Chine : un évêque « clandestin » reconnu par le gouvernement

Le communiqué poursuit que « cette mesure est un fruit positif du dialogue établi au fil des ans entre le Saint-Siège et le gouvernement chinois », faisant ainsi référence à l’accord provisoire, valable pour deux ans, signé en 2018 entre les deux Etats, et qui a été renouvelé en 2020 et 2022, toujours pour la même durée. Il doit être normalement renouvelé en octobre de cette année.

Le site Asianews raconte de manière plus précise cet événement et ce qu’il représente réellement, loin du satisfecit un peu béat qui anime le communiqué du Saint- Siège. Il commence par rappeler que Mgr Shi Honghzen était un « prélat “clandestin”, resté longtemps en état d’arrestation pour avoir refusé d’adhérer à l’Association patriotique ».

Le site ajoute que Mgr Shi Honghzen est âgé de 94 ans, et qu’il est « évêque d’un diocèse où il n’y avait pas d’évêque “officiel” depuis 2005 ». La nouvelle « a été annoncée par le site chinacatholic.cn, la voix des organismes officiels contrôlés par le gouvernement de Pékin ».

Il faut toutefois remarquer, ajoute le site « que cette reconnaissance intervient à quelques semaines des décisions concernant le renouvellement de l’accord provisoire entre Rome et Pékin, dont le terme de deux ans arrive à échéance fin octobre ».

Biographie de Mgr Melchior Shi Honghzen

Originaire de Tianjin, ville dont il est évêque, il est né le 7 octobre 1929 et a été ordonné prêtre en 1954. « Mgr Shi Honghzen a été consacré évêque coadjuteur en 1982 avec l’autorisation du Saint-Siège par Mgr Stefano Li Side, un autre courageux évêque clandestin qui a payé sa défense de la liberté religieuse en Chine par l’emprisonnement et la réclusion jusqu’à sa mort en 2019 ».

Mgr Shi Honghzen a toujours refusé d’adhérer à l’Association patriotique, c’est d’ailleurs la raison pour laquelle il n’avait jamais été reconnu évêque par les autorités de Pékin jusqu’alors.

Une cérémonie d’installation qui n’en est pas une

Le site chinacatholic.cn raconte une « cérémonie d’installation de l’évêque de Tanjin en présence de l’évêque de Pékin, Mgr Joseph Li Shan “en tant que président de l’Association patriotique et vice-président du Conseil des évêques chinois” [l’organe collégial non reconnu officiellement par le Saint-Siège] et d’une centaine de personnes ».

Selon Asianews il s’est également empressé de rapporter que « lors de la cérémonie d’inauguration, Mgr Shi Honghzen a solennellement juré de respecter la Constitution nationale, de sauvegarder l’unité de la patrie et l’harmonie sociale, d’aimer le pays et l’Eglise et de toujours adhérer à la direction de la sinisation du catholicisme en Chine ».

Mais comme Asianews le commente « comme le montrent les images elles-mêmes, la cérémonie n’a pas eu lieu dans l’église historique Saint-Joseph de Xikai – siège de la cathédrale – mais dans une chambre d’un hôtel de la ville. C’est Mgr Shi Honghzen qui aurait souhaité ce lieu, soulignant le caractère civil de la cérémonie, puisqu’il était canoniquement l’évêque de Tianjin. »

Il reste que reconnaître un évêque de 94 ans – un âge auquel il aurait déjà dû, dans une situation normale, présenter sa démission depuis longtemps – n’engage pas beaucoup le gouvernement chinois, mais lui donne une publicité à bon compte. Et la satisfaction du Saint-Siège ressemble assez à de l’auto-persuasion.