Isaac de l’Etoile : homélie sur la Pentecôte
Isaac de l’Etoile est un auteur spirituel cistercien du XIIe siècle, mort à l’abbaye de l’Etoile, à Poitiers. Dans cette homélie, le moine médite sur l’effusion de l’Esprit Saint au jour de la Pentecôte qu’il compare à des vendanges spirituelles.
Après les moissons, sont habituellement célébrées les vendanges, et nous savons que la succession des saisons est au service des mystères célestes : car le visage de la Création, lui aussi, est éclairant pour reconnaître la face du Créateur, et les réalités spirituelles se laissent apercevoir à partir de cette créature qu'est le monde.
A la récente solennité pascale, nous avons moissonné notre pain du ciel. Récolté et battu au moment de son arrestation et de sa flagellation, ensuite finement moulu entre les Juifs et les Gentils par mille enquêtes et requêtes, « ce pain qui descend du ciel et donne la vie au monde », a été finalement cuit au feu de la Passion et au four de la Croix.
« Mangez, amis », ce pain préparé par les ennemis. Car, comme il est écrit ailleurs, « le fou deviendra esclave du sage ». Celui qui dédaigne de manger ne pourra nullement être un ami.
Aujourd'hui, mes bien-aimés, après pareille moisson, sont en quelque sorte célébrées de semblables vendanges. Car, cinquante jours après la sainte Pâque, cet Esprit Paraclet, en qui les saints, dans la tranquillité et la paix, prennent tout leur repos sabbatique loin de toute œuvre mauvaise, s'est copieusement répandu, de la plénitude de la vraie vigne dont le Père est le vigneron, dans les cœurs des disciples : leurs âmes, tels des fûts soigneusement rincés et solidement cerclés par le Fils de Dieu, il les a remplies d'un vin vigoureux et clair.
Oui, l’Esprit du Seigneur, envoyé par le Père et le Fils, « a rempli l'univers » : dans sa vigueur, revendiquant tout pour soi, mémoire, sens, volonté, il a tout saisi ensemble ; le mettant entièrement hors de soi, comme le ferait un vin généreux, il lui a enseigné sa propre « science de la parole ».
Le Saint-Esprit, qui n'est au sens propre ni vin ni eau, est appelé de ces deux noms au sens figuré : vin, parce qu'il enivre de la ferveur de la charité, eau parce qu'il refroidit l'ardeur de la convoitise.
La charité, en effet, est apprêtée comme le vin, surtout quand la Sagesse dresse sa table, apprête son vin et invite à son banquet les tout-petits. Car seule l'humilité est invitée au banquet de la Sagesse, où le pain est la Vérité, et le vin la Charité.
(FSSPX.Actualités du 09/06/19)