Homélie de Benoît XVI pour la béatification de Jean-Paul II

Le dimanche 1er mai 2011, à l’occasion de la béatification de son prédécesseur, Benoît XVI a justifié la procédure exceptionnellement courte dont a bénéficié Jean-Paul II par le « sentiment qu'une immense grâce enveloppait Rome et le monde entier » le jour de ses funérailles. « Ce jour-là, nous sentions déjà flotter le parfum de sa sainteté, et le Peuple de Dieu a manifesté de nombreuses manières sa vénération envers lui. C'est pourquoi j'ai voulu, tout en respectant la réglementation de l'Eglise, que sa cause de béatification puisse avancer avec une certaine célérité ».
Benoît XVI n’a pas repris les réserves émises sur la béatification extrêmement rapide du pape qui avait présidé la réunion interreligieuse d’Assise. Bien au contraire il a tenu à souligner la foi de son prédécesseur dans l’exercice de sa charge : « Aujourd'hui a été proclamé bienheureux un pape, un Successeur de Pierre, appelé à confirmer ses frères dans la foi. Jean-Paul II est bienheureux pour sa foi, forte et généreuse, apostolique. (…) ‘Tu es heureux, Simon fils de Jonas, car cette révélation t'est venue, non de la chair et du sang, mais de mon Père qui est dans les cieux’. Qu'a donc révélé le Père céleste à Simon ? Que Jésus est le Christ, le Fils du Dieu vivant. Grâce à cette foi, Simon devient Pierre, le rocher sur lequel Jésus peut bâtir son Eglise.
Rappelant la devise mariale de Jean-Paul II, Totus tuus, Benoît XVI a affirmé que cette béatification, au premier jour du mois de Marie, était placée « sous le regard maternel de celle qui, par sa foi, soutient la foi des apôtres et soutient sans cesse la foi de leurs successeurs, spécialement de ceux qui sont appelés à siéger sur la chaire de Pierre ».
Puis le pape a montré le rôle central du Concile Vatican II dans le pontificat de Jean-Paul II dont il a cité le Testament : « Je désire encore une fois exprimer ma gratitude à l'Esprit Saint pour le grand don du Concile Vatican II, envers lequel je me sens débiteur envers l'Eglise tout entière et surtout avec l'épiscopat tout entier. Je suis convaincu qu'il sera encore donné aux nouvelles générations de puiser pendant longtemps aux richesses que ce concile du XXe siècle nous a offertes. En tant qu'évêque qui a participé à l'événement conciliaire du premier au dernier jour, je désire confier ce grand patrimoine à tous ceux qui sont et qui seront appelés à le réaliser à l'avenir. Pour ma part, je rends grâce au Pasteur éternel qui m'a permis de servir cette très grande cause au cours de toutes les années de mon pontificat ».
Et Benoît XVI d’expliquer quelle est cette « cause » : « Celle-là même que Jean-Paul II a formulée au cours de sa première messe solennelle sur la place Saint-Pierre, par ces paroles mémorables : ‘N'ayez pas peur! Ouvrez, ouvrez toutes grandes les portes au Christ !’ Ce que le pape nouvellement élu demandait à tous, il l'a fait lui-même le premier. Il a ouvert au Christ la société, la culture, les systèmes politiques et économiques, en inversant avec une force de géant, force qui lui venait de Dieu, une tendance qui pouvait sembler irréversible. Par son témoignage de foi, d'amour et de courage apostolique, accompagné d'une grande charge humaine, ce fils exemplaire de la nation polonaise a aidé les chrétiens du monde entier à ne pas avoir peur de se dire chrétiens, d'appartenir à l'Eglise, de parler de l'Evangile. En un mot, il nous a aidés à ne pas avoir peur de la vérité, car la vérité est garantie de liberté. De façon plus synthétique encore, il nous a redonné la force de croire au Christ, car le Christ est le Rédempteur de l'homme, thème de sa première encyclique et fil conducteur de toutes les autres ».
Puis Benoît XVI a résumé ce qui constitue le message de Jean-Paul II dans la droite ligne du Concile Vatican II : « Karol Wojtyla est monté sur le siège de Pierre, apportant avec lui sa profonde réflexion sur la confrontation, centrée sur l'homme, entre le marxisme et le christianisme. Son message a été celui-ci : L'homme est le chemin de l'Eglise, et le Christ est le chemin de l'homme. Par ce message, qui est le grand héritage du Concile Vatican II et de son timonier, le Serviteur de Dieu Paul VI, Jean-Paul II a conduit le Peuple de Dieu pour qu'il franchisse le seuil du troisième millénaire chrétien, qu'il a pu appeler, précisément grâce au Christ, le seuil de l'espérance. Oui, à travers le long chemin de préparation au Grand Jubilé, il a donné au Christianisme une orientation renouvelée vers l'avenir, l'avenir de Dieu, transcendant quant à l'histoire, mais qui, quoiqu'il en soit, a une influence sur l'histoire. Cette charge d'espérance qui avait été cédée en quelque sorte au marxisme et à l'idéologie du progrès, il l'a légitimement revendiquée pour le christianisme, en lui restituant la physionomie authentique de l'espérance, à vivre dans l'histoire avec un esprit d'avent, dans une existence personnelle et communautaire orientée vers le Christ, plénitude de l'homme et accomplissement de ses attentes de justice et de paix. » (Source : VIS - DICI n°234 du 07/05/11)
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