France : Canal+ révèle les dessous du marché halal
Un reportage vidéo diffusé le 31 juillet, à la veille du ramadan, par la chaîne de télévision Canal+ et intitulé « Halal : les dérives d’un nouveau business », a révélé que les organismes certificateurs ne remplissent pas leur tâche, octroyant la certification halal sans contrôle. Ce reportage de 52 minutes, réalisé par Feurat Alani et Florent Chevolleau, est une version revue et augmentée d’un premier reportage de 26 minutes diffusé sur Canal+ le 11 octobre 2010, Halal : les dessous du business. La partie inédite revient sur les scandales des knackis Herta et du saucisson Kenza Halal.
C’est ainsi que des traces de porc ont été retrouvées, en janvier 2011, dans des saucisses Herta certifiées halal. « Etant donné que la présence de contrôleurs dans les abattoirs entraînerait une augmentation de 20% des prix des produits » estime Fourat Alani, « beaucoup préfèrent donc fermer les yeux », d’autant qu’il n´existe aucune loi en France régissant la certification. Le Conseil français du culte musulman a bien essayé d´établir une charte, mais sa définition du mot halal n´est pas acceptée par tous. Selon Florence Bergeaud-Blackler, chercheur à l´Institut de recherches et d´études sur le monde arabe et musulman de l´Université de Provence, et citée par le journal La Croix du 3 août 2011, « le problème est qu´il n´y a pas de consensus sur une définition agroalimentaire du halal. » D’après Fourat Alani, « tout le monde peut devenir organisme certificateur halal. Il n’y a aucune loi qui encadre l’utilisation du mot ». « Dans certains cas c’est envoi d’estampille contre envoi de chèque, et ça ne va pas plus loin. C’est l’impunité totale », explique quant à lui Fateh Kimouche, animateur d’un blog spécialisé sur la question.
Suite à la diffusion du reportage par Canal+, huit élus municipaux d´origine musulmane ont demandé la mise en place d´une commission d´enquête parlementaire « pour faire toute la lumière sur le marché du halal dont certaines pratiques commerciales peuvent s´apparenter à de l´escroquerie publique, faute d´une législation claire et précise”. « Halal » désigne dans l´islam ce qui est licite, permis au musulman. La nourriture halal est donc la nourriture qu´il lui est permis d´ingérer.
Ce marché est particulièrement important en France puisqu’il a représenté 5,5 milliards d’euros en 2010. Florence Bergeaud-Blackler explique l’origine de ce succès par le regain identitaire des musulmans de 18 à 25 ans, pour qui « l´alimentation est une pratique religieuse relativement aisée, qui constitue un signe extérieur d´islamité très valorisé dans la communauté ». Si les commerces de quartier et supérettes spécialisées concentrent l´essentiel des recettes, la grande distribution s´est également lancée sur le marché depuis une dizaine d´années.
– Ce fait de société aura échappé aux lecteurs de DICI qui n’ont pas Canal+, et qui n’ont rien manqué en ne voyant pas le reportage diffusé par la chaîne cryptée. Mais tel est l’état de la France naguère catholique, aujourd’hui laïque, demain… Bientôt la baguette de pain halal ! (Sources : apic/ La Croix - DICI n°239 du 13/08/11)