Attentats de Pâques 2019 : l’exécutif srilankais relance l’enquête

Source: FSSPX Actualités

Six ans après les attentats djihadistes de Pâques 2019 qui ont endeuillé la communauté catholique du Sri Lanka et bouleversé toute l’île, un appel solennel vient d’être lancé afin d’exiger du gouvernement de diligenter une nouvelle enquête visant à faire la lumière sur les nombreuses zones d’ombre qui entourent des actes terroristes partiellement élucidés.

Le 21 avril 2019, le Sri Lanka était frappé par une série d’attentats-suicides dévastateurs lors des célébrations de Pâques. Ces attaques ont coûté la vie à 269 personnes et blessé plus de 500 autres, et ont révélé des failles dans la sécurité nationale et des tensions communautaires sous-jacentes.

Six ans plus tard, alors que les cicatrices de ce drame demeurent vives, une organisation catholique émanant des Oblats de Marie Immaculée (OMI), baptisée « Centre pour la société et la religion » (CSR), appelle à une nouvelle enquête. A ce jour, les enquêtes ont dégagé ce qui suit.

Les attentats ont été perpétrés par neuf kamikazes affiliés au groupe National Thowheeth Jama’ath, inféodé à l’organisation Etat islamique. Trois églises – Saint-Antoine à Colombo, Saint-Sébastien à Negombo et l’église de Sion à Batticaloa – et trois hôtels de luxe de Colombo ont été visés par des explosions coordonnées. Parmi les victimes figuraient des fidèles assistant aux messes de Pâques, des touristes étrangers et des citoyens sri-lankais.

Après le choc, une vague d’indignation s’est levée face aux défaillances des autorités. Ces dernières ne semblent avoir tenu aucun compte d’avertissements envoyés par les services de renseignement étrangers, notamment indiens, signalant des menaces imminentes d’attaques contre des églises.

Aucune mesure concrète n’avait été prise pour prévenir la tragédie. Une négligence ayant alimenté la méfiance envers le gouvernement de l’époque, dirigé par le président Maithripala Sirisena et le premier ministre Ranil Wickremesinghe, tous deux déjà fragilisés par des luttes politiques internes.

Depuis 2019, plusieurs enquêtes ont été menées pour élucider les circonstances des attentats. Une commission d’enquête, établie sous l’administration Sirisena, a produit un rapport volumineux, dont les conclusions ont été vivement contestées pour leur manque de clarté et leur incapacité à identifier les véritables commanditaires des actes terroristes.

Des arrestations ont bien eu lieu – plus de 200 suspects ont été interpellés – mais les procès ont traîné en longueur, et peu de condamnations définitives ont été prononcées. Certains témoins-clefs dans cette affaire ont même été libérés faute de preuves, tandis que d’autres sont morts dans des circonstances plus ou moins claires : de quoi alimenter rumeurs et soupçons légitimes.

En 2023, un documentaire de la chaîne britannique Channel 4 jette une nouvelle lumière sur l’affaire, alléguant que des membres des services de renseignement sri-lankais pourraient avoir eu des liens avec les assaillants. Des révélations qui ont renouvelé les appels à une enquête indépendante, notamment de la part de l’Eglise. Le cardinal Malcolm Ranjith, archevêque de Colombo, n’a pas hésité à dénoncer l’inaction des autorités et l’opacité entourant les investigations.

C’est dans ce contexte que le CSR a publié une lettre ouverte le 17 avril 2025, exhortant l’Etat sri-lankais, désormais présidé par Anura Kumara Dissanayake, à lancer une nouvelle enquête indépendante, du fait que les enquêtes précédentes ont échoué à identifier les « véritables cerveaux » des attentats, laissant planer le doute d’une implication de figures influentes.

L’organisation insiste sur la nécessité de révéler l’identité des suspects et de clarifier leurs rôles, demande qui répond aux préoccupations des familles de victimes, qui estiment que la vérité a été étouffée pour protéger des intérêts puissants : « Six ans après, les blessures restent ouvertes, et la justice n’a pas été rendue », déclare un représentant du CSR, cité par Ucanews. Le CSR appelle à une coopération internationale pour tracer les réseaux financiers et logistiques qui ont aidé les assaillants.

Cet appel intervient à un moment charnière pour le Sri Lanka. Elu en septembre 2024, le président Dissanayake, chef du parti de gauche Janatha Vimukthi Peramuna, a promis de restaurer la transparence et de lutter contre la corruption endémique. La question des attentats de Pâques, hautement sensible, représente un test majeur pour sa crédibilité et donc son avenir.

Le ministre de l’Intérieur, Vijitha Herath, vient de confirmer que l’enquête avait « atteint une nouvelle phase » à la lumière des révélations du documentaire de Channel 4. Cette déclaration, bien que vague, suggère une volonté de rouvrir certains dossiers.

Cependant, une enquête approfondie risque de mettre en lumière des complicités au sein de l’appareil d’Etat, ce qui pourrait provoquer des tensions avec des factions influentes, notamment des forces armées et des services de renseignements. Les mois qui viennent sont donc cruciaux pour tenter d’élucider enfin le mystère planant autour des attaques islamistes meurtrières de Pâques 2019.