Les 800 martyrs d’Otrante canonisés

Source: FSSPX Actualités

Dimanche 12 mai 2013, lors de la messe solennelle célébrée place Saint-Pierre, ont été proclamés saints 800 martyrs italiens décapités en 1480 par les Ottomans pour avoir refusé d’abjurer leur foi. 
Devant des milliers de fidèles, le pape François a évoqué l’exemple des martyrs d’Otrante : « Regardons les nouveaux saints à la lumière de la Parole de Dieu qui nous a invités à la fidélité au Christ, jusqu'au martyre. Elle nous a rappelé l'urgence et la beauté de porter le Christ et son Evangile à tous, et nous a parlé du témoignage de la charité, sans laquelle le martyre et la mission perdent leur saveur chrétienne ». 

Survivants du siège et de la prise de la ville d’Otrante par les turcs, ils furent décapités aux environs de la ville pour avoir refusé de renier leur foi, et moururent en confessant le Christ. « Où trouvèrent-ils la force de demeurer fidèles ? », s’est interrogé le souverain pontife. « Dans la foi, a-t-il poursuivi, qui nous fait voir au-delà des limites de notre regard humain », « même au cœur des obstacles et des incompréhensions ». Et d’ajouter : « Demandons au Seigneur qu’il soutienne les nombreux chrétiens qui, à notre époque et dans de nombreuses parties du monde, souffrent encore de violences. Qu’il leur donne le courage d’être fidèles et de répondre au mal par le bien ».

Le 29 juillet 1480, au large d’Otrante, cingle une flotte composée de 90 galères, 15 mahonnes et 48 galiotes, avec à leur bord 18.000 soldats. L’armée est dirigée par le pacha Agometh, lui-même sous les ordres du sultan Mehmet II (1432-1481), conquérant de Constantinople en 1453. En juin 1480, le sultan juge le moment opportun de s’emparer de Rome, et de transformer la basilique Saint-Pierre en écurie pour ses chevaux. Il lève le siège de Rhodes – que les chevaliers chrétiens défendaient avec courage – et dirige sa flotte vers la mer Adriatique. Il a l’intention de s’emparer de Brindisi, dont le port est vaste et commode, pour remonter l’Italie jusqu'au siège de la papauté. Cependant, un fort vent contraire contraint les navires à toucher terre plus au sud. Le débarquement a lieu à quelques kilomètres d’Otrante, la ville située le plus à l’est de l’Italie. Face aux Ottomans, Otrante ne dispose que d’une garnison de 400 hommes armés dont les chefs s’empressent de demander de l’aide au roi de Naples, Ferrante d’Aragon, en lui envoyant un courrier.

S’en suit un siège éprouvant de quinze jours. A l’aube du 12 août, les Ottomans ouvrent une brèche dans les murailles de la ville, envahissent les rues, massacrant tout sur leur passage. Ils gagnent la cathédrale où de nombreux habitants se sont réfugiés. Après avoir renversé les portes, les Ottomans trouvent l’archevêque Stefano vêtu de ses habits pontificaux, le crucifix à la main. A l’injonction des assaillants de ne plus prononcer le nom du Christ – puisque c’est Mahomet qui commande désormais – l’archevêque leur répond en les exhortant à la conversion. Il est alors décapité d’un coup de cimeterre. Le 13 août, Agometh se fait remettre la liste des habitants capturés, à l’exception des femmes et des enfants âgés de moins de 15 ans.

Près de huit cent hommes furent présentés devant le pacha. A sa demande d’abjurer, Antonio Primaldo, un tailleur pieux et fervent chrétien, les exhorta : « Vous tous, croyez en Jésus Christ, fils de Dieu et soyez prêts à mourir mille fois pour lui ». Agometh ordonna aussitôt la condamnation à mort des huit cents prisonniers. Le matin suivant, ils sont conduits, la corde au cou et les mains liées derrière le dos, à la colline de la Minerve, en dehors de la ville. Ils renouvelèrent leur profession de foi, criant qu’ils préféraient mourir plutôt que renier le Seigneur Jésus-Christ. Alors le tyran ordonna la décapitation, en commençant par le vieux Primaldo qui encourageait ses compagnons à rester forts dans la foi. Lors du procès pour la béatification des huit cents, en 1539, quatre témoins oculaires ont rapporté le prodige d’Antonio Primaldo, resté debout après avoir été décapité ainsi que la conversion et le martyre du bourreau. L’un d’entre eux, Francesco Cerra, âgé de 72 ans en 1539, raconte : « Antonio Primaldo fut le premier à être mis à mort. Décapité, il resta fermement debout et tous les efforts de ses ennemis ne parvinrent pas à le faire tomber, jusqu’à ce que tous les autres eussent été tués. Le bourreau, saisi par le miracle, proclama que la foi catholique était la vraie. Il insista pour devenir chrétien et pour cette raison fut condamné à la mort par le pal, sur ordre du pacha » (cf. Saverio de Marco, Compendiosa istoria degli ottocento martiri otrantini, publié en 1905).

Les deux semaines de résistance de la ville permettent à l’armée du roi de Naples de s’organiser et d’empêcher ainsi les 18.000 Ottomans d’envahir la région des Pouilles et de fondre sur Rome. Ce fut alors la reconquête d’Otrante, le retour d’Agometh en Turquie et la mort de Mehmet II en 1481.  (Sources : Radio Vatican/VIS/chiesa/ilfoglio – DICI n°275 du 17/05/13)