Courrier des lecteurs
Monsieur l’Abbé,
Je vous prie de trouver ci-joint mon réabonnement à Nouvelles de Chrétienté, en précisant toutefois que malgré la fidélité dont jai témoigné à la Fraternité depuis lorigine et mon indéfectible sympathie, je nen désapprouve pas moins totalement quelle sautorise à exclure lidée dun accord pratique avec les autorités de lEglise. En effet, dès lors quun accord satisfaisant et donc acceptable pourrait être obtenu, il ny aurait pas lieu et il serait excessif de rechercher si , par ailleurs, les doctrines professées par ces autorités dans certains domaines sont ou non irréprochables. Cest, bien au contraire, lessor de la pleine Tradition, rendu possible par un accord, lécho que susciterait cet accord, qui permettraient damplifier la lutte contre les déviances modernistes. Seuls des contacts approfondis et menés avec bonne volonté permettraient de juger de la possibilité dun retour, infiniment souhaitable, à lunité, sans compromissions ni abandon.
Je tenais à vous exprimer cette conviction, qui me paraît de bon sens, pour ne partager en rien les responsabilités quencourraient les dirigeants de la Fraternité en sopposant a priori à une régularisation qui semble providentiellement envisageable, au motif, ou au prétexte, dun mieux, qui sopposerait clairement ici au bien.
La cessation de la situation dexception, que létat de nécessité a imposé à la Tradition catholique, serait une grande victoire pour toute lEglise.
Ne renonçant pas à cet espoir, je vous prie dagréer, Monsieur lAbbé, lexpression de mes bien fidèles et respectueux sentiments.
Lettre signée
Réponse
Nous répondons volontiers à votre lettre qui expose votre avis sur la situation de la Fraternité St-Pie X.
Nous pensons comme vous que, si une solution satisfaisante et acceptable était possible, il faudrait bien évidemment y souscrire. Mais que veut-on dire par acceptable ? En cette affaire, la Fraternité St-Pie X ne veut pas agir pour elle-même et rechercher son seul bien particulier, mais elle tâche de servir lEglise. Nous ne recherchons pas une petite place "au soleil", mais nous pensons dune part à tous ces prêtres, surtout des jeunes prêtres, qui un peu partout dans le monde sont persécutés ou interdits de célébrer la Messe tridentine. Nous désirons que le droit à la messe traditionnelle soit reconnu pour tous et partout. Ce serait dautre part le signe que les autorités romaines ont décidé de véritablement soutenir la tradition. Le jour où le Vatican sera prêt à reconnaître à la Messe ses droits qui sont à lheure actuelle déniés, et à imposer cette décision pour lEglise universelle, un obstacle capital sera levé.
Nous sommes bien conscients que la situation ne se transformera pas du jour au lendemain et que ce nest pas en un jour que lEglise sera purifiée du venin moderniste. Nous sommes bien conscients que la réforme des curs, des intelligences et des déviations ne se fera pas par un coup de baguette magique mais demandera le temps nécessaire. Mais entre le but ultime à atteindre et la situation actuelle, il faudra bien des étapes intermédiaires. Toute étape est un mouvement, même sil reste imparfait par rapport à la destination, et ce mouvement doit pouvoir être perçu. Cest bien là que se situe le nud du problème que vous exposez. La prudence réclame que ce mouvement soit net, visible, incontestable, sans quoi, il risque bien de nêtre quun mirage qui nous attirerait dans un désert où il ne resterait plus quà mourir de soif
Malheureusement, nous sommes obligés de constater limmobilité, voire un mouvement contraire, même si des signes peuvent faire présager "que ça bougera"dans un temps que lon peut estimer comme pas trop éloigné. Comprenons bien que le jugement sur la situation est capitale : une illusion peut être mortelle.
Il nous faut également faire justice dun cliché véhiculé insidieusement par diverses voies et dont votre lettre est un reflet : lautorité de la Fraternité serait opposée par principe à un accord pratique. Doù vient ce jugement et sur quoi se fonde-t-il ? Lon serait bien en peine de lexpliquer et de donner des preuves. En réalité, il ne fait quexprimer lopinion et en même temps linsatisfaction de partisans dun accord précipité et cest une manière dexercer une certaine pression sur lautorité pour la pousser en ce sens. Alors que, dune part, les avancées de la tradition ont été régulières depuis trois ans, et que dautre part, lautorité a gardé lattitude qui a toujours été la sienne vis-à-vis de Rome, celle qui a été montrée par son vénéré fondateur : témoigner de la tradition devant les folies ecclésiastiques actuelles et rester attentif à tout ce qui pourra aider à son retour dans lintelligence et le cur des pasteurs de lEglise. Certes, il est loisible de donner son opinion étayée à lautorité lorsque lon pense avoir des lumières sur un sujet, mais de grâce, faisons lui confiance et ne laccusons pas sans preuve.
Ajoutons enfin quil est clair que cest bien sur le refus ou limpossibilité ? de donner la Messe à tous que sorganise la phase actuelle de ce gigantesque combat pour lEglise. Prions pour que les hirondelles qui ont pu être aperçues ici ou là nous ramènent bien vite un véritable printemps que nous serons les premiers à saluer.
La rédaction de DICI