Les sarcophages de Notre-Dame de Paris livrent leurs premiers secrets
En mars et mai dernier, les équipes de l’Institut national de recherches archéologiques préventives (Inrap) avaient découvert deux sarcophages anthropomorphes, en plomb, situés à la croisée du transept, lors de fouilles autorisées avant la mise en place d’un énorme échafaudage de plus de 700 tonnes.
L’expertise de l’Institut médico-légal de Toulouse
Les deux sarcophages ont ensuite été confiés à l’Institut médico-légal de Toulouse, déjà connu pour ses réussites dans le domaine de la paléoarchéologie, notamment pour avoir analysé la momie de Louise de Quengo, découverte dans le couvent des Jacobins à Rennes, en 2013.
C’est aussi à Toulouse que réside le Pr Eric Crubézy, un passionné d’archéo-anthropologie, qui dirige le laboratoire d’Anthropologie moléculaire et imagerie de synthèse (Amis) à l’université de Toulouse, et qui a déjà travaillé sur de nombreuses dépouilles anciennes.
Les scientifiques de Toulouse étaient chargés d’étudier les deux cercueils, de les ouvrir et d’étudier les ossements des défunts, ainsi que tout autre objet présent dans les deux sépultures. Ils ont ainsi pu déterminer l’identité de l’un des défunts.
Un cavalier atteint de tuberculose
Le sarcophage découvert en premier, au mois de mars, date d’« entre le XIVe et la fin du XVIIe siècle » selon les estimations de Christophe Besnier, l’archéologue responsable des fouilles. L’homme qu’il contient a été embaumé, mais son identité n’a pas encore pu être établie.
Selon le Pr Crubézy, l’homme aurait « entre 25 et 40 ans », et ajoute-t-il, « il pratiquait l’équitation depuis son jeune âge » ; enfin « il avait une déformation crânienne légère » et probablement la tuberculose, a-t-il expliqué lors d’une conférence de presse à Toulouse.
Il s’agit probablement d’un riche notable, car « seule 4% de la noblesse (…) avait la possibilité de se faire embaumer ou d’avoir un cercueil en plomb », a-t-il précisé. De plus, sa présence à la croisée du transept de la cathédrale marque probablement un statut social élevé. Pour pouvoir l’identifier, il faut attendre une datation plus précise et consulter les registres d’inhumation.
Un « chanoine jubilé »
Le second sarcophage contenait une épitaphe, ainsi que des médailles et une plaque faisant mention du chanoine Antoine de La Porte. Mort à 83 ans, en 1710, c’était un prélat dont un portrait est conservé au Louvre. « Cy est le corps de messire Antoine de la Porte, chanoine de l’église (mot effacé), décédé le 24 décembre 1710 en sa 83e année. Requiescat in pace », livre en guise d’épitaphe, la plaque de bronze gravée.
Ces indications ont permis de reconnaître le « chanoine jubilé », surnommé ainsi pour avoir occupé des fonctions à Notre-Dame de Paris durant plus de cinquante ans, précise Sciences et Avenir. Il fut inhumé avec les vestiges du jubé médiéval de la cathédrale. Il contribua notamment aux travaux de réaménagement du chœur souhaité par Louis XIII.
La croisée du transept était un lieu très prisé par les notables et chanoines, a rappelé Christophe Besnier. « Plus de 300 personnes ont été enterrées dans Notre-Dame » et ce type de sépulture était « réservé(e) à une élite » car « le plomb coûtait très cher ».
Après une période de deux ans qui permettra de terminer les études sur les sarcophages, l’Inrap les remettra au ministère de la Culture. Les dépouilles pourraient à ce moment-là être réinhumées. C’est en tout cas le souhait du clergé de la cathédrale.
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(Sources : 20 minutes/Le Monde/Sciences et Avenir – FSSPX.Actualités)
Illustration : © Denis Gliksman, Inrap