L’avis du cardinal Martini
"Il est certain que Benoît XVI nous réservera des surprises par rapport aux stéréotypes avec lesquels il a été défini un peu trop hâtivement". C’est ce qu’a déclaré le cardinal Carlo Maria Martini, archevêque émérite de Milan - candidat du parti progressiste au conclave - dans un entretien accordé à La Repubblica du 26 avril 2005.
Pour le prélat italien, le nouveau pape réservera des surprises, "tout d’abord parce qu’il a toujours été un homme de grande humanité, courtoisie et gentillesse, prêt à l’écoute, et même sur des avis différents du sien". "Je suis sûr que le nouveau pape ne sera pas rigide mais réfléchira avec liberté de cœur et ouverture d’esprit", a-t-il ajouté.
Interrogé sur les indices décelables dans les premières interventions de Benoît XVI, le cardinal Martini répond qu’il ne "voit pas d’innovation dans son premier message, qui du reste a probablement été préparé, dans ses grandes lignes, par les bureaux compétents, vu le peu de temps dont dispose le nouveau pape". Il y voit "plutôt la reconfiguration des grandes lignes d’ouverture du pontificat de Jean-Paul II". "Et ceci est certainement un signe positif", a-t-il poursuivi.
L’archevêque émérite évoque le dialogue avec les juifs, assurant que "le cardinal Ratzinger y a été très attentif, et toujours plus ces dernières années, dialogue qu’il considère essentiel pour l’Eglise". "Je ne m’étonne pas donc de la rapidité avec laquelle il a écrit au rabbin De Segni, lui faisant part de cette volonté".
Le cardinal Martini indique également que "le nom de Benoît est un bon signe pour le nouveau pape", notamment concernant la paix. "Le défi de l’Eglise pour la paix durera tant que cette dernière sera menacée par l’égoïsme humain et les complexités de l’histoire".
L’ancien archevêque de Milan rapporte en outre son expérience au cours des dix ans où il était membre de la Congrégation pour la doctrine de la foi, présidée par le cardinal Ratzinger. Il cite les paroles que ce dernier lui avait adressées pour son 15e anniversaire d’épiscopat : "Personne ne s’étonnera si je dis que nous n’avons jamais été du même avis. De tempérament et de formation, nous sommes sans aucun doute très différents l’un de l’autre. A chaque fois, ces deux positions ne s’excluent pas tout à fait, au contraire, elles s’intègrent et se complètent. Nous permettant ainsi, à partir d’aspects divers, de se rapprocher du devoir complexe de l’Eglise en ces temps et de tenter, plus ou moins, de l’accomplir".
Le cardinal Martini poursuit : "La seconde raison de nous attendre à des surprises est justement dû au fait qu’un pasteur est toujours éduqué et formé par son peuple", ajoutant l’avoir personnellement expérimenté lors de son passage de l’enseignement à la responsabilité pastorale. "Je suis donc certain que la grande responsabilité qui pèse sur les épaules du nouveau pape le rendra simplement plus sensible à tous les problèmes qui s’agitent dans le cœur des croyants et des non-croyants, et ouvrira certainement pour lui et pour nous des voies inhabituelles".