Le Vatican condamne bien une formule erronée du baptême, mais argumente mal
Le Saint-Siège, par l’intermédiaire de la Congrégation pour la doctrine de la foi, rappelle que le baptême conféré avec des formules modifiées de façon « délibérée », demeure invalide, aucun ministre n’ayant « l’autorité de disposer à son gré de la formule sacramentelle ».
Triste conséquence de la révolution liturgique à l’œuvre dans l’Eglise depuis plus d’un demi-siècle : la forme du sacrement du baptême est parfois modifiée, au nom d’un zèle pastoral de mauvais aloi. Ce n’est que la conséquence d’une créativité tous azimuts qui altère l’intégrité des sacrements de l’Eglise.
Le 6 août 2020 a été publiée par la Salle de presse du Saint-Siège une Note doctrinale (Responsum) de la Congrégation pour la doctrine de la foi tentant de reprendre en main la situation : « Au cours de récentes célébrations, le sacrement du Baptême a été administré avec les paroles suivantes : "Au nom du papa et de la maman, du parrain et de la marraine, des grands-parents, des membres de la famille, des amis, au nom de la communauté, nous te baptisons au nom du Père et du Fils et du Saint-Esprit" ».
Cette formule personnalisée, explique la Congrégation, rend le baptême invalide et entraîne l’obligation de réitérer le sacrement dans sa forme absolue, dans le strict respect des rites liturgiques approuvés par l’Eglise.
La décision, approuvée par le pape François au cours d’une audience le 8 juin dernier, constituerait une heureuse mise au point si elle ne comportait pas un paradoxe et ne s’appuyait pas sur des raisons théologiques déficientes.
Le paradoxe : pourquoi condamner le résultat d’un souci pastoral partout encouragé ?
La Note signale que la modification de la formule sacramentelle est délibérée et a été introduite apparemment « pour souligner la valeur communautaire du Baptême, exprimer la participation de la famille et des personnes présentes, et éviter l’idée d’une concentration du pouvoir sacré dans le prêtre, au détriment des parents et de la communauté, ce que véhiculerait la formule du Rituel romain ».
Les auteurs de cette modification ne sont-ils pas en phase avec l’esprit du Concile et de ses réformes liturgiques ? Ces dernières n’ont-elles pas toutes insisté sur la place de la communauté, au point que désormais beaucoup de Baptêmes sont célébrés au cours de la messe dominicale ? Le pouvoir sacré du prêtre n’est-il pas systématiquement relativisé voire nié depuis cinquante ans ? Soit qu’il est dénoncé au nom d’un cléricalisme brandi tel un épouvantail, soit qu’il est battu en brèche par toutes sortes de revendications, comme c’est le cas en Allemagne avec le Chemin synodal ?
En fait, les auteurs de ces modifications qui attentent à la validité du sacrement sont allés trop loin. Mais ils n’ont pas inventé les principes qui les guident. La Note a beau jeu de dénoncer les « motivations douteuses de nature pastorale » qui font « ressurgir ici la vieille tentation de remplacer la formule traditionnelle par d’autres textes jugés plus adaptés ».
Une rigueur qu’il serait utile d’appliquer aux innovations contenues dans le Novus Ordo Missae, et à laquelle fait écho la conclusion du Bref examen critique de la nouvelle messe présentée le 5 juin 1969 par les cardinaux Ottaviani et Bacci : « L’abandon d’une tradition liturgique qui fut pendant quatre siècles le signe et le gage de l’unité de culte, son remplacement par une autre liturgie qui ne pourra être qu'une cause de division par les licences innombrables qu’elle autorise implicitement, par les insinuations qu’elle favorise et par ses atteintes manifestes à la pureté de la foi : voilà qui apparaît, pour parler en termes modérés, comme une incalculable erreur ».
Les étranges explications théologiques
Si la Note de la Congrégation pour la doctrine de la foi évoque avec raison l’autorité de saint Thomas d’Aquin et les décisions du concile de Trente, elle s’égare en usant d’un langage amphigourique bien éloigné de la simplicité des catéchismes d’antan ou de la clarté du magistère traditionnel.
Ainsi le prêtre voit-il son rôle de ministre du Christ altéré pour devenir “un signe-présence” du Christ qui célèbre comme tête du corps qu’est l’assemblée qui agit aussi de façon ministérielle (?) : « le sujet est l’Eglise-Corps du Christ avec sa Tête, qui se manifeste dans l’assemblée concrète réunie. Cette assemblée, cependant, agit de façon ministérielle − et non collégiale − car aucun groupe ne peut se faire Eglise par lui-même, mais elle devient Eglise en vertu d’un appel qui ne peut surgir de l’intérieur de l’assemblée elle-même.
« Le ministre est donc un signe-présence de Celui qui rassemble et, en même temps, le lieu de communion de toute assemblée liturgique avec toute l’Eglise ». Un prêtre qui baptise en dehors d’une assemblée est-il encore suffisamment “signe-présence” ? Le prêtre agit-il comme ministre du Christ ou le ministre est-il l’assemblée en laquelle le Christ célèbre par son ministre signe-présence ?
Et si l’on revenait à la pure Tradition de l’Eglise, à ses enseignements simples et lumineux qui ont fait leurs preuves depuis 2000 ans ?
(Sources : Bulletin de la Salle de presse du Saint-Siège - FSSPX.Actualités)