L’élection de Léon XIV et la fin du conclave

Un bref regard sur l’histoire récente montre que les notions de « conclave long » ou de « conclave court » sont fort relatives… Que le lecteur en juge : en 1846 l’élection de Pie IX fut obtenue en 3 jours ; en 1878, celle de Léon XIII après 3 jours aussi ; en 1903, le conclave qui élit saint Pie X dura 5 jours ; en 1914, celui qui élit Benoît XV dura 4 jours ; et en 1922, celui qui élit Pie XI dura 5 jours ; il y eut 7 scrutins.

Le conclave qui élit Pie XII en 1939 fut l’un des plus courts : il dura deux jours, les 1er et 2 mars, avec 3 scrutins. Jean XXIII fut élu en 1958, lors d’un conclave de 4 jours avec 11 scrutins. En 1963, le conclave dura 3 jours et élit Paul VI après 6 scrutins. En 1978, le conclave qui élit Jean-Paul Ier fut le premier auquel ne participèrent pas les cardinaux de plus de 80 ans ; il dura deux jours, du 25 au 26 août, avec 4 scrutins.

Lors du second conclave de 1978, du 14 au 16 octobre, soit 3 jours, 111 électeurs élirent Jean-Paul II au bout de huit scrutins. En 2005, Benoît XVI fut élu pape au quatrième scrutin d’un conclave qui dura 2 jours, et qui compta le plus grand nombre de cardinaux électeurs de l’histoire : 115, comme celui de 2013 qui a élu François, après deux jours et 6 scrutins, dont un nul, du 12 au 13 mars.

Léon XIV semble avoir été élu au terme du cinquième tour de vote. Si l’on manque de détail sur l’élection du premier pape originaire des Etats-Unis, les observateurs se sont étonnés du tweet d’Andrea Tornielli, directeur éditorial du Dicastère pour la communication, annonçant la fumée blanche à midi, contre toute évidence. Simple bourde ? Anticipation d’une élection déjà prévue ? L’histoire le dira peut-être un jour.

Le conclave de 2013, en revanche, est peut-être l’un des mieux connus : il faut dire que le pape François – et d’autres cardinaux – n’a pas hésité à en révéler certaines arcanes à la presse. Autant de « fuites » plus ou moins organisées, malgré le secret pontifical : mais après tout, un pape est au-dessus de tout cela… Elles ont permis au journaliste Gerard O’Connell d’écrire un livre sur le sujet : The Election of Pope Francis.

Cet ouvrage nous apprend que l’élection du cardinal Bergoglio aurait été réalisée au sixième tour – dont un nul – un rythme somme toute rapide comparé à d’autres conclaves. Les résultats des votes montrent une évolution significative des préférences des électeurs :

Pour être élu, le candidat devait obtenir deux tiers des voix, soit 77 sur 115. Jorge Mario Bergoglio est passé de 26 votes au premier tour à 85 au cinquième. Considéré comme un outsider, il n’était pas parmi les papabili les plus cités, comme Christoph Schönborn, Odilo Scherer, Luis Antonio Tagle, Peter Turkson, Marc Ouellet, Péter Erdő et Angelo Scola. Les favoris du « conclave des médias » ne sont donc pas ceux du conclave du réel…

Un article d’El País de mai 2025 va dans le même sens, avec des résultats différents : le journal espagnol avance que le cardinal Bergoglio aurait commencé avec environ 12 votes, contre 25 pour le cardinal Scola. Mais l’Argentin a gagné du terrain, par les dynamiques complexes que le cardinal Daneels a élucidées en évoquant l’accord des prélats du groupe progressiste de Saint-Gall afin de faire élire l’un des leurs.

Reste à espérer que le pontificat du pape Léon XIV puisse réparer une Eglise qui a besoin plus que jamais de la boussole de la foi afin d’orienter les fidèles dans un monde qui perd le nord lorsqu’il s’éloigne de Dieu.