Italie : Pour et contre "La Passion du Christ" de Mel Gibson - 2004
Le grand rabbin de Rome, Riccardo di Segnis, s'oppose à la diffusion de La Passion du Christ et voudrait influencer le Vatican. Mais il ne fait point l'unanimité.
Dialogue, quand tu nous tient !
Selon le grand Rabbin de Rome, le film de Mel Gibson dont la sortie est prévue le 7 avril en Italie, "est une représentation qui fait obstacle au dialogue, qui évoque l’hostilité, relance l’accusation traditionnelle du déicide - le pouvoir romain s’abstient, la décision revient aux prêtres juifs -". C’est un "défi à l’Eglise, à la nouvelle sensibilité née du concile Vatican II". "S’il s’agissait de l’acte d’une seule personne, cela pourrait ne pas avoir d’importance, mais ce film devient un phénomène de masse". Pour le grand rabbin, le silence de l’Eglise risque d’être contre productive.
Interrogé par le quotidien italien Il Messagero du 11 mars, le porte-parole du Saint-Siège, Joaquin Navarro-Valls, a déclaré avec prudence qu’"il est raisonnable de penser qu’il n’y aura aucune prise de position ni de distance", de la part du Vatican. Le porte-parole a ajouté : "Jean-Paul II n’a pas fait de commentaire après avoir vu ce film, et je ne fais pas de commentaires sur l’activité privée du pape".
Pour Joaquin Navarro-Valls, "le film est la transcription cinématographique des évangiles. Si ce film était antisémite, les évangiles le seraient aussi. Il ne faut pas oublier que ce film est rempli de personnages juifs positifs : de Jésus à Marie, à Simon de Cyrène en passant par Véronique et la partie de la foule bouleversée…". "Si un récit de ce genre était antisémite, a-t-il poursuivi, cela poserait un problème dans le dialogue judéo-catholique, parce que cela reviendrait à affirmer que les évangiles ne sont pas historiques". "Il n’y a rien d’antisémite, a-t-il insisté, sinon les membres de la hiérarchie catholique l’auraient dénoncé". Il faisait allusion aux autorités de la Curie ayant déjà vu le film, ainsi qu’aux autorités ecclésiastiques catholiques des Etats-Unis.
Invitation à la synagogue
Cette polémique survient alors qu’une invitation à se rendre à la synagogue de Rome, à la fin du mois de mai 2004, a été transmise à Jean Paul II par la communauté juive. Dans le Corriere della Sera, le rabbin Di Segnis a tenu à préciser que la polémique sur le film "est un problème absolument distinct" de l’invitation à se rendre à la synagogue. Cette invitation a été adressée au pape par les deux grands rabbins d’Israël, le 16 janvier 2004, pour les célébrations du 100e anniversaire de la fondation de la synagogue. Et une lettre officielle d’invitation de la part du rabbin Di Segnis a été remise au Saint-Père au début du mois de février. - La date évoquée comme la plus probable par l’hebdomadaire Famiglia Cristiana du 14 mars, est celle du 23 mai prochain. Le président de la République italienne, Carlo Azeglio Ciampi devrait participer à cette rencontre
Les légionnaires du Christ promeuvent La Passion
De son côté, la communauté d’origine mexicaine des Légionnaires du Christ a invité les différents dicastères de la Curie à visionner le film de Mel Gibson. Plusieurs séances de projection ont été organisées afin que les prêtres, les religieux et les laïcs qui travaillent au Vatican puissent voir le film dans la salle de cinéma de l’université Regina Apostolorum, située dans la banlieue de Rome et dirigée par les Légionnaires du Christ. Mel Gibson a d’ailleurs inséré dans le générique de fin un remerciement spécial pour les jésuites et les Légionnaires du Christ.
Jim Caviezel reçu en audience privée
Jim Caviezel, l’acteur qui interprète le rôle de Jésus dans le film de Mel Gibson a été reçu en audience privée par le pape dans sa bibliothèque, le 15 mars. Il a déclaré le lendemain à un groupe de journalistes que le tournage du film avait été pour lui une "authentique expérience spirituelle". "On ne peut pas voir ce qui est représenté et rester indifférent". Encore moins, a-t-il précisé, si comme acteur, on pénètre dans le personnage pour donner le meilleur de soi-même : "Je ne veux pas que les spectateurs me voient, je veux seulement qu’ils voient Jésus".
Il a expliqué que son propre cheminement spirituel avait commencé avec le chapelet : "Le chapelet m’a conduit à la confession, la confession à la communion quotidienne, et lorsque je portais l’eucharistie dans mon corps, je sentais que j’étais davantage comme le Christ".
Jim Caviezel a également répondu aux accusations d’antisémitisme : "Si quelqu’un dit que le film est antisémite, la Bible aussi devrait être antisémite".