France : retour sur la cérémonie d’ouverture des JO 2024 (2)

Source: FSSPX Actualités

Sous une pluie battante, Paris s’est transformée, le temps de la cérémonie d’ouverture des Jeux olympiques, le 26 juillet 2024, en une grande scène ouverte. Douze tableaux, pour un spectacle de lumière, de musique et de danse, invitant à la paix, à la liberté, à l’égalité, à la fraternité…

Les dénégations peu crédibles de Thomas Jolly

Le sénateur communiste des Hauts-de-Seine Pierre Ouzoulias avait souligné sur X-Twitter que « le blasphème fait partie intégrante de notre patrimoine républicain », et qu’il est « un trait glorieux de notre histoire révolutionnaire », remerciant Thomas Jolly, directeur artistique de la cérémonie, « de l’avoir rappelé au monde entier à travers cette Cène dont on se souviendra longtemps ».

Quelque peu embarrassé par ces remerciements trop directs, et d’autres félicitations trop chaleureuses, l’intéressé s’est cru obligé de faire une mise au point le 28 juillet : « Vous ne trouverez jamais chez moi une quelconque volonté de moquerie, de dénigrer quoi que ce soit. J’ai voulu faire une cérémonie qui répare, qui réconcilie [sic]. Et aussi qui réaffirme les valeurs de notre République (...) », a ainsi déclaré Thomas Jolly sur BFMTV.

Et de répondre aux critiques sur la parodie de la Cène que ce n’était « pas [son] inspiration » : « Je crois que c’était assez clair, il y a Dionysos [le danseur nu] qui arrive sur cette table. Il est là pourquoi, parce qu’il est dieu de la fête (...), du vin, et père de Sequana, déesse reliée au fleuve. »

« L’idée était plutôt de faire une grande fête païenne reliée aux dieux de l’Olympe... Olympe... Olympisme », a-t-il poursuivi. Et au sujet du tableau représentant une Marie-Antoinette décapitée (tenant sa tête dans ses bras) à la Conciergerie, il a assuré qu’il n’y avait pas de « glorification de cet instrument de mort qu’était la guillotine » [sic].

Croit-il pouvoir convaincre qui que ce soit ? Alors que la filiation révolutionnaire de son spectacle est explicite. Les références de Thomas Jolly ne sont ni sainte Geneviève qui sauva Paris, ni sainte Jeanne d’Arc qui sauva la France, mais Olympe de Gouges, rédactrice de la Déclaration des droits de la femme et de la citoyenne, en 1791 ;

Louise Michel, militante et protagoniste de la Commune de Paris où elle a mis en avant le drapeau noir symbole de l’anarchisme ; Gisèle Halimi, avocate qui a contribué à l’instauration de la loi Veil ; et Simone Veil qui a fait adopter la loi sur l’avortement en 1975. Ce sont bien elles qui figurent dans le tableau intitulé « Sororité », proposé à la vénération du public, le 26 juillet.

En outre, lorsqu’il dit qu’il n’y a chez lui aucune volonté de moquerie il fait preuve d’une grande ingratitude à l’égard de celui qui a largement contribué à l’élaboration de son spectacle : l’historien Patrick Boucheron, professeur au Collège de France, partisan du Nouveau Front populaire.

Ce dernier a clairement exposé son intention : « prôner le métissage planétaire », en s’inspirant de « la cérémonie imaginée par Jean-Paul Goude pour le Bicentenaire de la Révolution française, en 1989 », où « le défilé déjouait les stéréotypes nationaux et ne craignait pas de prôner le métissage planétaire avec un optimisme que nous avons aujourd’hui perdu ».

Patrick Boucheron est connu pour avoir vivement critiqué le parc à thème historique du Puy du Fou, dans un long dossier publié par L’Obs du 27 juillet 2023. A l’ouverture des JO de Paris, il ne s’agissait pas pour lui de dénigrer au hasard, mais de façon ciblée, en se moquant des valeurs prônées au Puy du Fou. C’est ce qu’il appelle « casser les codes ».

Indignations de plusieurs intellectuels

Dans Le Figaro du 28 juillet, l’académicien Alain Finkielkraut livre ses impressions sur la cérémonie d’ouverture : « Une cérémonie grandiose qui a cassé tous les codes, titrait le journal Libération. Remettons les choses à l’endroit : c’était un spectacle grotesque, qui, des drag queens à Imagine et de la célébration de la sororité à la décapitation de Marie-Antoinette (l’une des pages les plus glorieuses de notre histoire) déroulait pieusement tous les stéréotypes de l’époque.

« Sur un point, Patrick Boucheron a raison : le génie français brillait par son absence. Je ne parle pas de la grandeur. Peu m’importe la grandeur ! Non, entre la chorégraphie horrible de Lady Gaga et les pénibles exhibitionnismes de Philippe Katerine [le danseur nu], où étaient le goût, la grâce, la légèreté, la délicatesse, l’élégance, la beauté même ?

« La beauté n’existe plus. L’heure est à la lutte contre toutes les discriminations. […] Thomas Jolly et Patrick Boucheron s’applaudissent de leur audace transgressive alors qu’ils sont les serviteurs zélés de la doxa. La nation résolument tournée vers l’avenir confie à des historiens le soin de dilapider son héritage.

« Le Collège de France a été longtemps un haut lieu de la pensée libre, c’est devenu le bastion de l’idéologie. […] La diversité du monde est joyeusement engloutie dans le grand métissage planétaire. Et ce n’étaient plus les athlètes de tous les pays qui défilaient sous les yeux d’un public ravi, c’étaient les bateaux-mouches avec, sur le pont, des matelots surexcités. »

Et l’agnostique Finkielkraut de confier : « Le déluge qui s’est alors abattu sur la Ville Lumière ne peut être qu’une punition divine. A quelque chose, malheur est bon : après cette soirée apocalyptique, je suis devenu croyant. »

Dans le Journal du dimanche du 28 juillet, le philosophe athée Michel Onfray n’hésite pas à écrire : « Avec l’aide du Collège de France, Macron a réalisé le rêve mélenchoniste appuyé par la gauche culturelle : célébrer l’Homme nouveau, déconstruit, pour une “France nouvelle” métissée, cosmopolite, LGBTQ +, etc. »

De ce « Disneyland wokiste kitsch », il retient la « parodie de la Cène, somme toute assez veule et convenue, imagine-t-on une parodie du pèlerinage à la Mecque chez ces faux subversifs vraiment payés par l’Etat ? Et cette célébration de la Terreur de 1793. […] On aura compris qu’il faut donc en finir avec cette religion-là qui est celle de notre civilisation ! Comment ?

« En retrouvant la Terreur, la décapitation, le Tribunal révolutionnaire, la guillotine. Ceux-là mêmes qui panthéonisent Badinter pour avoir aboli la peine de mort, font en même temps de la guillotine un instrument de gouvernement. Attaquer le christianisme et célébrer la peine de mort contre une femme dont la seule faute fut d’être l’épouse de son royal mari, voilà bien de sinistres augures. »

Dans le même numéro du Journal du dimanche, Philippe de Villiers écrit : « C’était décoiffant, déjanté, difforme, disgracieux. Nous avons acté devant le monde entier le suicide de la France, ainsi violentée, blessée, déshonorée. Le filigrane qui courait dans la trame de la pauvre Seine offensée, qui, finalement, fut seule à tirer son épingle du jeu, c’était la déconstruction : prendre le passé et le tourner en parodie pour faire ricaner les quais du Boboland.

Tout l’appareillage de la dérision des symboles était là : le Veau d’or devant les deux Macron, le pastiche de la Cène avec les drag queens qui festoient autour d’une eucharistie christique – un Jésus woke – qui profane le célèbre tableau du Dernier Repas, fondateur d’une civilisation. […] Mahomet, lui, est tranquille pour la soirée. Pas d’offense, pas d’allusion. “Respect”, comme disent les jeunes.

« Il n’y a de blasphème et de sacrilège que sous la forme christianophobe. Et puis, il y eut cette évocation sanglante de la Terreur, quand une diva a entamé le célèbre chant des sans-culottes qui a envoyé à la guillotine les dissidents de l’époque. Devant une Conciergerie embrasée par un retour de flamme vengeur, on nous montre Marie-Antoinette qui porte sa tête décapitée, dégoulinante dans ses mains. »

Et le créateur du spectacle du Puy du Fou d’avouer : « Pour ma part, je n’ai pas été surpris. Car l’équipe artistique avait annoncé la couleur dans le journal Le Monde : “Nous ne voulons surtout pas d’une reconstitution à la manière du Puy du Fou. Nous voulons faire l’inverse. Surtout pas une histoire virile, héroïsée, providentielle. On veut le désordre et que tout s’entremêle.” Que grâce leur soit rendue, ils ont tenu leur promesse. »