La maladie du pape, enjeu majeur de communication

Entrée de la Salle de Presse du Saint-Siège
« Je vous accompagne d’ici. » Les mots du souverain pontife sont significatifs. D’abord pour rappeler qu’il entre dans la treizième année de son pontificat. Mais aussi parce que l’auguste patient de la polyclinique Gemelli entend montrer qu’il demeure le maître du récit de sa maladie en sorte d’étouffer les intrigues de palais.
Maîtriser le « narratif » : c’est le maître mot de l’entourage du pontife argentin depuis son admission aux urgences de la polyclinique Gemelli, le 14 février 2025, pour une « infection respiratoire sévère ». Un nouvel épisode de santé, survenu après bien d’autres et une fatigue visible, qui n’a pas manqué de raviver les interrogations sur la fin de l’actuel pontificat.
Le successeur de Pierre a choisi de garder la mainmise de la communication sur sa santé, sans rien céder à une Curie romaine dont il se méfie. Il convient de rappeler qu’il existe deux principaux organes d’informations au Vatican : la Salle de presse du Saint-Siège, qui publie les comptes rendus des audiences et les actes officiels signés par le pontife romain.
Le second, Vatican News, est un portail numérique offrant un large éventail d’informations, incluant des commentaires et des analyses. Avant la réforme de 2014-2015, ces organes d’informations dépendaient de la secrétairerie d’Etat, mais ils sont désormais placés sous la houlette directe du Dicastère pour la communication, autrement dit des proches du pontife argentin.
Néanmoins, la secrétairerie d’Etat, au regard de sa place centrale, exerce une influence indirecte. Elle peut intervenir pour aligner les messages officiels avec la politique du Saint-Siège, surtout sur des sujets sensibles. Voire « reformuler » certains propos pontificaux, comme cela est déjà arrivé, lors d’interventions hasardeuses touchant l’intervention russe dans le Donbass ou le Moyen-Orient.
Dans le cadre de son hospitalisation, la communication semble avoir été prise en charge par le pontife romain et son entourage immédiat : un premier cercle qui paraît avoir opté pour une communication directe occupant le plus possible l’espace médiatique, dans le but d’éviter des récits « alternatifs » vite catalogués parmi les « fausses nouvelles », les fameuses fake news.
Depuis l’hôpital Gemelli, l’entourage du chef de l’Eglise multiplie les messages écrits, comme celui aux participants d’un colloque de l’Académie pontificale pour la vie organisé le 3 mars 2025, dans lequel il invite les participants à lutter pour la mise en place d’un multilatéralisme « doté d’autorité pour assurer le bien commun mondial » et « qui ne dépend pas de l’évolution des circonstances politiques ou de l’économie ». En clair, le message envoyé est : « Je suis toujours aux commandes. »
Afin d’occuper au maximum le terrain médiatique, des bulletins de santé quotidiens sont publiés d’après les observations des différents spécialistes. Ces bulletins, sans être de véritables bulletins médicaux, sont relativement précis. Toujours dans l’optique de couper l’herbe sous le pied à ceux qui, oltretevere, voudraient spéculer sur l’avenir et préparer l’après-François.
Alors que l’état de santé du successeur de Pierre semble se stabiliser, tout en restant complexe, les bulletins s’espacent quelque peu, et la garde rapprochée de Sainte-Marthe prend le relais : le 12 mars dernier, Salvatore Cernuzio, dans Vatican News, publie un éloge qui n’a rien de funèbre à l’occasion du douzième anniversaire de l’élection au souverain pontificat de Jorge Mario Bergoglio.
Le ton relève autant du panégyrique que de l’avertissement envers ses nombreux opposants : « François est accompagné en ce jour par les prières des fidèles des cinq continents, dans la certitude de son regard de berger qui ne cesse de se poser sur son troupeau », prévient le journaliste. Ceux qui l’ont enterré un peu tôt devraient se méfier. Prudence néanmoins : nous n’en sommes pas encore à la mi-Carême, et le temps de la résurrection n’est pas encore arrivé.
Une photo du Pape
Selon la constitution Universi Dominici gregis, « Personne n'a le droit de prendre, en utilisant quelque moyen que ce soit, des images du Souverain Pontife alité et malade ou défunt » (n° 30). Toutefois, le Saint-Siège peut décider de publier une photo du pape malade. C’est ce qu’a fait la Salle de presse sur le site Vatican News. La photo est visible sur ce lien.
(Source : Vatican News – FSSPX.Actualités)
Illustration : © Dicastero per la Comunicazione