L’épiscopat chilien s’élève contre la culture de mort
Face au projet du chef de l’Etat chilien de légaliser l’avortement et l’euthanasie, les évêques du pays préviennent du danger qu’il y a à « relativiser la vie humaine » et rappellent que toute vie humaine demeure « sacrée et inviolable ».
« Empathie, responsabilité, respect » : les éléments de langage ont été savamment choisis par Gabriel Boric, « lors de son audition devant le Congrès réuni à Valparaiso », rapporte Aci prensa. Le chef de l’Etat déclarait alors « un “caractère d’urgence” au projet de loi sur l’euthanasie et les soins palliatifs actuellement examiné par le Sénat chilien », relate Gènéthique.
Le président en a profité pour relancer « un débat démocratique sur les droits sexuels et génésiques », selon le même média, assurant qu’il présenterait « un projet de loi sur la légalisation de l’avortement » au cours du second semestre de l’année 2024.
Une annonce surprenante si l’on sait que le président chilien « avait assuré, selon Aica, qu’il se garderait d’avancer en 2024 », sur un sujet éminemment clivant dans un pays de vingt millions d’habitants dont 74% se déclarent catholiques, et où l’influence de l’Eglise est encore forte, même si elle décline en proportion d’une sécularisation croissante depuis une vingtaine d’années.
Depuis 2017, l’avortement est autorisé dans trois situations : « en cas de viol, de danger pour la vie de la mère ou de non-viabilité du fœtus », rappelle Aci prensa. Entre 2018 et juin 2023, 4 272 femmes ont eu recours à une IVG dans le cadre de la loi, selon des données du ministère de la santé.
L’annonce présidentielle a fait réagir l’épiscopat chilien : aussitôt après les déclarations de Gabriel Boric, les cinquante évêques que compte le pays ont publié une protestation commune : « Nous regrettons profondément ces initiatives, qui portent atteinte à la valeur sacrée et inviolable de la vie humaine », ont fait valoir les prélats qui rappellent que la vie d’un être humain demeure « sacrée et inviolable du moment de sa conception à sa mort naturelle », cité par Aica qui rapporte le communiqué.
Les évêques entendent balayer les arguments employés par le chef de l’Etat chilien afin de justifier son projet : « Il n’existe aucun prétendu droit sexuel et reproductif qui porterait atteinte à la vie humaine, et même dans les situations les plus douloureuses, toute vie doit être respectée, en sorte qu’on ne puisse en aucun cas l’éliminer au motif de la souffrance. »
Gabriel Boric – 38 ans – ancien militant de gauche très actif dans les mouvements de mobilisation sociale qui ont déstabilisé le pays en 2019, est devenu en 2022 le plus jeune président de l’histoire du Chili, pays où l’opinion est plutôt versatile.
En septembre 2022 en effet, lors d’un premier référendum, les électeurs rejetaient un projet visant à consacrer un prétendu droit à l’avortement, avant de rejeter, un peu plus d’un an plus tard, une modification de la Constitution visant à graver le droit à la vie dans le marbre de la loi.
Mais Gabriel Boric ne dispose pas d’une majorité suffisante au Parlement pour faire imposer ses projets de réforme : les annonces du chef de l’Etat seraient en fait des signaux adressés à son électorat à deux petites années de la prochaine élection présidentielle.
D’ailleurs, « la maire actuelle de la Providencia et candidate de droite aux plus hautes fonctions en 2026 , Evelyn Matthei », ne s’y est pas trompé, « qualifiant de “honte” ce “manque de vision pour l’avenir. (…) Le Chili a d’autres urgences et d’autres besoins” » a-t-elle déclaré, rapporte encore Gènéthique. La course au Palais de la Modena est bien lancée.
(Sources : Aci Prensa/Aica/Gènéthique – FSSPX.Actualités)
Illustration : Capture d’écran Youtube - Iglesia Catolica in Chile - 19 avril 2024