Les propositions finales du Synode
Habituellement gardée secrète et soumise au pape pour l’aider à réaliser son Exhortation post-synodale, la version de travail ‘non officielle’ des propositions finales des pères synodaux a été publiée pour la deuxième fois dans l’histoire de cette institution créée en 1965 par Paul VI. C’est seulement lors du synode de 1985, à l’occasion des 20 ans de la conclusion du Concile Vatican II, que Jean-Paul II avait décidé de rendre publiques ces propositions.
La ‘liste finale’ de 50 propositions est structurée en trois chapitres. Après une introduction qui reprend les deux premières propositions, le premier chapitre concerne "le peuple de Dieu éduqué à la foi dans l’Eucharistie", avec les sous-chapitres qui concernent "la foi dans l’Eucharistie" (propositions 3 à 6), "Eucharistie et sacrements" (propositions 7 à 12) et "catéchèse et mystagogie" (propositions 13 à 17). Le second chapitre aborde "la participation du peuple de Dieu à la célébration eucharistique", en particulier la "structure de la célébration" (propositions 18 à 24), "l’ars celebrandi" (propositions 25 à 29) et "la participation des fidèles" (propositions 30 à 37). Enfin, la troisième partie touche "la mission du peuple de Dieu nourri par l’Eucharistie", notamment "l’Eucharistie et la communauté chrétienne" (propositions 38 à 41) et "l’Eucharistie pour le monde" (propositions 42 à 49). Enfin, la 50e proposition, intitulée "Verum Corpus natum de Maria virgine", constitue la conclusion du document.
Les propositions 11, 40, 41 et 46 abordent respectivement les questions les plus délicates évoquées lors de ce Synode : le manque de prêtres, les divorcés remariés, l’accès à la communion des chrétiens non catholiques, et la cohérence des politiciens catholiques qui soutiennent des lois contraires à l’enseignement de l’Eglise. Voici quelques extraits significatifs :
Proposition 2. La réforme liturgique de Vatican II
"L’Assemblée Synodale s’est rappelée avec gratitude le bénéfice de l’influence que la réforme liturgique réalisée à partir du Concile Vatican II a eu sur la vie de l’Église. Cette réforme a mis en évidence la beauté de l’action eucharistique qui resplendit dans le rite liturgique. Des abus se sont produits dans le passé, et ils se poursuivent aujourd’hui encore, même s’ils ont beaucoup diminué. Toutefois de tels épisodes ne peuvent pas assombrir la bonté et la validité de la réforme, dont toutes les richesses n’ont pas encore été explorées".
Proposition 5. Eucharistie et Eglise
"(…) Par sa dimension ecclésiale, l’Eucharistie établit un lien fort d’unité entre l’Église catholique et les Églises orthodoxes, qui ont conservé la complète nature du mystère de l’Eucharistie. Le caractère ecclésial de l’Eucharistie pourrait être même un point privilégié dans le dialogue avec les communautés nées de la Réforme".
Proposition 10. Modalité des Assemblées Dominicales en attente de prêtres
"Dans les pays où la pénurie de prêtres et les distances importantes rendent pratiquement impossible la participation à l’Eucharistie dominicale, il est important que les communautés chrétiennes se rassemblent pour louer le Seigneur et faire mémoire du jour dédié à Lui en communion avec l’Évêque, comme toutes les Eglises particulières, et avec l’Église universelle. Il est important de préciser la nature de l’engagement des fidèles à participer à ces assemblées dominicales. (…) Il revient aux Conférences épiscopales de réguler la possibilité de distribuer la Communion. Il faudra éviter toute confusion entre la célébration de la Sainte Messe et les assemblées dominicales en attente de prêtre".
Proposition 11. Le manque de prêtre
"La centralité de l’Eucharistie pour la vie de l’Église fait sentir avec une douleur aiguë le problème du grave manque de prêtre dans plusieurs parties du monde. Beaucoup de fidèles sont ainsi privés du Pain de vie. Pour venir répondre à la faim eucharistique du peuple de Dieu, qui souvent pour des longues périodes doit se passer de la célébration eucharistique, il est nécessaire de recourir à des initiatives pastorales efficaces". Dans ce contexte les Pères Synodaux ont affirmé l’importance du don inestimable du célibat ecclésiastique dans la pratique de l’Église latine. En se référant au Magistère, en particulier au Concile Vatican II et au dernier Pontificat, les Pères ont demandé d’expliquer de manière adéquate aux fidèles les raisons du rapport entre le célibat et l’ordination sacerdotale, dans le plein respect de la tradition des Églises orientales. Certains ont fait référence aux "viri probati", mais cette hypothèse a été considérée comme une voie à ne pas emprunter.
Proposition 26. Inculturation et Célébration eucharistique
Pour une participation plus efficace des fidèles à l’Eucharistie, le Synode souhaite la promotion d’une plus grande inculturation pour la célébration eucharistique, en tenant compte des possibilités d’adaptation offertes par l’Institution générale du Missel romain, des critères fixés par l’Instruction de 1994 de la Congrégation pour le culte divin et des directives exprimées dans les Exhortations post synodales Ecclesia in Africa, Ecclesia in Asia, Ecclesia in Oceania, Ecclesia in America. À cet effet les Conférences épiscopales assument la pleine responsabilité du développement des tentatives d’inculturation en favorisant le juste équilibre entre les critères des directives déjà citées et des nouvelles adaptations.
Proposition 40. Les divorcés remariés et l’Eucharistie
Dans la continuité des nombreuses prises de position du Magistère de l’Église et en partageant la préoccupation de souffrance exprimée par beaucoup de Pères, le Synode des Évêques réaffirme l’importance d’une attitude et d’une action pastorale d’attention et d’accueil à l’encontre des fidèles divorcés et remariés. Selon la Tradition de l’Église catholique, ils ne peuvent pas être admis à la Sainte Communion, se trouvant dans des conditions objectives de contradiction avec la Parole du Seigneur qui a donné au mariage la valeur de l’indissolubilité (..). Les divorcés remariés appartiennent cependant à l’Église, qui les accueille et les suit avec une attention spécifique (…).
En même temps le Synode souhaite que soit fait tout l’effort possible pour assurer le caractère pastoral, la présence et la sollicitude de l’activité des tribunaux ecclésiastiques pour les causes de nullité matrimoniale (cf. Dignitas connubii), et que soient approfondis les éléments pris en compte pour la validité du mariage, en tenant compte des nouveaux problèmes nés du contexte de transformation anthropologique profonde de notre époque (…).
Proposition 41. Admission des fidèles non catholiques à la Communion
(…) Nous demandons que les chrétiens non catholiques comprennent et respectent le fait que pour nous, selon la tradition biblique fondée, la Communion eucharistique avec les chrétiens non catholiques n’est pas généralement possible. La concélébration œcuménique est encore plus exclue. Mais en même temps, il faudra clarifier le fait qu’en vue du salut personnel, l’admission de chrétiens non catholiques à l’Eucharistie (…) est possible en fonction de situations individuelles déterminées, sous des conditions précises.
Proposition 46. La cohérence des politiciens catholiques qui soutiennent des lois contraires à l’enseignement de l’Eglise
Les personnalités politiques et les législateurs catholiques sont appelés à "se sentir particulièrement interpellés par leur conscience, droitement formée, à propos de la grave responsabilité sociale de présenter et de soutenir des lois iniques". "Il n’y a pas de cohérence eucharistique lorsque l’on promeut des lois qui vont à l’encontre du bien intégral de l’homme, contre la justice et le droit naturel. On ne peut pas séparer l’option privée de celle qui est publique, en se mettant en opposition avec la loi de Dieu et l’enseignement de l’Eglise, et cela doit être considéré aussi face à la réalité eucharistique. En mettant en pratique cette orientation, que les évêques exercent les vertus de force et de prudence en tenant compte des situations locales concrètes".
En outre, les pères synodaux invitent à "mieux étudier la pratique de la concélébration lorsque le nombre des prêtres est très élevé", recommandent "l’importance de s’agenouiller lors des moments forts de la Prière eucharistique" et rappellent que "le prêtre est, de façon irremplaçable, celui qui préside la célébration eucharistique tout entière". Ainsi, la proposition 33 demande que la collaboration des laïcs au service liturgique ait lieu "selon les exigences réelles", et que ces personnes soient "choisies avec soin, bien préparées et accompagnées dans une formation permanente".
La liste des propositions réaffirme "le caractère central du dimanche et de la célébration eucharistique dominicale", elle encourage aussi "fortement" l’adoration eucharistique en réclamant, par exemple, que "dans la mesure du possible, les églises dans lesquelles le Saint-Sacrement est présent restent ouvertes". Les pères synodaux rappellent que "l’état de grâce" est nécessaire pour recevoir la communion et recommandent aux évêques de "ne pas permettre dans leurs diocèses le recours aux absolutions collectives, sauf dans les situations objectivement exceptionnelles" prévues par l’Eglise. Le Synode encourage aussi "une catéchèse renouvelée" de la pratique des indulgences et demande par ailleurs que la communion soit donnée "aux handicapés mentaux baptisés et confirmés".
Le document invite encore à une plus grande attention en ce qui concerne les homélies, proposant qu’elles reprennent les différents thèmes de la foi chrétienne tout au long de l’année. A côté de ces quelques rappels traditionnels on peut également trouver une invitation telle que : les prières eucharistiques "pourraient être enrichies par des acclamations", comme c’est déjà le cas lors des assemblées d’enfants.