De Luther au pape François, en passant par les papes conciliaires

Source: FSSPX Actualités

Le pape François et la statue de Luther au Vatican en 2016

Le 25 octobre 2021, le pape François a reçu en audience dans la salle Paul VI les participants du pèlerinage œcuménique “De Luther au Pape” venant d’Allemagne, avec la devise “Mieux tous ensemble”, et il espère de l’Eglise « une volonté d’écoute », également à l’occasion du processus synodal.

Luther à Rome, ou Rome par Luther, de Paul VI à Benoît XVI

A l’époque de Paul VI, des pasteurs protestants sont venus à Rome pour participer en tant qu’“observateurs” à la rédaction de la nouvelle liturgie « catholique », au Consilium présidé par le Père Annibale Bugnini.

Leur contribution à la rédaction du nouveau missel ne fut pas seulement symbolique, mais effective, comme en témoigne l’un d’entre eux, le pasteur Jasper, et comme le montre le n°23 du bulletin du Consilium, Notitiae, de novembre 1966. Ce n’est pas un hasard si les participants non catholiques à cette réunion étaient tous protestants, sans même – pour prendre un exemple – un orthodoxe.

D’ailleurs, Bugnini lui-même écrit que le nouveau rite a été élaboré « pour faciliter à nos frères séparés le chemin de l’union, en écartant toute pierre d’achoppement ou de déplaisir ». (Documentation Catholique, n. 144, 1965, col. 604).

L’amour des papes conciliaires pour Martin Luther s’est exprimé en de nombreuses occasions ultérieures, dont nous ne pouvons rappeler ici que les principales.

En 1983, Jean-Paul II, dans une lettre au cardinal Willebrands, décrit Luther comme un homme « d’une profonde religiosité », dont les revendications « ont trouvé un écho chez les catholiques de divers points de vue » dans son Discours aux évêques luthériens scandinaves, 6 juin 1989, notamment avec le concile Vatican II.

Ne mentionnons pas les relations étroites de Benoît XVI avec le monde luthérien : il a été le premier pape à assister au culte luthérien en tant que tel, du début à la fin, dans le Temple de Rome, le 14 mars 2010.

Il ne s’agit donc pas d’une « simple » réunion œcuménique, mais d’une véritable communicatio in sacris avec des hérétiques, du moins est-il permis de le supposer. Lui aussi n’a pas manqué de faire l’éloge de Luther, à Erfurt le 23 septembre 2011.

Le pape François et Luther, présentés côte à côte

Quant au pape François, il n’est pas nécessaire ici de rappeler les célébrations conjointes avec les luthériens pour le 500e anniversaire de la Réforme, qui ont débuté à Lund en Suède le 31 octobre 2016. A cette occasion, il a remercié Dieu pour le don de la Réforme, attribuant essentiellement à Dieu un si grand mal.

La célèbre statue de Luther, apparue à Rome lors des célébrations de cette période, est réapparue lors de l’événement du 25 octobre dernier dans la salle Paul VI. Une effigie située derrière le pape célébrait Huss, le précurseur hérétique de Luther, et les profils du pontife et du réformateur allemand apparaissaient côte à côte.

Le pape a prononcé un bref discours : « Au début, vous m’avez salué avec un chant communautaire. Le chant unit. Dans le chœur, personne n’est seul : il est important d’écouter les autres. Je souhaite cette volonté d’écoute pour l’Eglise. Nous l’apprenons à nouveau dans le processus synodal. [...]

« Ainsi, à partir de nombreuses voix, un chant se forme. C’est également de cette manière que l’œcuménisme se produit, en Allemagne et dans de nombreuses autres parties du monde. » Un chœur de voix discordantes, mises à l’unisson par le simple fait que le modernisme général a vidé les dogmes de toute signification réelle.

Quant à l’écoute souhaitée « pour l’Eglise » en vue du Synode, nous avons appris qu’il s’agit d’écouter le monde, et non la Révélation, seule manifestation de l’esprit divin qui est l’histoire même et qui ouvre les « processus » si chers au pape. Ainsi, Luther devient, dans l’Eglise en marche, un modèle parce qu’il a initié un « processus » de réforme, qui a touché les dogmes et la structure ecclésiastique.

Si, à l’époque de Paul VI, le contenu de ces hérésies devait passer dans la liturgie catholique, il devient aujourd’hui l’un des paradigmes historiques de ce que nous vivons, c’est-à-dire un processus continu vers une religion actualisée aux besoins du monde, mené à bien par des « prophètes » et des révolutionnaires.

Mais comme à l’époque de Luther, lorsque l’Eglise s’adapte au monde, elle finit par se soumettre au monde.