Les Journées Mondiales de la Jeunesse, agent de changement pour une nouvelle Eglise

Source: FSSPX Actualités

Les éditions canadiennes Sanctus Martinus ont publié l’an dernier la traduction française de l’étude de Cornelia R. Ferreira, Les Journées mondiales de la jeunesse, agent de changement pour une nouvelle Eglise, paru en anglais en 2005.

A la veille des 26e JMJ qui se dérouleront à Madrid du 16 au 21 août, il est utile de se reporter à son analyse qui indique les origines, l’esprit et les fruits de ces rassemblements gigantesques qui ont lieu tous les deux ans.

 

Ce livre s’appuie sur les faits et les déclarations entendues lors des JMJ de Toronto, en 2002. A près de 10 ans d’intervalle et sous un pontife différent, il convient de se demander si l’esprit de cette rencontre internationale a vraiment changé ou si, au contraire, c’est l’esprit des JMJ qui entend changer l’Eglise, comme l’affirme le titre de Cornelia Ferreira. Titre qu’elle explicite à la page 98 de son ouvrage où les JMJ sont présentées comme « le facteur d’évolution par excellence » de l’Eglise.

L’analyse du déroulement des cérémonies, du contenu des allocutions, de la tenue des participants aux diverses manifestations au cours des JMJ 2011 à Madrid, permettra de répondre à cette interrogation.

 

D’où viennent les JMJ ?

A l’origine des Journées mondiales de la jeunesse, on trouve le mouvement des Focolari, fondé en 1943, à Trente, en Italie, et qui à partir de 1949 tint de grands rassemblements œcuméniques annuels dans des cités temporaires nommées Maria polis (p.135).

Alors qu’à cette époque l’œcuménisme était interdit aux catholiques, les Focolari se déclarèrent non-confessionnels. Cornelia Ferreira démontre que ce mouvement reprend les idées du Sillon de Marc Sangnier, condamné par saint Pie X en 1910 dans Notre charge apostolique : « Comme les Focolari, écrit-elle, le Sillonisme était principalement un mouvement de jeunesse. L’objectif de fraternité mondiale des Focolari – Chiara Lubich elle-même (la fondatrice du mouvement, ndlr) dit que c’est le dernier article de la Révolution française (maçonnique) qui a encore besoin d’être mis en pratique – était l’objectif du Sillon. Comme les Focolari aussi, pour construire la communauté mondiale, le Sillon devint interconfessionnel à une époque où la collaboration interconfessionnelle était officiellement interdite ». (p.177)

 

Comment les JMJ s’inscrivent-elles dans cette filiation ?

Cornelia Ferreira cite un ancien membre des Focolari, Gordon Urquhart, qui dans un exposé sur les nouveaux mouvements ecclésiaux, les appelle des sectes à cause de leur emprise sur leurs membres et de leur sentiment d’avoir été élus pour sauver l’Eglise et le monde. « Urquhart déclare que les Journées mondiales de la jeunesse sont l’idée propre de ces sectes d’édification de la communauté, surtout des Focolari.

La forme des JMJ suit de près celle des festivals de jeunesse de style ‘show-biz’ des Focolari ou ‘Genfests’ qui commencèrent en 1971. Le pape Jean-Paul II assista à l’énorme rassemblement de 1980 des Focolari ainsi qu’à une manifestation similaire organisée par Communion et Libération en 1982. Après un Rassemblement international de la jeunesse, organisé par ces sectes le dimanche des Rameaux 1984 à Rome pour marquer le jubilé extraordinaire, rassemblement où plus de 300.000 jeunes furent présents, il institua les Journées mondiales de la jeunesse, avec l’aide de ces mouvements. [Gordon Urquhart, The Pope’s Armada : Unlocking the Secrets of Mysterious and Powerful New Sects in the Church (l’armada du pape, révélation des secrets des mystérieuses et puissantes sectes nouvelles dans l’Eglise) London, Bantam Press, 1995, et History of World Youth Day (histoire des JMJ), ibid.] ». (p.130)

 

L’esprit des JMJ

L’esprit des JMJ consiste en une exaltation de la jeunesse que Cornelia Ferreira qualifie de « syndrome de Peter Pan » où se trouvent encouragées « l’adolescence prolongée, l’irresponsabilité et l’immaturité – le style de vie de Peter Pan » (p.77).

A l’appui de cette affirmation, elle cite des évêques et des religieux, organisateurs des JMJ de Toronto en 2002. Ainsi cette déclaration des évêques canadiens qui s’engageaient « à évangéliser la jeunesse et à se laisser évangéliser par elle » ! (p.91).

Plus explicite encore cet aveu d’un prêtre spiritain : « Pendant les JMJ (2002), un atelier de jeunesse dirigé par une jeune femme (…) se réunit pour faire une ébauche pour un projet de Constitution pour l’Eglise catholique. Le but déclaré était ‘d’encourager d’autres croyants à avoir une pensée critique et créative sur l’état actuel de l’Eglise et sur ses possibilités d’avenir’ (…). Ce qui ressortait des propositions c’était le désir qu’ont les jeunes d’une Eglise où ils seraient entendus et d’une méthode de gouvernement permettant la participation responsable à tous les niveaux, conçue en fin de compte pour la création d’une ‘communauté mondiale plus respectueuse, compatissante et juste’ ». Car selon ce religieux, « ‘le septième continent’ – comme on a dénommé la jeunesse – a son langage propre, sa musique propre et son système de valeurs à lui où les relations entre pairs jouent un rôle énorme ». [P. Michael Doyle, CSSp, The Seventh Continent (le septième continent), dans Spiritan Missionary News, Toronto, février 2003] (p.79-81)

Cornelia Ferreira montre qu’à travers ces manifestations festives s’exprime une religion du plaisir d’où est banni le sacrifice de la Croix : « Une grande affiche publicitaire pour les JMJ suspendue dans les églises de Toronto représentait une scène, à Rome (JMJ 2000, ndlr), qui évoque vraiment un Woodstock : un champ couvert de milliers de corps, hommes et femmes, entassés, certains étendus sous des tentes, des filles en haut de bikinis et short. Ils avaient dû passer la nuit précédente ensemble et camper pour la messe papale du matin. Une femme d’un certain âge qui accompagnait des jeunes du Néo-catéchuménat se souvenait : ‘Il n’y avait absolument aucune place pour passer entre les gens et leurs sacs de couchage’ ». (p.83) Et de citer des journalistes peu suspects de catholicisme exagéré : « Même la presse laïque, dans son reportage sardonique sur la nuit dans ‘le dortoir du pape’, à Toronto, reconnaissait ‘quelques pensées impures éveillées par les dortoirs mixtes’ [National Post, Toronto, 29 juillet 2002].

Les anecdotes ne manquaient pas sur les embrassades passionnées et autres amusements indécents auxquels on s’était livré pendant cette nuit passée ensemble [cf. Graeme Smith et Wallace Immen, Good, Clean Fun at Muddy Mass Site (des plaisirs propres et honnêtes sur un lieu de messe boueux), Globe and Mail, 29 juillet 2002]… » (p.84)

Dès lors l’auteur ne peut que signaler l’inutilité de tous les appels à la tempérance : « A quoi bon la déclaration du Conseil pontifical pour la famille que ‘la pratique de la décence et de la modestie en paroles, en actes et dans le vêtement sont très importantes pour créer une atmosphère favorable à la croissance de la chasteté’ et que la chasteté ‘requiert la maîtrise de soi, ce qui présuppose des vertus telles que la modestie et la tempérance’ [La vérité et le sens de la sexualité humaine, 8 décembre 1975, n°55-56], à quoi bon ces discours quand la hiérarchie ferme les yeux sur l’étalage de l’immodestie tout au long des Journées mondiales de la jeunesse ? » (p.85)

Quels sont les fruits des JMJ ?

Cornelia Ferreira s’interroge : « Quel est le résultat de vingt années de Journées mondiales de la jeunesse remplies d’amusements ? Nous en sommes déjà à la deuxième génération de participants aux JMJ. La jeunesse qu’on avait proclamée ‘l’avenir’ de l’Eglise il y a vingt ans a maintenant la quarantaine ou la cinquantaine. Ont-ils été un ‘don’ au catholicisme en entravant son déclin, ou remplissent-ils les bancs de l’Eglise adulte, s’ils ont encore la moindre religion ? » A vrai dire, nous avons la réponse officielle à ce qui n’était d’ailleurs qu’une interrogation oratoire. En 2000, Mgr Louis-Marie Billé, alors président de la Conférence des évêques de France, ‘se vit demander si les Journées mondiales de la jeunesse avaient amené davantage de jeunes à l’Eglise et si les vocations à la prêtrise avaient augmenté en conséquence. Aux deux questions, il fut obligé de répondre que non’ [Frère Ephraïm, fondateur des Béatitudes, Teaching, août 2000, beatitudes.us] » (p.104)

Même aveu de la part du cardinal archevêque de Paris : « Après les JMJ de 1997, la France avait commencé à se concentrer sur le ‘ministère de la jeunesse’ et avait attribué ‘l’étonnant’ succès des JMJ de Rome en 2000 aux 60 à 80.000 pèlerins français (les estimations varient), le deuxième contingent par l’importance après l’Italie. Le cardinal Jean-Marie Lustiger, de Paris, avait déclaré que les Journées Mondiales de la Jeunesse étaient ‘un grand don de renouveau’ pour l’Eglise et que l’important contingent français permettait de ‘mesurer la fécondité des Journées mondiales de la jeunesse de Paris en 1997’. Cependant, en février 2004, à peine trois ans et demi plus tard, il était forcé de concéder au pape que le catholicisme français accusait ‘un déclin dans la pratique religieuse, une réduction du nombre de prêtre actifs, la perte des habitudes chrétiennes et la sécularisation de la morale’ [CWNews.com, 20 février 2004]. » (p.105) 

L’ouvrage de Cornelia Ferreira nous livre des éléments de réflexion qu’il importe d’avoir présents à l’esprit alors que les radios et les télévisions du monde entier s’apprêtent à retransmettre en direct les JMJ de Madrid, sans le recul qui permet de comprendre et de juger les événements.

Cornelia R. Ferreira, Les Journées mondiales de la jeunesse, agent de changement pour une nouvelle Eglise,

187 pages, 22 €. Editions Sanctus Martinus - CP 315 - Combermere ON Koj 1 LO - Canada. -

Diffusion en France : AFS - 31 rue Rennequin - 75017 Paris. 

Alors que le pape Benoit XVI s´apprête à célébrer le 25e anniversaire des Journées Mondiales de la Jeunesse à Madrid en août 2011, Cornelia R. Ferreira en dresse un bilan peu flatteur.