Le cardinal Zen à temps et à contretemps

Source: FSSPX Actualités

« Prions pour que notre pape ait davantage de sagesse, j’espère qu’il changera de ligne sur le synode. » A quatre-vingt-un an, le cardinal Joseph Zen n’a rien perdu de son franc-parler. Surtout lorsqu’il s’agit d’évoquer l’actuel pontificat.

Ayant fait le déplacement depuis Hong Kong afin d’assister aux funérailles de l’ancien pape Benoît XVI, le haut prélat chinois en a profité pour accorder un entretien exclusif à Il Giornale, publié le 17 janvier 2023.

S’il est officiellement à la retraite depuis plusieurs années, l’évêque émérite de l’ancienne concession britannique n’en reste pas moins une figure emblématique et militante des libertés de l’Eglise à Hong Kong, toujours plus menacées depuis l’accession au pouvoir du président Xi Jinping.

Le cardinal, qui a été condamné récemment à une amende symbolique au terme d’un procès politique, s’occupe désormais de visiter les détenus en prison : « j’ai baptisé plusieurs prisonniers au cours des dix dernières années », confie-t-il.

Bien qu’il n’ait pas encore lu les mémoires de Mgr Georg Gänswein, à l’origine d’une polémique oltretevere, Mgr Zen se dit « d’accord sur le thème de la messe en latin » avec l’ancien secrétaire de Benoît XVI : « Les approximations et les généralisations hâtives de Traditionis Custodes ont blessé de nombreux fidèles. (…) N’aurait-on pas pu attendre la mort de l’ancien pape plutôt que de l’humilier ainsi ? », interroge-t-il.

La question du synode des évêques tient à cœur au haut prélat chinois : « Nous sommes très préoccupés par ce qui pourrait arriver au Synode des évêques. Et je crains que le synode ne répète la même erreur que l’Eglise néerlandaise d’il y a 50 ans, lorsque les évêques ont reculé et ont accepté que les fidèles dirigent l’Eglise ; puis leur nombre a diminué. Prions pour que notre pape ait plus de sagesse », soupire le cardinal.

S’il égratigne volontiers le pape François, sa relation avec le souverain pontife reste respectueuse : après les funérailles de Benoît XVI, le pontife romain a reçu Mgr Zen, qui évoque « une rencontre très chaleureuse » remerciant le pape pour « le bon évêque nommé à Hong Kong », explique-t-il. « Je le sais bien, c’est un jésuite », a répondu avec humour le pontife argentin.

Quant à la situation des catholiques de Chine, elle reste la priorité numéro un du cardinal hongkongais connu pour son opposition à l’accord provisoire signé en 2018 entre le Saint-Siège et Pékin, sur la nomination des évêques dans l’empire du Milieu.

Un accord que Rome a passé pour résorber un schisme vieux de près de soixante-dix ans, mais dans lequel le haut prélat voit une « trahison » qui n’a pas facilité la vie des fidèles : « C’est une situation complexe, il ne faut jamais oublier de prier en ces temps troubles », rappelle le cardinal Zen.

Et de conclure : « Beaucoup de fidèles (chinois) témoignent de leur foi avec conscience mais nous savons que lorsque la situation devient difficile, certains ne pensent qu’à leur propre intérêt. Nous continuons à soutenir la vérité, la justice et la charité. Les ténèbres ne sauraient l’emporter sur la lumière. »

D’ici quelques jours, la Chine rentrera dans « l’année du lapin d’eau » selon son calendrier astrologique traditionnel : un signe considéré de bon augure, lié à la vigilance, à la prudence et à l’agilité d’esprit. Autant de vertus dont les catholiques de Hong Kong auront besoin en 2023, afin d’échapper à l’étreinte brûlante du dragon rouge pékinois…