Le cardinal Sarah récuse la nomination de laïcs à des postes dirigeants à la Curie

Source: FSSPX Actualités

Un article de Sandro Magister, vaticaniste à L’Espresso, rapporte opportunément un texte du cardinal Sarah, tiré d’un livre publié il y a un an en France et récemment en Italie qui a pour titre : « Pour l’éternité. Méditations sur la figure du prêtre ».

Le cardinal Robert Sarah, 77 ans, guinéen d’origine, a été préfet de la Congrégation pour le culte divin de 2014 à 2021. Il est aujourd’hui sans fonction, ce qui lui laisse le loisir d’écrire des livres. L’un des plus connus avait pour but de dissuader le pape François de donner le feu vert aux prêtres mariés, demande faite par le synode spécial sur l’Amazonie d’octobre 2019.

D’après Sandro Magister, plusieurs indices avaient laissé penser que François n’aurait que peu apprécié la parution de ce livre. Mais à la surprise générale, quand il a publié quelques jours plus tard le document où il tirait les conclusions du synode sur l’Amazonie, il n’a absolument pas autorisé les prêtres mariés et encore moins les femmes diacres.

Le cardinal Sarah souligne dans son dernier livre sur le sacerdoce que ce refus a été exprimé « avec des mots similaires » à ceux employés dans l'ouvrage rédigé en collaboration avec Benoît XVI. Ce nouveau livre contient une réfutation de toutes les propositions actuelles de réforme du « système clérical », du clergé marié aux femmes prêtres, en passant par le gouvernement du peuple.

Un passage fait aussi la critique de la pratique du pape François de confier des rôles dirigeants à des personnes qui ne sont pas prêtres, dans la réforme de la Curie. L’objection est ainsi formulée : « On entend parfois dire qu’il serait nécessaire de séparer l’exercice de l’autorité du ministère ordonné. On affirme ici et là que le gouvernement dans l’Eglise pourrait aussi bien être exercé par des hommes que des femmes, par des laïcs comme par des prêtres et des évêques.

« De telles affirmations sont terriblement ambigües et destructrices de la structure hiérarchique de l’Eglise, telle qu’elle a été pensée et voulue par Jésus Christ lui-même. Certes, il y a des laïcs, hommes et femmes, qui sont plus compétents en communication, en management et en stratégie de gouvernance que des prêtres.

« Il est nécessaire de leur confier les justes rôles relevant de leur compétence et de leur expertise. Cependant, au sens strict, le gouvernement de l’Eglise n’est pas d’abord une compétence mais une présence, celle du Christ serviteur et pasteur. Voilà pourquoi la fonction de gouvernement ne pourra jamais être exercée dans l’Eglise par d’autres personnes que des ministres ordonnés ».

Voilà qui a le mérite d’être clair. Cette critique a déjà été plusieurs fois exprimée dans nos articles, mais il est bon de trouver un cardinal ayant le courage de la formuler nettement.

Plus généralement, le cardinal Sarah considère l’époque actuelle comme un défi entre l’Eglise et les nouveaux pouvoirs du monde, analogue à la réforme grégorienne du début du second millénaire : « Cette réforme visait à libérer l’Eglise des griffes des autorités séculières. En interférant dans le gouvernement et dans les nominations ecclésiastiques, le pouvoir politique avait fini par causer une véritable décadence du clergé.

« Les cas de prêtres vivant en concubinage, engagés dans des activités commerciales ou dans des affaires politiques s’étaient multipliés. La réforme grégorienne se caractérisait par la volonté de redécouvrir l’Eglise de l’époque des Actes des Apôtres. Les principes d’un tel mouvement ne se basaient pas d’abord sur des réformes institutionnelles, mais sur le renouveau de la sainteté des prêtres.

« N’y a-t-il pas besoin aujourd’hui d’une réforme semblable à celle-là ? De fait, le pouvoir séculier a repris pied dans l’Eglise. Cette fois, il ne s’agit pas d’un pouvoir politique, mais culturel. On assiste à une nouvelle lutte entre sacerdoce et empire. Mais l’empire est désormais la culture relativiste, hédoniste et consumériste qui s’infiltre partout. C’est le moment de la rejeter, parce qu’elle est inconciliable avec l’Evangile. »