Conclave des médias : “Ni droite, ni gauche” assure le cardinal Filoni

Source: FSSPX Actualités

Le cardinal Fernando Filoni

Après le cardinal Gerhard Ludwig Müller, c’est au tour du cardinal Fernando Filoni – qui pourrait être classé parmi les centristes du Sacré-Collège – de prendre la parole dans la presse italienne afin de dessiner les contours du prochain pontificat qu’il appelle de ses vœux pour l’Eglise.

« Ni droite, ni gauche ! » Le titre donné par La Stampa du 30 avril 2019 à l’entretien accordé par le grand-maître de l’ordre équestre du Saint-Sépulcre, ne manquera pas de faire sourire certains lecteurs français qui retrouveront là un slogan souvent répété dans la vie politique française.

Mais c’est de vie ecclésiastique qu’il s’agit ici, puisque le cardinal Filoni souhaite que soient dépassés les « clivages » qui, selon lui, traversent le Sacré-Collège. Il est intéressant de constater au passage qu’un diplomate aussi chevronné que l’ancien nonce, évoque avec autant de facilité la polarisation existant au sein des électeurs du prochain pontife romain.

« Je n’ai pas peur des tensions ou des règlements de compte au conclave. Je crois, en fait, que les différents points de vue et la confrontation aident à mûrir. Nous ne devons pas penser à une Eglise sans problèmes, ils ont toujours été là. (…) L’Eglise grandit en faisant face aux défis », explique avec une certaine lucidité Mgr Filoni.

Et le porporato d’évoquer en des mots choisis la nécessité d’un changement de cap à la tête de l’Eglise : « Comme cela s’est produit avant l’élection de François, de nombreuses questions brûlantes ont émergé qui ont ensuite été reprises. Bergoglio n’a pas inventé une nouvelle façon d'être pape : avec son style, ses gestes et ses manières, il a donné une forme collégiale à des idées déjà partagées.

« Même maintenant, nous allons ouvrir les yeux sur de nombreuses richesses et de nombreux problèmes à résoudre. » Une façon de relativiser aussi l’héritage du précédent pontificat – ce qui aurait été inaudible à la mort du pape Jean-Paul II il y a vingt ans – quitte à faire grincer des dents chez certains résidents de Sainte-Marthe.

D’ailleurs le cardinal Filoni persiste et signe : « Le pape François a essayé par tous les moyens d’apporter sa pierre à l’édifice de la réconciliation, maintenant, il faut en ajouter d’autres. » Car le problème de l’“archipélisation” de l’Eglise est au cœur de l’intervention du haut prélat italien, même si le mot n’est pas employé.

« Le nouveau pontife devra renforcer l’unité de l’Eglise », souligne-t-il, ce qui suppose le constat implicite d’une unité mise à mal. Un constat qu’il faudrait aujourd’hui être aveugle pour nier. D’ailleurs, le compte-rendu officiel de la congrégation générale du 30 avril dernier évoque comme thème abordé celui de la « polarisation dans l’Eglise ».

En revanche, au niveau des moyens, l’ambition n’est pas vraiment au rendez-vous. Peut-être par trop prisonnier de ses habits de « centriste » au sein du collège cardinalice, Mgr Filoni décrit les priorités de l’Eglise : « Intensifier les relations œcuméniques et le dialogue interreligieux. » Avec une méthodologie déjà connue.

« L’Eglise a marché sur une voie de la synodalité, de la collégialité et de la valorisation des conférences épiscopales. Je pense que cette voie doit être consolidée. Le nouveau pape est appelé à marcher au milieu de son peuple, mais en gardant à l’esprit les réalités de ceux qui sont en avance, de ceux qui sont derrière. Et de ceux qui sont à droite et à gauche. » Autant de recettes qui riment avec échec depuis plus d’un demi-siècle.

Impossible de ne pas penser ici à Jean Guitton qui rapportait un jour ce trait d’humour du pape Paul VI, justifiant sa façon de gouverner l’Eglise : « pour mener une barque, vous avez deux rames ; alors, pour bien mener la barque, un coup de rame à droite, un peu après, un coup de rame à gauche ».

Etonnante technique de navigation qui équivaut à faire des ronds dans l’eau et du surplace : de quoi donner le tournis.