Le pape Léon XIV change le chancelier de l’Institut Jean-Paul II

Le cardinal Baldassare Reina
En acceptant la renonciation du progressiste Vincenzo Paglia au poste de chancelier de l’Institut Jean-Paul II pour le mariage et la famille, et en nommant à sa place le cardinal Baldassare Reina, le pape Léon XIV réalise une première nomination dont on peut espérer qu’elle va dans le sens d’un pontificat apaisé.
La question se pose sur la signification de cette nomination. Quoi qu’il en soit, le pape Léon XIV n’aura pas beaucoup attendu pour nommer un nouveau chancelier à l’Institut Jean-Paul II pour le mariage et la famille : à peine un mois après avoir atteint l’âge fatidique des 80 ans, Mgr Vincenzo Paglia, est déjà remplacé.
Il faut dire que le prélat n’a pas contribué à une gestion apaisée de l’Institut Jean-Paul II qu’il vient de quitter, et de l’Académie pontificale pour la vie qu’il préside encore. En effet, Mgr Paglia s’est le plus souvent signalé par des prises de positions hétérodoxes en matière de morale, à des années-lumière de l’enseignement traditionnel de l’Eglise.
Citons l’exploit artistique de celui qui n’était encore qu’évêque de Terni, qui avait fait réaliser dans sa cathédrale une fresque « homo-érotique », où il était représenté étreignant un homme à demi nu. En temps normal, cette prouesse aurait dû lui barrer la route du Vatican, mais la normalité semble avoir fait une pause, oltretevere.
En 2016, Mgr Paglia est nommé à la tête l’Académie pontificale pour la vie et de l’Institut Jean-Paul II pour la famille ; il écarte rapidement les membres de ces organes jugés trop conservateurs. En 2019, le prélat s’oppose publiquement à l’épiscopat suisse qui demandait aux prêtres de ne pas assister les patients ayant opté pour le suicide assisté. Une position perçue comme une ouverture vers cette pratique.
Le 9 avril 2023, lors d’un discours au Festival international du journalisme à Pérouse, Mgr Paglia déclare que, quoiqu’il soit personnellement opposé au suicide assisté, une « médiation juridique » pourrait être envisagée pour constituer « le plus grand bien commun possible » dans certains contextes.
Ces propos, rapportés par Il Riformista, suscitent une nouvelle controverse. Au point que l’Académie pontificale pour la vie se sent obliger de rétropédaler, en prétendant que son président ne faisait que réaffirmer l’opposition de l’Eglise à l’euthanasie, tout en explorant des cadres légaux pour éviter des dérives pires.
Le prélat n’est pas plus clair sur la question de l’avortement : le 26 août 2022, lors d’un entretien sur RaiTre, il qualifie la loi italienne 194 promulguée en 1978 qui dépénalise l’avortement, de « pilier de notre vie sociale ». Ces propos provoquent une vive polémique au sein de l’Eglise, entraînant là encore une clarification de l’Académie pour la vie.
La pensée du prélat est tout aussi brumeuse sur les questions dites « d’orientation sexuelle » : le juin 2021, Mgr Paglia critique la position de la secrétairerie d’Etat contre le projet de loi italien Zan, visant à lutter contre l’homophobie. Le prélat italien qualifie la note verbale du Saint-Siège d’« erreur ». Face aux critiques, il recule le 24 juin dans Il Giornale, affirmant que ses propos ont été déformés.
Ainsi, à part la frange progressiste, personne ne regrettera Mgr Paglia. Il est remplacé par le cardinal Baldassare Reina, actuel Vicaire de Rome. Le haut prélat sicilien semble être une personnalité plus classique : il a marqué son soutien au caractère sacré de la vie, de la conception à la mort, et est accusé par les groupes LGBT d’avoir favorisé la pratique de la thérapie de conversion.
La nomination du cardinal Reina rendue publique le 19 mai 2025 par la Salle de presse du Saint-Siège, si elle se justifie par la limite d’âge atteinte par Mgr Paglia et le fait qu’il serait plus cohérent de regrouper sous une même tête le vicariat de Rome et l’Institut Jean-Paul II, pourrait être vue comme un recentrage de ce nouveau pontificat.
Un entretien avec la revue America
Le 5 mai 2025, pendant la période de pré-conclave, le cardinal Reina a donné un entretien à la revue jésuite America. Il répond à des questions sur le pontificat du pape François et sur le profil du futur pape, qui n’était pas élu alors. Il loue hautement le pape récemment défunt. Il explique qu’il « a eu le courage d’entamer de nombreux processus au sein d’une Eglise qui avait besoin de réformes ».
Il cite la synodalité, le rôle des femmes, la formation des séminaristes, la réforme de la curie, les situations “irrégulières”. « Tous ces processus sont ouverts. (…) C’est maintenant à nous de recevoir cet héritage et d’accompagner les processus qu’il a mis en marche, de les accompagner et de les organiser. »
A une question sur l’accusation de confusion sous le pontificat de François le cardinal répond : « Je ne vois absolument pas cette confusion. Le pape François a toujours été en accord avec la doctrine, avec le magistère, avec la tradition de l’Eglise. (…) Je ne suis pas du tout d’accord avec l’idée d’une papauté qui a semé le désordre. Beaucoup ont reconnu l’Evangile dans le pape François. »
Il ajoute : « Je crois que le pape François a été un grand interprète de Vatican II. (…) Le dialogue avec le monde est l’une des tâches urgentes de l’Eglise aujourd'hui. Celui qui succédera à François devra reprendre l’héritage de Vatican II et du pape François et s’engager sans crainte dans le monde. Il y a douze ans, l’Esprit a suscité le pape François, un grand prophète. »
Et à la question s’il prévoit un retour en arrière, il réplique : « J’espère que non. Le pape François l’a dit : la synodalité est un style à acquérir. Je pense que ce style doit absolument être renforcé. Je suis convaincu que l’Esprit continuera à chercher et à trouver quelqu’un avec le même esprit prophétique, qui poursuivra le processus de réforme engagé par le pape François. »
Il semble que le nouveau chancelier de l’Institut Jean-Paul II ait des idées clairement « franciscaines », ce qui risque de poser rapidement des difficultés quant à la rectitude doctrinale.
(Sources : Salle de presse du Saint-Siège/Vatican News/College of Cardinals/America – FSSPX.Actualités)
Illustration : © Vatican Média