Inde : une nouvelle loi anti-conversion inquiète les chrétiens

Yogi Adithyhath et le premier ministre indien Narendra Modi
Une nouvelle loi criminalisant le passage de l’hindouisme vers une autre religion vient d’être votée dans l’Etat le plus peuplé de l’Inde, fragilisant encore un peu plus les conditions de vie de la minorité chrétienne. L’Eglise a protesté, en vain, dans une région confiée à un extrémiste religieux, et devenue le laboratoire de l’hindutva, ou retour à la religion hindoue.
Yogi Adityanath jubile. Vêtu d’une toge de couleur safran, une marque rouge sur le front, le cartilage de l’oreille fendu par une boucle d’oreille, signe de son appartenance à une guilde de maîtres yogis auxquels sont attribués des pouvoirs magiques surhumains, le sulfureux ministre en chef de l’Uttar Pradesh vient de faire adopter une nouvelle loi anti-conversion.
Dans cet Etat le plus peuplé de l’Inde qui compte 200 millions d’habitants – majoritairement hindouiste, où le christianisme représente 0,18 % de la population – la nouvelle loi, votée en force le 24 février 2021, remplace une ordonnance de novembre 2020, qui entendait interdire le passage de l’hindouisme à une autre religion.
Désormais, il est stipulé qu’aucune personne ne doit passer, « directement ou indirectement d’une religion à une autre, par l’usage de fausses déclarations, de force, de ruse indue, de séduction, ou par tout autre moyen frauduleux tel le mariage ; de plus personne ne doit encourager à une telle conversion », comme le résume le journal The Hindu, dans son édition du 24 février dernier.
Et comme si cela ne suffisait pas, ce sera à l’accusé d’apporter les preuves que la conversion dont il est jugé responsable, n’a pas été faite de force : une manière d’encourager la délation et d’obtenir plus facilement une condamnation.
Pour les contrevenants, la loi prévoit une peine maximale de dix ans de prison et une amende de 564 euros : de quoi en décourager plus d’un, sachant que le revenu mensuel moyen en Inde ne dépasse pas 200 euros…
« Il n’y avait pas besoin d’une nouvelle loi, d’autant plus que l’Etat a déjà un décret concernant le contrôle des conversions religieuses. C’est inquiétant dans la mesure où cela peut être détourné par les groupes majoritaires, au nom de conversions religieuses forcées, au détriment des groupes minoritaires », regrette Mgr Gerald John Mathias, évêque de Lucknow, la capitale de l’Uttar Pradesh.
Et le prélat d’ajouter, inquiet : « en tant qu’Eglise, nous sommes engagés dans de nombreuses activités caritatives, et notre principale préoccupation, c’est qu’on peut dénoncer n’importe quoi comme une tentative de séduction. N’importe quelle activité caritative peut être dénoncée comme une tentative de conversion. »
Même son de cloche chez Mgr Joseph Pamplany : l’évêque auxiliaire de Tellichéry et membre de la Commission pour la Doctrine de la Conférence des évêques d’Inde, dénonce cette nouvelle loi anti-conversion qui, « sous le prétexte de contrôler la conversion sur la base de compliments ou par la force, prend pour cible les minorités religieuses, en particulier les chrétiens et les musulmans ».
Autant de réactions qui font sourire Yogi Adityanath. Comme le déclare ce fervent soutien du premier ministre indien Narendra Modi, « iI n’y a qu’une seule façon de protéger la culture indienne : protéger les gau (vaches), le Gange et la déesse Gayatri. Seule la communauté qui peut protéger ce patrimoine survivra ». Une protection qui passe bien sûr par l’élimination pure et simple des minorités religieuses…
(Sources : The Hindu/Asianews/Eglises d’Asie – FSSPX.Actualités)
illustration : Prime Minister's Office (GODL-India), via Wikimedia Commons