Le dialogue avec les orthodoxes
Le 12 novembre, Benoît XVI recevait les évêques bulgares en visite "ad limina". Après avoir remarqué combien les évêques catholiques étaient proches de leurs "frères de l’Eglise orthodoxe bulgare", le pape a souhaité que les bonnes relations existantes se développent encore dans le futur. Pour cela, a-t-il précisé, il convient de poursuivre le chemin entrepris, en intensifiant la prière, "pour qu’arrive rapidement l’heure où nous pourrons nous asseoir ensemble à l’unique table et partager l’unique pain du salut". Le pape a ensuite demandé aux prélats de porter au patriarche orthodoxe Maxime ses salutations cordiales, rappelant l’accueil fraternel qu’il avait réservé à Jean Paul II lors de son voyage en Bulgarie, du 23 au 26 mai 2002.
Se félicitant du dialogue de l’Eglise catholique bulgare avec les autorités civiles locales, le souverain pontife a ensuite souligné la nécessité que soient bien envisagés les problèmes à affronter ensemble et les chemins à parcourir "pour le bien supérieur du peuple bulgare tout entier". Formée de diverses composantes culturelles et religieuses, la Bulgarie peut devenir "un sage exemple d’intégration, de collaboration et de cohabitation pacifique", a encore affirmé le pape, avant de préciser que la communauté catholique, même minoritaire, peut porter un témoignage généreux de la charité universelle du Christ.
"Après la triste période de l’oppression communiste, a aussi déclaré Benoît XVI, les catholiques qui ont persévéré avec une fidélité zélée dans leur adhésion au Christ sentent maintenant l’urgence de consolider leur propre foi et de répandre l’Evangile dans tous les domaines sociaux, spécialement ceux où le besoin de l’annonce chrétienne est plus manifeste". Le pape a alors cité en exemple la forte dénatalité, le fort pourcentage d’avortements, la fragilité de tant de familles, le problème de l’immigration.
Le pape a souligné l’engagement de l’Eglise bulgare dans le domaine social, dans l’aide aux pauvres et a invité les évêques à ne pas avoir peur de proposer aux jeunes générations l’idéal de la consécration totale au Christ. Déjà, recevant au Vatican le président de la République de Bulgarie, Georgi Parvanov, le 23 mai dernier, Benoît XVI avait encouragé son pays à poursuivre avec confiance la mission politique et sociale d’être "un pont entre l’Occident et l’Orient".
Les catholiques bulgares représentent moins de 1 % des 8 millions d’habitants du pays. Les orthodoxes sont largement majoritaires (87 %), suivis par les musulmans (9 %). La communauté catholique comprend 3 diocèses, dont un de rite oriental et deux autres de rite latin.
Par ailleurs, Benoît XVI a invité l’archevêque orthodoxe d’Athènes et de toute la Grèce, Christodoulos, à venir lui rendre visite à Rome. Cette invitation a été adressée par le truchement d’un message envoyé au cardinal Jean-Louis Tauran, archiviste et bibliothécaire du Vatican, à l’occasion de la publication d’un ouvrage réalisé conjointement par le Vatican et l’Eglise orthodoxe de Grèce.
Le pape a ainsi chargé le cardinal Tauran "de faire savoir à Sa Béatitude Christodoulos la joie qui serait la (sienne) de l’accueillir à Rome, afin de signifier ensemble qu’une nouvelle étape est franchie sur ce chemin de réconciliation et de coopération". Le pape souhaite "aider avec plus de force les nations européennes à réaffirmer leurs racines chrétiennes, afin d’en retrouver la sève nourricière et féconde, pour leur propre avenir, pour le bien des personnes et de la société tout entière".
Ce message est adressé au cardinal Tauran à l’occasion de la présentation, à Athènes, du fac-similé du manuscrit du Ménologe de Basile II. L’ouvrage original, conservé à la Bibliothèque vaticane, est un recueil contenant des vies de saints (martyrologe en latin, ménologe en grec), réalisé entre 979 et 989. Il est pourvu de magnifiques enluminures.
Benoît XVI a souligné avoir "pris connaissance avec intérêt de la collaboration instaurée entre la Bibliothèque apostolique vaticane et l’Eglise orthodoxe de Grèce" pour la publication de ce fac-similé, remerciant le cardinal Jean-Louis Tauran d’avoir "veillé au bon déroulement des différentes étapes de ce projet". Le pape a estimé que "cet événement important" était le "fruit des relations nouvelles qui se sont tissées après la visite inoubliable" de Jean-Paul II à Athènes, en mai 2001. Il s’est réjoui "vivement de constater qu’une coopération plus active se développe toujours davantage entre l’Eglise catholique et l’Eglise orthodoxe de Grèce".
Le voyage de Jean-Paul II, dans le cadre de son pèlerinage jubilaire sur les pas de l’Apôtre saint Paul, avait été l’occasion pour Rome et Athènes de se rapprocher. Le pape polonais avait alors officiellement demandé pardon aux orthodoxes pour le Sac de Constantinople par les croisés, en 1204. Depuis mai 1999, date du premier voyage d’un pape en terre orthodoxe - la Roumanie -, les relations entre Rome et une partie des Eglises orthodoxes autocéphales s’améliorent, mais, les orthodoxes grecs les plus durs reprochent toujours à l’Eglise catholique les "tendances impériales" du pape vis-à-vis des autres chrétiens ainsi que la "stratégie" du Vatican par laquelle il s’infiltrerait dans les régions orthodoxes à travers les Eglises catholiques de rite oriental.
Depuis la visite de Jean-Paul II dans le pays, un échange de visites s’est instauré. Ainsi, en mars 2002, une délégation orthodoxe s’était rendue au Vatican, suivie un an plus tard, en février 2003, par la visite d’une délégation du Saint-Siège à Athènes. Enfin, du 15 au 20 septembre 2003, une délégation de l’Eglise orthodoxe de Grèce était venue à nouveau en visite au Vatican. Mais en novembre 2004, l’archevêque Christodoulos avait été empêché de se rendre à Rome à l’invitation de Jean Paul II par le Saint Synode, organe collégial dirigeant de l’Eglise orthodoxe grecque.