Chine : un prêtre condamné pour avoir refusé l’Eglise schismatique
Photo d’illustration : un prêtre devant l’église Saint-Michel à Pékin
Le 13 septembre 2023, le P. Joseph Yang Xiaoming, du diocèse de Wenzhou (Zhejiang), au sud de Shanghai, a été reconnu coupable d’avoir enfreint la loi en refusant de s’enregistrer auprès de l’Association patriotique catholique chinoise (APCC), pilotée par le Parti communiste chinois (PCC).
Le prêtre a été condamné pour “fraude“ et “usurpation d’identité d’un membre du personnel religieux”, a rapporté ChinaAid. Les sanctions administratives imposées par le tribunal comprennent « la cessation de ses activités [sacerdotales], la confiscation des revenus illégaux, s’élevant à 28 473,33 yuans (3670 €) et une amende de 1 526,67 yuans (200 €) », a rapporté UCA News.
Selon AsiaNews, Yang Xiaoming, 33 ans, est né à Longwan, un district de la ville de Wenzhou, dans la province du Zhejiang. Il a été ordonné en 2020 par l’évêque Pierre Shao Zhumin. En mai 2021, peu après son ordination, le bureau des affaires religieuses du district de Longwan a entamé une procédure judiciaire contre le P. Yang.
Ce dernier a présenté au tribunal un certificat d’ordination « délivré par l’évêque de Wenzhou et le Bureau des affaires religieuses du district de Longwan ». Or, « le gouvernement du district de Longwan … a reconnu l’authenticité du document au tribunal, reconnaissant ainsi qu’il avait été ordonné conformément aux règles de l’Eglise catholique ».
Mgr Zhumin a été nommé évêque coadjuteur du diocèse de Yongjia en 2011 et évêque du diocèse en 2016, les deux fois avec un mandat papal ; il n’a cependant pas été approuvé par l’APCC. Mgr Zhumin a refusé à plusieurs reprises de reconnaître l’APCC et a été détenu à plusieurs reprises, la dernière fois le 18 février 2023. ChinaAid n’a reçu aucune information sur son statut ou sur le lieu où il se trouve.
Le PCC accroît la pression sur les activités religieuses
Durant les cinq dernières années, le PCC a constamment augmenté la centralisation de la surveillance des activités religieuses en Chine. En 2018, l’Administration nationale des affaires religieuses (NRAA), anciennement connue sous le nom de SARA, a été placée sous le Département du travail du Front uni (UFWD), qui est sous le contrôle direct du Comité central du Parti.
En décembre 2019, les mesures administratives pour les groupes religieux ont été publiées et sont entrées en vigueur le 1er février 2020. Ce document de 41 articles a édicté des dispositions plus strictes pour l’expression religieuse en imposant de nouvelles règles sur la structure, la fonction et la surveillance administrative des groupes religieux.
Selon Bitter Winter, qui suit de près la persécution religieuse en Chine, l’a. 3 stipule que : « Sans l’approbation du département des affaires religieuses du gouvernement populaire, ou l’enregistrement auprès du département des affaires civiles du gouvernement populaire, aucune activité religieuse au nom des organisations religieuses n’est autorisée. »
L’a. 17 précise que les membres du clergé doivent se conformer aux directives du PCC : « Les organisations religieuses doivent faire connaître au clergé et aux fidèles les directives du PCC (…) afin d’instruire et de diriger le clergé et les fidèles pour qu’ils soutiennent le gouvernement du PCC, le système socialiste, la voie du socialisme aux caractéristiques chinoises. »
En 2021, la SARA a publié une nouvelle réglementation qui restreint encore davantage la liberté des groupes religieux, spécialement les mesures relatives à la gestion du clergé religieux, avec la mise en place d’un contrôle et des directives encore plus stricts pour le clergé, en imposant des sanctions plus lourdes.
L’a. 3 réitère la nécessité pour le clergé d’être loyal et « d’adhérer à la direction de la sinisation de la religion en Chine, d’agir pour maintenir l’unité nationale, l’harmonie religieuse et la stabilité sociale ». L’a. 8 stipule que : « Le clergé, lorsqu’il publie des informations religieuses sur internet, doit se conformer aux dispositions pertinentes du règlement national sur l’information sur l’internet. »
Quant à l’a. 33 il déclare que : « l’administration nationale des affaires religieuses doit établir une base de données sur le clergé ; les départements des affaires religieuses des gouvernements populaires locaux doivent fournir et mettre à jour les informations de base sur le clergé, y compris les récompenses et les punitions, l’annulation des dossiers et d’autres informations ».
Une base destinée à la traque du clergé
Le 23 mai 2023, la base de données du clergé catholique a finalement été lancée. L’enregistrement est obligatoire et si un membre du clergé est reconnu coupable d’avoir enfreint l’une des règles, son appartenance officielle peut être annulée et ses fonctions religieuses suspendues.
Alors que les représentants du gouvernement affirment que cette base a été créée pour réprimer la fraude, le cas du P. Yang révèle qu’il s’agit d’un prétexte pour contraindre les religieux obstinés à s’enregistrer auprès d’organismes religieux sanctionnés par l’Etat : il s’agit d’une application concrète des mesures de 2021 relatives à la gestion du clergé.
L’arrestation du P. Yang est le dernier exemple en date de l’attaque du gouvernement contre le clergé catholique et met en lumière une préoccupation plus générale concernant la trajectoire de la liberté religieuse en Chine.
Elle intervient après la visite du pape François en Mongolie. A la fin de la messe papale, le Pape avait pourtant déclaré : « Je voudrais saluer chaleureusement le noble peuple chinois. A tous, je souhaite le meilleur. Allez de l’avant, allez toujours de l’avant. Et je demande aux catholiques chinois d’être de bons chrétiens et de bons citoyens. » Manifestement, Xi Jinping en veut davantage…
De plus, le cardinal Matteo Zuppi était à Pékin cette semaine en tant qu’envoyé spécial du Pape pour aider à promouvoir la paix et les initiatives humanitaires dans le cadre de la guerre en Ukraine. Fidèles à leur politique, les maîtres de l’empire rouge ont profité de sa présence pour condamner le P. Yang. Jusqu’à présent, le Saint-Siège n’a pas commenté la condamnation du prêtre catholique…
(Sources : ChinaAid/Ucanews/CNA – FSSPX.Actualités)
Illustration : Photo 181789728 | Chinese Priests © Mirko Kuzmanovic | Dreamstime.com