Le voyage apostolique du pape en Egypte les 28 et 29 avril 2017

Source: FSSPX Actualités

Le pape François rencontre Ahmad Al-Tayyib, Grand Imam de l’université d'Al-Azhar, au Caire, le vendredi 28 avril 2017.

A l’invitation du président égyptien Abdel-Fattah Al-Sissi, du cheikh Ahmad Al-Tayeb, grand imam de l’université islamique d’Al-Azhar, du patriarche copte orthodoxe Tawadros II, et des évêques de l’Eglise catholique égyptienne, le pape François s’est rendu au Caire le 28 avril pour un court séjour d’une trentaine d’heures. 

Ce voyage apostolique en Egypte avait pour thème : Le Pape de la paix dans une Egypte de paix. « Il veut être un messager de paix, là où il y a le plus besoin d’annoncer et d’œuvrer pour la paix », a déclaré le cardinal Pietro Parolin, secrétaire d’Etat du Vatican, au Centre Télévisé du Vatican le 27 avril. Au sujet de l’œcuménisme, le haut prélat a affirmé : ce voyage en Egypte « cimentera encore plus la communion » avec l’Eglise copte orthodoxe. En effet, a-t-il dit, coptes orthodoxes ou catholiques, « tous sont visés par une même violence islamiste, en raison de leur foi ». De même, a-t-il soutenu, le dialogue entre le pape et les autorités d’Al-Azhar est « indispensable et fondamental pour la paix et toutes les religions doivent se sentir impliquées ».

A propos de l’aspect interreligieux du voyage du pape, le site Rossoporpora du vaticaniste Giuseppe Rusconi faisait paraître le 27 avril un entretien du père jésuite Samir Khalil, docteur en théologie orientale et en études islamiques. Né en 1938 au Caire, jésuite depuis 1955, il est professeur à l’Institut pontifical oriental depuis 43 ans, et enseigne également depuis 31 ans à l’Université Saint-Joseph à Beyrouth, où il a fondé et dirige le Centre de Documentation et de Recherches Arabes Chrétiennes (CEDRAC). Ses réflexions donnent au voyage du pape un éclairage que l’on n’a guère reçu des médias officiels.

Le P. Samir explique ce qu’est l’université Al-Azhar : « Avant tout, elle n’a rien d’une université au sens occidental du terme puisque son rôle est de former des imams. C’est en quelque sorte une grande faculté de théologie islamique. » Lorsqu’on compare le Coran à l’Evangile, précise le jésuite, « la différence fondamentale est dans le contenu des deux textes. Dans l’Evangile il n’y a pas un passage dans lequel il est dit : Vous devez tuer quelqu’un. Et même, si l’on vous donne une gifle, vous devez présenter l’autre joue. Le Coran est au contraire plein de violence. De plus, aucun chrétien ne pensera à appliquer littéralement chaque geste du Christ, mais il essayera de les repenser pour aujourd’hui ; alors que ces musulmans veulent reproduire matériellement tous les mots et les actes de leur fondateur ».

A propos du pape François : « son but est de faire tout son possible pour se réconcilier publiquement avec le monde musulman. Pour lui, toutes les religions sont des religions de paix et toutes les religions ont leurs fondamentalistes. Cela ressort aussi de certaines de ses considérations faites a braccio, répondant aux questions des journalistes dans l’avion papal. Comme lorsque, de retour de voyage apostolique en Pologne, il a mis sur le même plan la violence des fondamentalistes musulmans avec la violence de celui qui en Italie, pays catholique, tue sa petite amie ou sa belle-mère... Le fait est que le Pape a connu l’Islam à travers un brave iman à Buenos Aires. (…) Pour ce qui concerne la rencontre avec le président Al-Sissi, bon musulman, mais aussi désireux de distinguer la sphère religieuse de celle politique, j’aimerais que le pape insiste sur la nécessité que les chrétiens en Egypte soient considérés comme des citoyens comme tout le monde. Depuis des années, nous réclamons que la citoyenneté prévale sur l’appartenance religieuse et nous espérons que cette fois quelque chose bouge en ce sens. A l’Université d’Al-Azhar, je pense qu’il fera un discours principalement sur le thème de la non-violence. J’espère qu’il se référera aussi à la distinction nécessaire à faire entre la politique et la religion. On doit pouvoir faire comprendre qu’Al-Azhar parle pour les siens, pas pour toute l’Egypte. » – Le P. Khalil dénonce ici implicitement l’islam qui, de soi, ne distingue pas le religieux du temporel, et où la loi civile est la loi religieuse, charia.

Dans un autre entretien, le 26 avril, avec Aymeric Pourbaix de l’agence I.Media, le P. Samir Khalil rappelait l’histoire de l’islam : « Les mouvements fondamentalistes sont nés dans les années 30, lorsque Mustafa Kemal Atatürk a aboli le califat symbolique que représentait l’Empire ottoman. A ce moment-là, sont apparus les Frères musulmans, le salafisme s’est répandu, et le wahhabisme a pris une forme organisée avec la formation de l’Etat d’Arabie saoudite. Il s’agit donc d’une réaction contre la sécularisation du monde arabe, avec le rêve de refaire un califat médiéval.

« Au 19e siècle, l’Occident était perçu comme attractif au point de marquer la Renaissance (Nahda) égyptienne, y compris dans sa Constitution, inspirée de la Suisse et de la France. A l’époque, la charia ne figurait pas dans la Constitution. C’est seulement sous Sadate que l’article 2 a été introduit [Il stipule que l’islam est religion d’Etat en Egypte. Ndlr]. On peut aussi lire les récents attentats en Egypte comme un message au président Al-Sissi, qui fait construire dans le nouveau Caire la plus grande église d’Egypte, à côté de la plus grande mosquée du pays… Pour les islamistes, il est vu comme un usurpateur. »

(Sources : osservatore romano/rossoporpora/cath.ch /imedia – FSSPX.Actualités - 10/05/17)