Le Centre national de Pastorale liturgique
Le premier numéro de La Maison-Dieu et la plaque du Centre de Pastorale Liturgique
Le 20 mai 1943, dans les locaux des éditions du Cerf (appartenant aux dominicains), est fondé par les pères Pie Duployé et Aimon-Marie Roguet (eux-mêmes dominicains) le Centre de Pastorale liturgique (CPL). Dom Lambert Beauduin participe à la réunion de fondation.
Au début de 1945 commence à paraître la revue trimestrielle La Maison-Dieu, qui sera l’organe du CPL. Le premier article de la revue est signé par Dom Lambert Beauduin.
Un groupe militant
Le CPL est, à ce moment, un groupe de militants qui se reconnaissent dans les grandes orientations du Mouvement (de pastorale) liturgique lancé notamment par Dom Beauduin. Cette notion centrale de « pastorale liturgique » (et pas simplement de « liturgie ») avait été rendue manifeste dès le premier congrès de janvier 1944, dont le titre est « Études de pastorale liturgique » : le volume des Actes est d’ailleurs dédié à Dom Lambert Beauduin.
Ce choix de la « pastorale liturgique » sera déterminant pour l’avenir : comme l’écrit l’historien et sociologue Guillaume Cuchet, « le Centre de pastorale liturgique fut un des lieux où s’est préparée la réforme liturgique conciliaire » (Comment notre monde a cessé d’être chrétien, Seuil, 2018, p. 252). Un rapport de l’abbé Aimé-Georges Martimort au CPL, daté de 1945, détaille d’ailleurs déjà ce que seront les grandes innovations du concile Vatican II en matière de liturgie. Et les figures centrales du CPL (citons encore Louis Bouyer, Pierre Jounel, Pierre-Marie Gy, Joseph Gélineau, Bernard Botte, Joseph Lécuyer, etc.) seront de grandes voix au cours du Concile et dans sa mise en œuvre. « Les fondateurs du CPL avaient identifié les conditions institutionnelles d’un aggiornamento qui dépassait la seule liturgie », note à ce propos le père Patrick Prétot, directeur de La Maison-Dieu (La Croix, 22 mai 2013).
La préparation de l’aggiornamento liturgique
Le CPL organise trois types d’activités. D’abord, des journées d’étude, véritable lieu d’échanges où chercheurs, théologiens, savants et pasteurs mettent en commun leurs préoccupations, leurs interrogations et leurs tendances afin d’élaborer une doctrine et une méthode d’action. Pour conserver à ces journées un caractère à la fois scientifique et pastoral, les participants sont invités en fonction de leurs compétences.
Immédiatement à la suite des journées, est proposée une session ouverte au plus grand nombre, pendant laquelle les spécialistes distillent sous forme d’enseignements magistraux les résultats de leurs études et des échanges menés au cours des journées d’étude. Ces sessions rassemblent de quatre à cinq cents participants.
Enfin, en 1947, en 1957 et en 1962, a lieu un congrès qui rassemble plusieurs milliers de participants. Ils attirent l’attention de l’opinion sur les principales acquisitions du Mouvement (de pastorale) liturgique et assurent sa publicité.
Ces activités sont relayées par des articles de revue, des livres, des expositions, des affiches, des disques, etc. et aboutissent à une réalisation concrète dans un grand nombre de paroisses.
La formation d’animateurs liturgiques
Le CPL contribue aussi en 1956 à la fondation, au sein de l’Institut Catholique de Paris, de l’Institut Supérieur de Liturgie de Paris (ISLP). Selon sa propre définition actuelle, l’ISLP « forme des responsables d’enseignement, de recherche et de pastorale dans le domaine de la liturgie et de la théologie des sacrements ; il les rend plus aptes à long terme à la préparation des célébrations, grâce à la maîtrise des éléments historiques, anthropologiques, théologiques et liturgiques qui entrent en jeu ; il est ouvert aux clercs, aux laïcs, aux religieux et religieuses, qui se préparent à exercer des responsabilités d’enseignement, de recherche et de pratique dans le domaine de la liturgie et de la théologie des sacrements ». Autrement dit, il forme et diplôme des « liturges » aussi bien que des historiens de la liturgie.
C’est ainsi que « le CPL devient véritablement ce qu’il a voulu être dès sa fondation, un centre d’unité et de ralliement où, peu à peu, s’instaure une nouvelle manière d’envisager la réflexion sur les questions pastorales et liturgiques » (Benoît-Marie Solaberrieta, Les experts du Centre de Pastorale Liturgique, Presses universitaires de Rennes, 2016, p. 16).
En 1965, le CPL est érigé en Secrétariat de l’épiscopat français, sous la responsabilité de la Commission épiscopale de liturgie et de pastorale sacramentelle : il prend alors le nom de Centre national de Pastorale liturgique (CNPL), et l’abbé Jacques Cellier (1922-1999), issu du diocèse de Lyon, en est nommé le premier directeur (jusqu’en 1973, soit pendant la période majeure de la Réforme liturgique).
Le CNPL est rebaptisé Service national de Pastorale liturgique et sacramentelle (SNPLS) en 2007, apparemment pour harmoniser son intitulé avec celui de la Commission épiscopale qui le chapeaute.
Le CPL puis CNPL a préparé, contribué à réaliser et à mettre en œuvre, accompagné enfin la grande mutation liturgique dont la charte est la Constitution Sacrosanctum Concilium sur la liturgie (4 décembre 1963).
Quelques années après Vatican II, le père Maurice Lelong, lui-même dominicain comme les fondateurs du CPL, mais fortement rebelle à l’air du temps, décrivait ainsi le but du CNPL : « Changer tout ce qu’on peut changer et, en priorité, l’immuable » (Lexicon de l’Église nouvelle, Robert Morel éditeur, 1971). Il traduisait ironiquement son sigle en « Centre National de Pagaille liturgique » ou encore « Centre National de la Profanation liturgique ». Ces deux interprétations, malheureusement, sont assez vraies.
(Source : FSSPX - FSSPX.Actualités - 15/02/2020)