Le pape François prépare-t-il sa démission ?

Source: FSSPX Actualités

Le pape François avec les “City Angels”

L’agence suisse cath.ch du 28 juin se fait l’écho des rumeurs qui se sont multipliées à propos d’une éventuelle démission du pape. La santé du souverain pontife âgé de 85 ans, obligé de se déplacer en fauteuil roulant ou avec l’aide d’une canne orthopédique, a contribué à alimenter ces rumeurs, et quelques faits intervenus en ce début de l’été les intensifient.

Le pape a annoncé la création de nouveaux cardinaux lors d’un consistoire, le 27 août, qui sera immédiatement suivi d’une réunion des cardinaux du monde entier. Officiellement cette réunion a pour but d’examiner la récente réforme de la Curie romaine, mais elle est aussi une occasion pour les cardinaux d’apprendre à se connaître, surtout au cas où ils auraient à participer à un conclave.

Ce qui fait dire à certains vaticanistes que François serait en train de façonner une assemblée élective en phase avec la diversité de l’Eglise universelle, mais aussi avec sa propre vision de l’Eglise.

En outre, une annonce du Vatican, début juin, a relancé les spéculations : alors que tous les cardinaux seront à Rome, le pape fera un pèlerinage d’une journée à la cathédrale de L’Aquila, dans les Abruzzes, où le pape Célestin V est enterré, lui qui a été le premier pape de l’histoire à avoir renoncé à sa charge.

Face à ces rumeurs, le pape a tenu à faire savoir mi-juin à quelques évêques brésiliens en visite ad limina, et le 2 juillet au vaticaniste Philip Pullella – repris en partie par l’agence Reuters le 4 juillet – qu’une démission n’était pas à l’ordre du jour « pour le moment », en insistant : « non, pour le moment, non. Vraiment ! ».

Il a toutefois affirmé qu’il pourrait renoncer le jour où sa santé défaillante le rendrait incapable de diriger l’Eglise. Sans pouvoir évoquer une date : « Nous ne savons pas. Dieu le dira. »

François a reconnu avoir subi « une petite fracture » au genou en faisant un faux pas alors qu’un des ligaments était déjà enflammé, mais il a assuré à Philip Pullella : « Je vais doucement mieux », déclarant que sa fracture se ressoudait, aidée par une thérapie au laser et la magnétothérapie.

Il a également confié qu’il ne souhaitait pas être opéré du genou car l’anesthésie générale pratiquée l’an passé [lors de son opération au colon] avait eu des effets secondaires négatifs.

Une démission peu probable

D’ailleurs pour Colleen Dulle, journaliste au magazine jésuite America, citée par cath.ch du 28 juin, il y a de sérieuses raisons de douter d’une prochaine démission du pape.

La vaticaniste relève d’abord une explication simple quant à la date inhabituelle du consistoire, qui devait avoir lieu en novembre : le pape pourrait chercher à ce que les cardinaux économisent de l’argent et limitent le temps passé hors de leurs diocèses en combinant le consistoire et la réunion en un seul voyage.

De plus, il y a son propre calendrier : malgré son infirmité, François a prévu de se rendre au Kazakhstan en septembre et, selon les rumeurs, d’autres voyages sont prévus pour 2023. Bien que les papes puissent transmettre des voyages à leurs successeurs, il paraît improbable que le pontife argentin n’ait pas l’intention de s’y rendre lui-même

Enfin, il faut tenir compte du fait que le pape émérite Benoît XVI est toujours en vie. François voudra probablement apporter quelques changements au statut de « pape retraité », une fois qu’il sera lui-même dans cette position – comme celui d’adopter le titre d’“évêque émérite de Rome” plutôt que celui de “pape émérite”.

Il ne porterait en outre pas de blanc – afin de dissiper l’idée qu’il y a deux papes. Mais il est difficile d’imaginer que François prenne de telles mesures alors que Benoît XVI reste pape émérite. D’autres observateurs ont également noté le danger de « confusion » et « l’incongruité » que représenterait la présence de trois papes à Rome.

Malgré tout, Colleen Dulle n’écarte pas totalement la possibilité d’une démission si « son état de santé se dégrade fortement ». La journaliste considère que le pontife n’abandonnerait sa fonction que dans la mesure où ses facultés mentales seraient fortement diminuées. Si une renonciation imminente est donc peu plausible, il n’est cependant pas irréaliste que François prépare le terrain pour un tel développement à moyen terme.

« Il sait qu’il ne vivra pas éternellement et travaille dur pour assurer son héritage par le biais de la réforme de la Curie, du processus synodal global (qui doit se terminer en 2023) et de ses nominations au Collège des cardinaux. »

Sauf en cas de diminution de ses facultés mentales

C’est précisément la question de l’état de santé mentale du pape que le blogue argentin Caminante Wanderer du 14 juin n’hésite pas à évoquer, repris par le vaticaniste Aldo Maria Valli le 17 juin.

Selon lui, l’entretien du pape avec les directeurs des revues jésuites d’Europe, le 22 mai, publié dans La Civiltà cattolica, montrerait que « les plus gros problèmes du souverain pontife ne sont pas son mauvais genou ou ses diverticules intestinaux, mais quelque chose de beaucoup plus grave qui affecte l’équilibre de son jugement ».

Ce compatriote du pape voit dans cet entretien « les symptômes d’une personnalité dissociée. Le pape parle d’évêques venant d’Europe ou d’Amérique, comme si ce n’était pas lui qui les avait fait venir, comme s’il n’était pas lui-même le responsable direct de ces nominations épiscopales. Nous lisons, par exemple, ce paragraphe : “Un évêque argentin m’a dit qu’on lui avait demandé d’administrer un diocèse qui était tombé entre les mains de ces restaurateurs”.

« Il fait clairement référence au diocèse de San Rafael, le seul à avoir un administrateur apostolique [Mgr Carlos María Domínguez. NDLR] et des prêtres et fidèles au profil restaurateur. Mais François dit qu’on “avait demandé” à cet évêque. Qui lui a demandé ? Lui-même, puisque personne d’autre que le pape de Rome ne peut nommer des évêques ou des administrateurs apostoliques, et à plus forte raison dans le cas de l’Argentine, à laquelle est réservée une gestion en exclusivité. »

Toujours selon Caminante Wanderer, « c’est le même trouble psychopathique qui amène François à s’empêtrer dans un éloge du père Pedro Arrupe, s.j., avec des allusions fleuries à Paul VI, sans se rendre compte (ou peut-être si) qu’en agissant ainsi, il ne fait que salir la mémoire de Jean-Paul II, qui en 1981 a révoqué Arrupe comme supérieur général de la Société, à cause de la dérive non seulement progressiste mais aussi athéiste à laquelle le “prophète” admiré de Bergoglio l’avait conduite. »

Une idée obsessionnelle

Mais peut-on, à partir de ces propos, parler vraiment de « personnalité dissociée » ? Le blogueur argentin lui-même reconnaît que son diagnostic est celui d’un « amateur », et non d’un spécialiste. Cependant il voit dans le discours obsessionnel du pape, une occasion paradoxalement favorable pour une future restauration.

Selon lui, « plus François parle de Vatican II et plus il insiste sur ce sujet, plus cet événement tellement désastreux sera pris en grippe, car il sera associé à lui et au devenir pathétique de son pontificat.

« C’est pourquoi il vaut peut-être mieux être encore patient et prier Dieu de garder le Serviteur de ses serviteurs sur terre encore un peu, pour qu’avec ses maladresses il finisse de déconsidérer tout ce qui doit l’être et que son successeur soit facilité dans la tâche de tout remettre sur les rails et de “restaurer” l’Eglise dans son vrai visage, bien défiguré. » – C’est ce que les politiques et les sociologues appellent un effet de balancier.

Moins politique et plus réaliste, le vaticaniste Sandro Magister note sur son blogue du 20 juin : « Dans ce pontificat sur le déclin, la confusion est totale, d’autant plus que François concentre tous les pouvoirs entre ses mains, comme s’il était mû par une anxiété irrépressible de faire lui-même, tout seul, ce que “l’institution” incapable ne fait pas. »

Et de révéler : « Le pape a confié à un prêtre argentin de ses amis, rencontré à Sainte-Marthe ces derniers jours, qu’il était en train de lire le dernier livre [posthume] du cardinal jésuite Carlo Maria Martini [1927-2012], Dernières conversations : Sur Dieu, l’Eglise, le pape, l’éthique et la foi [Bayard, 2013], et qu’il en approuvait pleinement la thèse : “L’Eglise est restée 200 ans en arrière”.

« L’obsession du pape François, c’est de combler lui-même, pendant les quelques années de son pontificat, ces deux siècles de retard de l’Eglise. Avec des conséquences qui s’étalent sous les yeux de tous. » – Cette idée fixe chez le pape François est aisément constatable et difficilement contestable.