Itinéraires de vocations gâchées
Itinéraire d’une vocation gâchée
Depuis des années, X. sentait résonner en lui l’appel du Seigneur. Habitué de l’église versaillaise desservie par la Fraternité Saint-Pierre, il s’ouvrit de son projet à F.L., prêtre de ladite Fraternité. Bon voisinage et déférence oblige : celui-ci crut bon de présenter ce jeune candidat à l’évêque du lieu, alors Mgr Thomas, et décision fut prise d’envoyer le futur séminariste à Issy-Les-Moulineaux.
Première année se passa dans les pleurs et grincements de dents. Parce qu’ils étaient deux à réciter leur chapelet quotidien, tous deux se virent affublés par leurs “confrères” des surnoms d’ “int” et “griste” ! X. ne se découragea pas pour autant. Se le tenant pour dit, il fut plus discret l’année suivante et laissait partout entendre qu’il « regagnait les rangs ». Les choses semblaient rentrer dans l’ordre jusqu’au jour où, en ce début d’été 2002, notre jeune ami est convoqué par Mgr Aumonier, nouvel évêque de Versailles. Là, il s’entend reprocher le manque de discernement que manifeste son attitude “intégrisante”, et le verdict tombe, implacable : X ira pendant deux ans rejoindre le personnel enseignant de l’Alliance Française… en Corée du Sud !
Evêques de France, qu’avez-vous fait de vos séminaristes ? Mgr Barbarin, qu’avez-vous fait de ce diacre qu’en votre ancien diocèse de Moulins, vous jugiez trop traditionnel ? Pourquoi l’avoir arrêté aux ordres quinze jours avant la date de son ordination sacerdotale pour lui conseiller le mariage ? Mgr Bouchex, pourquoi en votre séminaire d’Avignon, Jérôme a-t-il dû abandonner sa formation avec ce terrible témoignage à la clé : « Ils m’ont fait perdre ma piété. Si je reste, je perds la foi » ?
Vraiment, il y a grande guerre et grande pitié en cette pauvre Eglise de France…
Coupes sombres dans le diocèse de Nîmes
Les tristes péripéties qui ont secoué le diocèse de Nîmes ces derniers temps nous apprennent que lorsqu’un évêque entend recadrer son clergé, tout est permis.
Depuis quinze ans qu’il exerçait son ministère de curé, l’influence de l’abbé L.G. allait grandissante. Son rayonnement spirituel certain permettait à beaucoup de trouver lumière, et le sens du sacré qu’il développait en sa belle église abbatiale redonnait le goût des choses de Dieu à bien des égarés.
Mais voilà : l’abbé L.G. portait la soutane ! Mgr Watebled jugea intolérable cette percée intégriste et se mit en guerre contre ce bastion de l’intolérance. Bientôt, les bruits les plus infamants coururent contre ce bon curé, au point d’inquiéter la justice. Nombre d’enquêtes s’ensuivirent, qui toutes innocentèrent le brave homme. Mais l’idéologue ne s’enquiert guère du réel, et Mgr Watebled accula l’abbé L.G. à démissionner. Sa cure fut confiée le 1er septembre 2001 à un administrateur qui aussitôt supprima les messes de semaine et ferma les portes de son église à la chorale sacrée pour y organiser des concerts profanes : jazz, Béart et Lama au programme ! Pendant ce temps, l’abbé L.G se retrouve sans ministère, confiné chez sa mère.
A quelques kilomètres de là, c’est un autre prêtre, J.P.B., qui vient de se voir retirer sa charge de curé. Le fait de porter l’habit religieux et qui plus est d’enseigner un catéchisme jugé trop traditionnel lui valut maintes brimades et suspicions. Finalement, en lieu et place de la désserte de ses neuf clochers désormais abandonnés, il assurera l’aumônerie auprès de quatre religieuses retirées… sans doute de saintes âmes !
Faut-il encore citer le cas de l’abbé P.V., qui s’est vu retirer tout ministère depuis deux ans, ou de ces deux prêtres plus jeunes qui, toujours dans le même diocèse, ont été poussés à rejoindre le diocèse aux armées afin de ne pas détonner avec la pastorale diocésaine ?
En tous ces cas, recours a été fait à Rome. Ce recours n’a pas été entendu, Rome demeurant sourde à cet appel.
Lorsque la persécution sévit à Poitiers
C’est avec joie qu’au lendemain de son ordination reçue en l’an 2000, C.P. se retrouve en son village natal pour y chanter une première messe. Mais, ô malheur, celle-ci n’est pas du goût de la communauté locale laïque à qui l’évêque a confié le clocher. Pensez donc : le jeune prêtre et quelques-uns de ses confrères s’y étaient présentés en soutane ! Sur le conseil des prêtres alentours tous de cols roulés habillés, recours fut fait à l’évêque, lequel interdit au jeune prêtre de venir à nouveau troubler une communauté jugée exemplaire. Laissant passer ces premières avanies, notre jeune ami pensait pouvoir se donner généreusement en son premier ministère. Bien vite il dut déchanter. Chacune de ses initiatives était aussitôt contrée par une poignée de laïcs “engagés”, qui auraient davantage trouvé leur place dans un club du troisième âge si l’évêque n’avait misé sur eux pour bâtir un diocèse à la pointe d’un monde en pleine mutation… Un an et demi se passa en ces pressions quotidiennes, puis on apprit que C.P. était parti continuer ses études à Bordeaux, son casuel versé par le diocèse étant divisé par deux. En fait d’études, C.P. se vit obliger de trouver un travail civil pour subvenir à ses besoins, le diocèse de Bordeaux n’ayant même pas été averti de cette arrivée. Qu’importe : le diocèse de Poitiers était débarrassé de ce cas encombrant. Mais il en restait d’autres !
B.G., par exemple ! âgé de 31 ans et prêtre depuis deux, il prêcha un jour sur l’existence du démon et la nécessité du combat à son encontre. La très sérieuse équipe paroissiale dont la moyenne d’âge côtoie les 67 ans en référa aussitôt à l’évêque pour lui dire son indignation. Mgr Rouet écrivit donc au jeune téméraire : « Tu quittes ta paroisse et ta mission auprès des anglais dans le diocèse. Maintenant, que faire ? Tu m’as répondu que tu ne donnais pas ta mission. Fort bien. Le Conseil épiscopal et moi-même avons cherché quelle proposition te faire dans le diocèse. En vain : nous nous heurtons à l’image que tu donnes de toi. » C’est donc au diocèse aux armées que B.G. est envoyé, sans même que celui-ci ne l’ait souhaité. Qu’importe : le diocèse de Poitiers était débarrassé d’un deuxième cas encombrant.
Faut-il encore parler de C.F. qui, pour avoir refusé de faire des absolutions collectives que rien ne légitimait, se vit également dans l’obligation de retourner sur les bancs d’université ? En tout, ce sont six prêtres qui ont ainsi quitté le diocèse depuis deux ans. Le séminaire de Poitiers ne subit pas un meilleur sort. Par exemple, N.B, après sept ans de séminaire pouvait espérer approcher de la prêtrise. N’ayant pas donné suffisamment de garanties anti-intégristes, Mgr Rouet vient de lui imposer deux ans de disponibilité pour aller travailler dans le civil. Christophe, séminariste depuis deux ans, vient de subir le même sort. Si le séminaire accueillait vingt séminaristes voici cinq ans, il n’en compte désormais plus que trois. Mais les cours n’en demeurent pas moins écoutés : ils viennent d’être ouverts à la gent féminine.
Au diocèse de Poitiers, tout va bien dans le meilleur des mondes. Sans complexe aucun, Mgr Rouet ira donner à Paris le 22 octobre prochain une conférence … sur la théologie du laïcat au concile Vatican II !