Etats-Unis : un vice-président qui lit saint Augustin

Source: FSSPX Actualités

Le pape François, décédé le Lundi de Pâques, 21 avril 2025, avait donné sa dernière audience la veille, dimanche de Pâques, au vice-président des Etats-Unis James David Vance. Ce converti du protestantisme en 2019 explique l’influence qu’ont eu sur lui les écrits de saint Augustin et saint Thomas d’Aquin. Et il le prouve.

L’ordre de la charité face à l’humanitarisme désordonné

D’abord face aux évêques américains qui critiquent la politique migratoire de Donald Trump. Comme le rapporte LifeSiteNews du 31 janvier 2025, lors d’un entretien sur Fox News « le vice-président J.D. Vance a défendu l’enseignement catholique traditionnel concernant la sollicitude envers sa propre famille et son pays, avant les immigrants étrangers, suscitant ainsi l’indignation de la gauche et un débat sur les réseaux sociaux.

« Il a déclaré : “Il y a quelque chose de très tordu dans l’esprit de l’extrême gauche de ce pays, et je pense vraiment qu’ils éprouvent plus de compassion pour les étrangers en situation irrégulière qui n’ont pas le droit d’être dans ce pays, que pour leurs concitoyens. En tant que dirigeant américain, mais pour vous aussi en tant que citoyen américain, votre compassion va d’abord à vos concitoyens.

« Cela ne veut pas dire que vous détestez les gens en dehors de vos frontières, mais il y a cette vieille école – et je pense que c’est un concept très chrétien, d’ailleurs – vous aimez votre famille, puis vous aimez votre voisin, puis vous aimez votre communauté, puis vous aimez vos concitoyens dans votre propre pays et ensuite, après cela, vous pouvez vous concentrer sur le reste du monde et lui donner votre priorité”. »

LifeSiteNews cite plusieurs théologiens et philosophes catholiques qui sont intervenus pour défendre les déclarations de J.D. Vance comme étant un résumé de l’enseignement traditionnel. Michael Sirilla, professeur de théologie à l’Université de Steubenville écrit : « Il s’agit d’une notion chrétienne appelée ordo caritatis, l’ordre de la charité. Saint Augustin et saint Thomas d’Aquin l’expriment avec éloquence et Vance la résume ici habilement. »

Le professeur de philosophie Edward Feser a également soutenu J.D. Vance : « Le point de vue correct est que notre nature sociale et les obligations qui en découlent se manifestent d’abord et avant tout dans la famille, puis dans les communautés locales, puis dans la nation dans son ensemble, et seulement ensuite dans nos relations avec l’humanité en général. »

LifeSiteNews fait référence à saint Thomas d’Aquin, « connu comme docteur universel de l’Eglise catholique, qui enseigne cet ordre de la charité dans sa Summa Theologiæ, où il affirme : “Dans les questions relatives à la nature, nous devons aimer le plus nos semblables, dans les questions relatives aux relations entre les citoyens, nous devons préférer nos concitoyens, et sur le champ de bataille, nos compagnons de combat”. (Summa Theologiæ IIa IIae, q 26) »

Une Europe menacée de l’intérieur par une idéologie suicidaire

De nouveau James David Vance s’est illustré lors du discours qu’il a prononcé à la Conférence de Munich sur la sécurité, le 14 février, devant un parterre de diplomates internationaux. Eugenio Capozzi résume son intervention, dans La Nuova Bussola Quotidiana du 17 février :

« J.D. Vance a soutenu, comme c’est désormais sous les yeux de tous, que la pire menace pour la sécurité de l’Europe ne vient pas d’ennemis extérieurs, comme la Russie ou la Chine, mais de l’intérieur, et qu’il s’agit d’une menace d’ordre culturel, éthique et spirituel. »

Et de préciser : « Bref, le bras droit de Trump a dénoncé le fait que le modèle politique construit par l’Union européenne et par la plupart des gouvernements du continent apparaît aujourd’hui, vu de l’extérieur, comme résolument tourné vers l’autoritarisme, et comme une véritable trahison des valeurs de liberté et de démocratie que, même si c’est en parole, ces gouvernements soutiennent avec tant d’insistance.

« Et il a donné des exemples très précis à cet égard, qui ont certainement sonné comme une véritable gifle pour de nombreux auditeurs présents : le contrôle étouffant des réseaux sociaux ; la censure et la répression de plus en plus sévères de la liberté d’opinion et d’expression (avec une atteinte particulière à la liberté religieuse et au droit de prier près des cliniques d’avortement).

Et encore la tendance explicite à manipuler les résultats des élections lorsqu’ils ne sont pas conformes à certains diktats idéologiques(en particulier, le cas incroyable de la Roumanie) ; la tentative de ghettoïser et d’exclure du débat public des forces politiques, même bénéficiant d’un consensus significatif, en les désignant unilatéralement comme “infréquentables” ; la promotion d’une immigration de masse incontrôlée qui porte atteinte à la vie, à la sécurité et aux libertés de ses citoyens. »

Ce qui frappait dans les propos du vice-président américain, note Eugenio Capozzi, « ce n’est pas seulement le contenu des accusations qui a fait mal, c’est peut-être plus encore le ton plein d’autorité et d’assurance, sans la moindre concession au “politiquement correct”, avec lequel Vance les a prononcées, ou plutôt martelées. »

Et de signaler que Donald Trump a « une idée très précise de la direction que doivent prendre les démocraties alliées, et il n’hésite pas à la communiquer. Cette direction, laisse entendre le vice-président Vance, sera désormais un critère dirimant dans les relations entre les Etats-Unis et chacune d’elles :

« abandonner toute ambition d’Etat – ou super-Etat – “éthique”, qui prétendrait “éduquer” ses citoyens ; abandonner l’idéologie étouffante de l’environnementalisme anti-humain et anti-économique ; faire marche arrière sur l’endoctrinement woke ; revenir à un débat politique ouvert à 360 degrés, dans lequel les forces populistes et souverainistes, elles aussi, sont pleinement admises, afin d’orienter le continent vers des politiques plus réalistes, orientées vers la croissance et le maintien d’un tissu communautaire solide.

« Bref, J.D. Vance a laissé entendre sans équivoque quel’administration Trump 2 est loin d’être isolationniste ou de se désintéresser des relations avec l’Europe, comme beaucoup le pensaient. Au contraire, elle est extrêmement préoccupée par la dérive autodestructrice d’un continent enfermé dans une “bulle” idéologique, voué au déclin et à la décadence, de plus en plus fragile et exposé à l’influence de puissances étrangères à ses racines. »

Malheureusement, ainsi que le constate Stefano Fontana sur La Nuova Bussola Quotidiana du 18 février, « l’Eglise en Europe, comme l’a montré récemment un rapport [de l’Observatoire cardinal Van Thuân pour la doctrine sociale de l’Eglise] qui lui est consacré, l’Eglise n’a pas cherché à libérer les peuples de l’idéologie pro-européiste ;

« elle a suivi toutes les politiques qui se sont avérées infructueuses par la suite et a renoncé à son propre rôle d’éducation à la vérité, à la lumière de la raison et de la foi. On peut donc dire que le discours de Vance contient aussi implicitement une réprimande de l’attitude de l’Eglise catholique, qui est devenue une “aumônerie” du courant politique dominant. »

Et l’universitaire italien invite J.D. Vance à suivre son chemin vers « ce “sens commun” auquel il a fait allusion [dans son discours], pour parvenir à la conception d’un ordre social “finaliste” [avec un but objectif] qui fournit à la démocratie les valeurs à défendre. Car, les majorités ne créent pas les valeurs, elles les respectent et les défendent. »