Benoît XVI en visite au Bénin (18-20 novembre 2011)

Source: FSSPX Actualités

Pour son 22e voyage apostolique, Benoît XVI a souligné qu’il coïncidait avec le 40e anniversaire de l’établissement des relations diplomatiques entre le Bénin et le Saint-Siège, ainsi qu'avec le 150e anniversaire de l'évangélisation du pays. En outre, cette visite lui permettait de réaliser son désir de rendre public sur le sol africain l’exhortation apostolique post-synodale Africae Munus, ainsi que celui de se rendre sur la tombe de son ami, le cardinal Bernardin Gantin (1922-2008).

L´Eglise catholique au Bénin

Le Bureau central des statistiques de l´Eglise dénombre près de 3 millions de fidèles catholiques (34%) – à côté des animistes (près de 40%), des musulmans (24%) et des protestants (3%) – sur une population de plus de 8,7 millions d´habitants, soit un tiers des béninois.

Le culte vaudou, très présent dans le pays, est un culte syncrétique qui trouve ses racines dans les croyances de différents peuples du Golfe du Bénin. A Ouidah, en face de la première cathédrale de toute l´Afrique occidentale s’élève le Temple vaudou des Pythons.

En 1883 fut érigée la préfecture apostolique du Dahomey (ancien nom du Bénin). En 1928, le premier prêtre béninois fut ordonné et 1957 vit la consécration du premier évêque béninois. Deux ans auparavant, par la bulle Dum Tantis, Pie XII avait créé la hiérarchie catholique locale.

L'Eglise catholique béninoise compte au 31 décembre 2010 : 11 évêques et 811 prêtres (684 diocésains et 127 religieux). Egalement 139 religieux, 1.247 religieuses, 30 laïcs membres d´instituts séculiers, 19 missionnaires laïques et 11.251 catéchistes ; 497 séminaristes et 308 postulants. Dans le domaine éducatif : 165 écoles maternelles ou primaires catholiques pour 31.900 élèves, 50 collèges et lycées catholiques pour 24.598 élèves, et deux universités catholiques comptant 1.274 étudiants.

Les institutions caritatives et sociales catholiques recouvrent 12 hôpitaux et 64 dispensaires, sept maisons de soins ou de retraite, 41 orphelinats ou garderies, 3 centres familiaux pour la protection de la vie, 17 centres spéciaux d´éducation ou de rééducation sociale ainsi que trois autres institutions œuvrant dans ce domaine.

Le 17 novembre, Mgr Pascal N´Koué, archevêque de Parakou (Nord du Bénin), précisait à l´hebdomadaire Famille Chrétienne les défis auxquels est confrontée l’Eglise béninoise : « L´un des grands défis est l´intériorisation de la foi. Il ne suffit pas d´être saupoudré du nom de Dieu. Il faut que la foi nous soit une force intérieure, une vie intérieure. C´est pour cela que nous avons besoin de monastères. Cette difficulté à intérioriser facilite l´expansion des sectes, qui promettent un bonheur facile. Et comme les gens n´intériorisent pas la parole de Dieu, ils sont séduits par les sectes. Mais j´en vois qui reviennent. Une fois qu´ils ont été plumés, ils reviennent dans l´Eglise, parce qu´elle accueille tout le monde. Ils voient bien que c´est nous qui nous agenouillons pour aider les pauvres. »

Et de préciser les réalités du continent africain : « Malheureusement, chez nous, on croit que c’est l’Europe qui viendra faire notre propre bonheur. C´est vrai que l’Afrique n’a pas autant d’argent dans ses banques, mais quand on a un problème, ce n´est pas vers les banques qu´il faut se tourner. C´est le travail qui crée la richesse. Et si l´Afrique avait les moyens de se payer son développement, elle dirait non à beaucoup de choses. Or nos chefs d´Etat signent un nombre de choses incroyables pour se payer leurs campagnes, et l´Afrique devient ainsi la poubelle de toutes les idéologies. »

A la cathédrale Notre-Dame de Miséricorde

Après avoir traversé la ville de Cotonou, dans l´après-midi du 18 novembre, Benoît XVI a été accueilli dans un climat festif dans la cathédrale Notre-Dame de Miséricorde. Le pape s´est recueilli sur les tombes des prédécesseurs de Mgr Antoine Ganyé, archevêque de Cotonou : Mgr Christophe Adimou (1916-1998) et Mgr Isidore de Sousa (1934-1999). Dans une prière à Notre-Dame d´Afrique, le pape a ensuite imploré la Reine de la Paix de combler « les nobles aspirations des jeunes d´Afrique », les « assoiffés de justice, de paix et de réconciliation » ainsi que les « espoirs des enfants victimes de la faim et de la guerre ».

Au palais présidentiel de Cotonou

Samedi 19 novembre, à Cotonou, capitale économique et plus grande ville du Bénin, Benoît XVI s’est adressé aux membres du gouvernement, aux représentants des institutions de la République, au corps diplomatique et aux représentants des principales religions réunis au palais présidentiel. Il a souhaité que l´Afrique ne soit pas simplement considérée comme « un énorme réservoir énergétique, minéral, agricole et humain facilement exploitable ».

Le pape a affirmé que l´homme aspirait à la liberté de posséder « de bonnes écoles et de la nourriture pour les enfants, des hôpitaux dignes pour soigner les malades », qu´il souhaitait être respecté et revendiquait une gouvernance limpide « qui ne confonde pas l´intérêt privé avec l´intérêt général », et par dessus tout la paix et la justice.

Puis Benoît XVI a longuement évoqué les maux qui affligent le continent africain, et le reste du monde : « En ce moment, il y a trop de scandales et d´injustices, trop de corruption et d´avidité, trop de mépris et de mensonges, trop de violences qui conduisent à la misère et à la mort. (...) Nous savons qu´aucun régime politique humain n´est idéal, qu´aucun choix économique n´est neutre. Mais ils doivent toujours servir le bien commun. Nous nous trouvons donc en face d´une revendication légitime qui touche tous les pays, pour plus de dignité, et surtout pour plus d´humanité. L´homme veut que son humanité soit respectée et promue. Les responsables politiques et économiques des pays se trouvent placés devant des décisions déterminantes et des choix qu´ils ne peuvent plus éviter ».

Le souverain pontife a alors lancé un appel à tous les responsables politiques et économiques : « Ne privez pas vos peuples de l´espérance ! Ne les amputez pas de leur avenir en mutilant leur présent ! Ayez une approche éthique courageuse de vos responsabilités et, si vous êtes croyants, priez Dieu de vous accorder la sagesse ! Cette sagesse vous fera comprendre qu´étant les promoteurs de l´avenir de vos peuples, il faut devenir de vrais serviteurs de l´espérance. Il n´est pas facile de vivre la condition de serviteur, de rester intègre parmi les courants d´opinion et les intérêts puissants. Le pouvoir, quel qu´il soit, aveugle avec facilité, surtout lorsque sont en jeu des intérêts privés, familiaux, ethniques ou religieux. Dieu seul purifie les cœurs et les intentions ».

Au terme de son intervention en français, le Saint-Père a assuré que « la bonne entente entre les cultures, la considération non condescendante des unes pour les autres, et le respect des droits de chacune sont un devoir vital ». « La haine est un échec, l´indifférence une impasse, et le dialogue une ouverture », a-t-il affirmé avant de lancer : « Aie confiance, Afrique, et lève toi ! Le Seigneur t´appelle ! ».

Au séminaire d’Ouidah

En fin de matinée, Benoît XVI s’est rendu au séminaire d'Ouidah, à 42 km de Cotonou, où il s’est recueilli sur la tombe du cardinal Gantin. Puis il s’est adressé aux prêtres, religieux, religieuses, séminaristes et laïcs, les appelant à tous faire preuve d´une « foi authentique et vivante ». Cette foi, ainsi que « l´amour pour le Dieu révélé, (...) pour les sacrements et pour l´Eglise sont un antidote efficace contre des syncrétismes qui égarent » ; cet amour de Dieu libère « de l´occultisme et vainc les esprits maléfiques, car il est mû par la puissance même de la Sainte Trinité ».

Le Saint-Père a encouragé les prêtres à laisser transparaître le Christ dans leur vie : « En vous laissant modeler par le Christ, vous ne substituerez jamais à la beauté de votre être sacerdotal des réalités éphémères parfois malsaines que la mentalité contemporaine tente d´imposer à toutes les cultures ». Il leur a alors demandé de « ne pas sous-estimer la grandeur insondable de la grâce divine déposée en (eux) et qui (les) habilite à vivre au service de la paix, de la justice et de la réconciliation ».

Aux religieux et aux religieuses, le pape a rappelé que la vie consacrée était « une suite radicale de Jésus ». Aux séminaristes, il a expliqué que, « sans la logique de la sainteté, le ministère n´est qu´une simple fonction sociale » et que « la qualité de (leur) vie future dépend de la qualité de (leur) relation personnelle avec Dieu en Jésus-Christ, de (leurs) sacrifices ». Les fidèles laïcs ont été invités à avoir une foi en la famille bâtie selon le dessein de Dieu et une fidélité à l´essence même du mariage chrétien.

L´Exhortation apostolique Africae Munus

Deux ans après le Synode spécial des évêques sur « l´Eglise en Afrique au service de la réconciliation, de la justice et de la paix », qui s´est tenu en octobre 2009 au Vatican, Benoît XVI a signé l´Exhortation apostolique post-synodale Africae Munus, le samedi 19 novembre en la cathédrale de Ouidah.

Mgr Nikola Eterovic, Secrétaire général du Synode des évêques, a précisé que l'exhortation apostolique Africae Munus se situe dans la continuité d’Ecclesia in Africa, fruit de la première assemblée spéciale pour l’Afrique. L’évangélisation ad gentes en Afrique, l’annonce de l’Evangile à tous ceux qui ne connaissent pas Jésus-Christ reste une priorité qui doit concerner tous les chrétiens d’Afrique.

Rencontre des enfants à Cotonou

Benoît XVI s’est rendu, dans l´après-midi du 19 novembre, à l´église paroissiale de Sainte-Rita de Cotonou en présence de plusieurs centaines d´enfants. Le pape, sortant de sa poche un chapelet, leur expliqua : « Le chapelet est un instrument qu´on peut utiliser pour prier. Il est simple de prier le chapelet (...) Peut-être le savez-vous déjà, sinon demandez à vos parents de vous apprendre », avant d´indiquer aux enfants qu´ils recevraient un chapelet à la fin de la rencontre. « Lorsque vous l´aurez en main, a confié Benoît XVI, vous pourrez prier pour le pape – je vous demande de le faire –, pour l´Eglise et pour toutes les intentions importantes ».

Le Saint-Père a ensuite invité les enfants à « visiter souvent » le Christ « présent dans les tabernacles de toutes les églises du monde » afin de lui dire leur amour. « Chers enfants, a-t-il poursuivi, Jésus vous aime ! Demandez aussi à vos parents de prier avec vous ! Parfois, il faut les pousser un peu. N´hésitez pas à le faire ! » Jésus est « un trésor qu´il faut savoir partager avec générosité ».

Au terme de sa deuxième journée sur le sol béninois, Benoît XVI a retrouvé les évêques du pays à la nonciature apostolique. Il leur a demandé d´être « d´authentiques serviteurs de l´Evangile », de veiller à ce que l’Ecriture occupe « une place centrale dans la vie de l’Eglise comme dans celle de chaque chrétien ». Le pape a insisté sur « le zèle apostolique qui doit animer tous les fidèles et découle directement de leur baptême » ; ils « ne peuvent donc pas se soustraire à la responsabilité de confesser leur foi dans le Christ et son Evangile partout où ils se trouvent. Benoît XVI a également encouragé les évêques à faire de la formation des futurs prêtres une de leurs priorités pastorales.

Grand-messe dominicale, à Cotonou

Au dernier jour de son voyage, le pape a exhorté plus de 30.000 fidèles rassemblés dans le Stade de l´Amitié de Cotonou, à être des témoins ardents de l´Evangile auprès de ceux qui, nombreux, sont réticents à ouvrir leurs cœurs à la Parole de Dieu, dont la foi est faible, et dont la mentalité, les habitudes, la façon de vivre ignorent la réalité de l´Evangile, « pensant que la recherche d´un bonheur égoïste, du gain facile ou du pouvoir, est le but ultime de la vie humaine ». Au Bénin, l´Eglise a beaucoup reçu des missionnaires, a souligné le pape. Ainsi, « elle doit à son tour porter ce message d´espérance aux peuples qui ne connaissent pas ou qui ne connaissent plus le Seigneur ».

Prononçant son homélie dans un silence qui tranchait avec les cris joyeux qui l´avaient accueilli un peu plus tôt, Benoît XVI a rappelé que : « Le Christ règne par la croix et, avec ses bras ouverts, il embrasse tous les peuples de la terre et les attire à l´unité. Par la croix, il abat les murs de la division, il nous réconcilie les uns avec les autres et avec le Père ». « Le baptisé sait que sa décision de suivre le Christ peut l´amener à de grands sacrifices, parfois même à celui de sa vie », a expliqué le souverain pontife, ajoutant que Jésus-Christ introduit les fidèles dans un monde nouveau, un monde de liberté et de bonheur. L´invitation du pape à se libérer des peurs et du « monde ancien » a résonné de manière toute particulière en cette terre qui vit naître le culte vaudou et où, aujourd´hui encore, les croyances animistes se mêlent à la foi chrétienne.

A la fin de la cérémonie, Benoît XVI a remis l’Exhortation apostolique post-synodale Africae munus aux présidents des conférences épiscopales d´Afrique ainsi qu'aux présidents des Synodes des Eglises orientales catholiques présentes sur le continent, en souhaitant qu’elle les guide dans l´annonce de la Bonne Nouvelle en Afrique. Lors de l’Angelus, le pape a exhorté les fidèles africains à « cultiver les valeurs familiales chrétiennes » sur cette « terre hospitalière pour la Sainte famille ». « Alors que tant de familles sont séparées, exilées, endeuillées par des conflits sans fin, a poursuivi le pape, soyez les artisans de la réconciliation et de l´espérance ». (Sources : apic/imedia/VIS/famillechrétienne – DICI n°246 du 09/12/11)