France : La rencontre interreligieuse d’Assise renouvelée à Lyon
Dans "l’esprit d’Assise", la 19ème rencontre interreligieuse organisée par la communauté italienne Sant’Egidio a eu lieu du 11 au 13 septembre (2005) à Lyon.
S’y sont retrouvés 4 à 5000 participants de France, d’Italie, d’Espagne, d’Allemagne, de Belgique, d’Europe de l’Est... Une dizaine de religions étaient représentées. Nicolas Sarkozy et Simone Veil y ont pris la parole. Le maire de Lyon Gérard Collomb qui ne cache pas son appartenance à la Franc-maçonnerie a apporté son soutien à la manifestation : "Je suis de ceux qui estiment que les religions peuvent être facteur de dialogue et d’enrichissement".
Lors de la cérémonie de clôture à la basilique de Fourvière, dans la soirée du 13 septembre, un "geste concret de réconciliation" entre catholiques et protestants a été posé.
Sur la suggestion du pasteur luthérien de Lyon, le cardinal archevêque Philippe Barbarin s’est fraternellement adressé aux personnes que la mosaïque de la basilique — représentant Martin Luther comme un hérétique, le qualifiant de "pillard" et de "voleur" — pouvait heurter. Le cardinal et six représentants des Eglises protestantes et orthodoxes de Lyon ont dévoilé ensemble une plaque manifestant la volonté commune des "Eglises chrétiennes" de la ville de surmonter leur histoire douloureuse et de servir ensemble le Christ et l’Evangile.
Suivait une méditation dirigée par le cardinal Walter Kasper, le président de la Fédération protestante de France Jean-Arnold de Clermont et le patriarche orthodoxe Seraphim Kikkotis.
***
Commentaire:
Le 8 septembre, l’abbé Sylvain Lamerand, prieur de la Fraternité Saint Pie X à Lyon, a tenu à faire parvenir au cardinal Barbarin une lettre dont voici les principaux extraits :
"1) La paix est un don de Dieu, et comme tous les chrétiens et tous les hommes de bonne volonté, nous la désirons et prions pour cela. Mais de quelle paix s’agit-il ici ? Dans une perspective chrétienne, la paix proclamée par l’Evangile est celle de la Vérité et de la Charité donnée par Dieu aux hommes qui acceptent de la recevoir : elle guérit les âmes et apporte la paix des cœurs et celle des hommes entre eux. La paix recherchée dans des réunions comme celle qui se prépare à Lyon se veut réaliste – et donc réalisable – dans un monde marqué par les différences. Nous pensons que cette paix est trop humaine et certainement illusoire : le Seigneur, qui donne Sa paix au monde, ne la donne pas "comme le monde la donne". On risque bien, avec de tels efforts, d’oublier que la paix est un don de Dieu qui dépend aussi de notre acceptation de Sa Vérité, de Sa grâce, de Son Amour – et qu’elle ne dépend pas seulement des efforts des hommes entre eux (même si cette question est importante, nous ne le nions pas !), mais aussi des efforts des hommes vis-à-vis de Dieu, parce que seule la Vérité délivre et pacifie.
"2) Que la religion soit incompatible avec la guerre relève d’une simplification dangereuse. L’Eglise a toujours enseigné qu’il existe une guerre juste quand elle est le seul moyen, hélas, de réparer des injustices graves : dans ce cas, la guerre est servante de la paix. C’est bien au nom de la paix que le pape saint Pie V a encouragé l’Europe chrétienne à repousser, par la prière et par les armes, l’invasion musulmane qui menaçait alors les corps et les âmes !
"3) Ces réunions interreligieuses amènent à l’indifférentisme religieux, même si cette intention n’est pas celle de ceux qui les organisent. Il faut admettre que nos contemporains, de plus en plus habitués à ces manifestations, ne se posent plus le problème de la Vérité et que l’opinion la plus courante est désormais que "toutes les religions se valent".Que penseront les âmes simples en voyant la marche commune des religions vers le Forum pour fêter la paix ? En 2003, dans une rencontre de prière à Acquisgrana, la communauté Sant’Egidio donnait ce mot d’ordre : "nous ne voulons convertir personne. C’est une bonne chose que chacun grandisse dans sa religion" (revue Si si no no, mai 2005). Le pape Pie XI, vous le savez, dans son encyclique Mortalium animos du 6 janvier 1928, condamnait ce genre d’assemblée qui "fait verser graduellement dans le naturalisme et l’athéisme". Et il disait que "les catholiques ne peuvent en aucune manière approuver ces tentatives". Ce danger du syncrétisme a d’ailleurs été plusieurs fois évoqué et condamné par le Saint-Père Benoît XVI avant et après son accession au souverain pontificat.
"4) Enfin - et c’est là la réserve la plus importante que nous émettons - dans ces rencontres, on invite les autres religions à prier et à exercer leur culte. Cela se fera bientôt sur la colline de Fourvière pourtant toute consacrée à la Mère de Dieu…
"Si Dieu seul connaît la vérité de toute prière et la sincérité du croyant, c’est néanmoins objectivement une atteinte au premier commandement que d’encourager à prier dans l’erreur.
C’est le principal reproche qu’adressait Mgr Lefebvre au pape Jean-Paul II en 1986. Il voyait dans la réunion d’Assise "un péché public contre l’unicité de Dieu, contre le Verbe incarné et son Eglise" (lettre au Pape du 2 décembre 1986). De son côté, le cardinal Oddi, alors préfet de la Congrégation du clergé, se demandait si une telle réunion ne tombait pas sous le coup de la condamnation de Pie XI ( Figaro hors série, avril 2005).
"Ces journées du 11 au 13 septembre à Lyon se situant dans la continuité d’Assise, nous réitérons ici la même inquiétude et nous faisons nôtres les paroles écrites par Mgr Lefebvre en 1978 au cardinal Seper : "l’œcuménisme libéral corrompt la mission fondamentale de l’Eglise qui va à travers les nations pour convertir les âmes à Jésus- Christ. C’est le vrai dialogue émanant de la vraie charité". Le fondateur de la Fraternité Saint Pie X savait de quoi il parlait, après sa longue expérience de missionnaire en terre musulmane où il a laissé le souvenir encore vivant d’un homme de Dieu, d’un homme de paix."