Etats-Unis : Les évêques et l’avortement

Source: FSSPX Actualités

cardinal Théodore McCarrick

L'avortement dans la campagne présidentielle

Cette question envenime la campagne présidentielle américaine suite aux déclarations de certains évêques sur le refus de communion au candidat démocrate John Kerry qui, bien que catholique, défend le droit à l’avortement. Ils ont explicitement affirmé que des politiciens catholiques qui faisaient un tel choix se verraient refuser le sacrement.

 

Un groupe de travail sous la direction du cardinal Théodore McCarrick, archevêque de Washington, s’est penché sur ce problème, depuis novembre 2003, et a rédigé des Instructions pastorales sur les liens entre activités politiques des croyants et doctrine de l’Eglise. Ces instructions ne seront pas publiées avant les élections de novembre afin d’éviter, dit-on, une trop grande ingérence dans le vote des citoyens.

Toutefois la déclaration finale de la réunion de Washington précise que "le respect de l’Eucharistie exige que ce sacrement soit reçu par le fidèle avec une loyauté d’esprit". Elle met en garde les hommes politiques catholiques contre une interprétation erronée de la morale catholique et la pratique des sacrements à des fins politiques. Il est même nécessaire d’amener les responsables politiques catholiques à "corriger des lois qui sont aux yeux de l’éthique catholique répréhensibles". Cela concerne tout particulièrement "la protection de la vie avant la naissance et le combat contre l’avortement". Celui qui n’essaie pas de corriger ces lois "se rend moralement coupable et pèche contre le bien commun", affirment les évêques.

Par ailleurs, selon La Repubblica du 17 juin, dans une lettre officielle mais confidentielle à la Conférence épiscopale américaine, le cardinal Joseph Ratzinger demande que les personnes "vivant gravement dans le péché" ou "rejetant la doctrine de l’Eglise" s’abstiennent de communier. Cette lettre n’a pas été rendue publique. Elle a été envoyée aux évêques américains en réponse à leurs diverses questions face à la controverse qui agite la campagne présidentielle.

On se souvient que Mgr Raymond L. Burke, archevêque de Saint Louis, et Mgr Charles J. Chaput, archevêque de Denver, se sont exprimés contre le fait de donner la communion aux personnes dont les positions publiques sont contraires à l’enseignement de l’Eglise catholique. Selon des sources non officielles, le cardinal Ratzinger ne serait pas mécontent de les entendre se prononcer de cette façon. Un évêque américain en visite ad limina à Rome, en avril 2004, a aussi rapporté que le Préfet de la Congrégation pour la doctrine de la foi aurait demandé aux évêques américains d’être "plus attentifs à cette question".

Le 23 juin ont été rendues publiques les diverses positions qui se sont manifestées lors de la dernière assemblée plénière des évêques américains à Englewood, dans la banlieue de Denver. Mgr William J. Levada, archevêque de San Francisco, considère que l’avortement a une "place unique" dans la doctrine sociale catholique. « Il peut y avoir une diversité légitime d’opinions parmi les catholiques sur une déclaration de guerre ou sur l’application de la peine de mort, mais pas en ce qui concerne l’avortement ou l’euthanasie". Président de la Commission épiscopale sur la doctrine et membre du groupe de travail "Evêques catholiques et politiciens catholiques", Mgr Levada a appelé les évêques à engager un véritable dialogue avec les hommes politiques catholiques à propos des relations entre la politique publique et les principes moraux et éthiques. Concernant le cas où un évêque peut se sentir obligé de refuser la communion à un catholique qui défend publiquement l’avortement, il a souligné que les évêques sont « appelés à veiller à l’unité de l’Eglise dans toute sa diversité". Et de préciser que l’application de mesures restrictives concernant la réception de la communion dans un diocèse particulier a nécessairement des implications pour tous.

La bataille à livrer pour la vie humaine et la dignité, pour le plus faible et le plus vulnérable, ne doit pas se dérouler à la table de communion, mais sur la place publique, a déclaré le cardinal McCarrick. C’est une bataille pour gagner les cœurs et les esprits qui doit être menée en chaire et dans le public. Au sujet du refus de la communion, l’archevêque de Washington reconnaît que "la Conférence épiscopale est divisée, avec plusieurs évêques qui sont sincèrement convaincus que c’est nécessaire et beaucoup d’autres qui ne soutiennent pas de telles actions."

La Conférence des évêques a consulté des théologiens moraux et des canonistes qui ont mis en garde contre de telles mesures qui pourraient soulever "de sérieuses questions au sujet de la doctrine catholique et de l’application du droit canonique", a-t-il affirmé."Il n’y a pas de réponses simples" dans la manière dont les évêques doivent entretenir des relations avec les hommes politiques, estime le cardinal McCarrick. Les évêques doivent être "politiques mais non partisans" quand ils expriment leur enseignement, et exercent leur tâche pastorale et leur rôle de chefs de l’Eglise, en faisant appel aux responsabilités des politiciens catholiques et en leur rappelant les valeurs morales en jeu. Il souhaite que les évêques aient des principes mais ne soient pas "idéologiques", "engagés mais pas utilisés".

Tu ne tueras pas, dit le Seigneur.