, et qu’en fait, la réalité serait radicalement différente. Je rencontre souvent cet état d’esprit à l’extérieur, comme à l’intérieur de l’Eglise ».

Il faut dire qu’au sein de la hiérarchie catholique, on semble peu pressé de réhabiliter un pape connu pour s’être opposé à l’esprit de nouveauté qui a déferlé dans l’Eglise dans les années 1950, et qui devait triompher dans la décennie suivante. Mais cela, c’est une autre histoire…