Inde : Des théologiens s’interrogent sur l’orientation de Benoît XVI au sujet du dialogue interreligieux
Selon la revue Eglises d’Asie, certains théologiens catholiques, en Inde, s’interrogent sur l’orientation que donnera Benoît XVI à son pontificat en matière de dialogue interreligieux. En effet, le nouveau pape, lorsqu’il était à la tête de la Congrégation pour la doctrine de la foi, s’était montré très attentif aux travaux des chercheurs indiens sur le dialogue interreligieux, et il les avait sanctionnés à plusieurs reprises.
Notamment le jésuite belge Jacques Dupuis, un temps installé en Inde, dont l’ouvrage intitulé Vers une théologie chrétienne du pluralisme religieux, paru en 1997, avait fait l’objet en octobre 1998 d’une enquête de la congrégation présidée par le futur pape. Une notification avait ensuite été publiée, relevant "de graves ambiguïtés et des difficultés sur des points doctrinaux importants".
Une autre affaire avait touché le Sri-Lankais et religieux de la congrégation des Oblats de Marie Immaculée, Tissa Balasuriya. Plusieurs propositions d’un de ses livres intitulé Marie et la libération humaine avaient été jugées hérétiques par la Congrégation pour la doctrine de la foi. Leur auteur avait même été excommunié le 2 janvier 1997. La sanction avait été levée un an plus tard par l’archevêque de Colombo, après que le religieux eut prononcé une profession de foi publique.
Un religieux de Goa, le Père Seby Mascarenhas, de la congrégation indienne des Missionnaires de Saint François Xavier, a cependant déclaré que les théologiens n’avaient pas de raison de s’inquiéter de l’élection du nouveau pape. "Les chercheurs s’engageront sur de nouveaux chemins, a-t-il souligné, et l’Eglise regardera toujours leur travail d’un œil critique. Tel est le métier des théologiens. Cette tension existera toujours". Et de préciser que le nouveau pape "était particulièrement clair dans l’énoncé de la doctrine".
D’autres escomptent un changement d’attitude intellectuelle du pape avec sa nouvelle charge. Mgr Alex Dias, de Port Blair, voit dans le nom de Benoît XVI l’annonce de cette nouvelle orientation. Selon lui, Benoît XV avait souligné, au début du siècle, que la condamnation du modernisme ne devait pas empêcher les chercheurs de se lancer sur de nouvelles voies.
D’autres théologiens, comme le jésuite T.K. John, spécialiste de la culture indienne, ont également insisté sur le changement de perspective que devrait entraîner le passage de la fonction de préfet de la Congrégation pour la doctrine de la foi au gouvernement de l’Eglise. Le pape va devoir sortir du monde intellectuel intérieur qui lui était familier pour se lancer dans le vaste monde réel. Selon ce religieux, les questions pratiques auxquelles le nouveau pape sera confronté seront surtout celles des relations avec les autres religions, de la position de l’Eglise à l’égard de la guerre, des nationalismes et de la mondialisation.