Ni schismatiques, ni excommuniés (12)

Source: FSSPX Actualités

La Chaire de Saint Pierre dans la Basilique du même nom

Le site FSSPX.Actualités reproduit un article de 1988 qui, devenu difficile à trouver, mérite une nouvelle présentation. Le texte reprend la constatation de la crise de l’Eglise et de sa gravité qui met les fidèles en demeure de choisir entre leur foi et l’obéissance aux nouvelles orientations ecclésiales.

[Les deux précédents articles ont abordé l’Etat et le droit de nécessité, qui comporte cinq points, dont les trois premiers, qu’il existe vraiment un état de nécessité, que tous les moyens ordinaires ont été épuisés, que l’acte posé n’est pas intrinsèquement mauvais et qu’il n’en résulte aucun dommage pour les âmes, ont déjà été traités. Cet article aborde le quatrième.]

Etat et droit de nécessité

4) Dans les limites des exigences effectives

Dans la violation matérielle de la norme disciplinaire, Mgr Lefebvre s’est maintenu à l’intérieur des limites tracées par les exigences effectivement imposées par l’état de nécessité et il a donc agi dans le cadre du droit de nécessité.

Déjà le 27 avril 1987, le Fondateur d’Ecône écrivait à ses Prêtres : « Les fidèles encore catholiques sont en beaucoup d’endroits dans une situation spirituelle désespérée. C’est cet appel que l’Eglise entend, c’est pour ces situations qu’elle donne juridiction (loi de suppléance). (…)

« De ce fait, nous devons nous rendre là où nous sommes appelés et ne pas donner l’impression que nous avons une juridiction universelle ni une juridiction sur un pays ou sur une région. Ce serait fonder notre apostolat sur une base fausse et illusoire. »

Et il ajoutait : « Si un jour il était nécessaire de sacrer des évêques, ceux-ci auraient la seule fonction épiscopale d’exercer leur pouvoir d’ordre et ils n’auraient aucun pouvoir de juridiction, n’ayant pas de mission canonique. »

Aux consacrés, il a répété : « Le but principal de cette transmission est de conférer la grâce de l’ordre sacerdotal pour la continuation du vrai Sacrifice de la Sainte Messe, et pour conférer la grâce du sacrement de confirmation aux enfants et aux fidèles qui vous la demandent. »

Mgr Lefebvre ne s’est donc pas arrogé le droit de conférer aux nouveaux évêques un pouvoir de juridiction qui dépend du Pape ; il n’a pas organisé ni n’a entendu organiser une hiérarchie parallèle (les évêques sacrés par lui restent notamment soumis au Supérieur général de la Fraternité), et encore moins une Eglise parallèle.

Il s’est borné à transmettre le pouvoir d’ordre que l’évêque reçoit directement de Dieu au moment de la consécration, afin que les nouveaux Evêques puissent subvenir à l’état de nécessité des âmes et des candidats au sacerdoce.

Et, parce que, dans une situation normale, le pouvoir d’ordre s’exerce aussi en conformité des normes fixées, Mgr Lefebvre a ajouté : « Je vous conférerai cette grâce (de l’épiscopat catholique) confiant que sans tarder le Siège de Pierre sera occupé par un successeur de Pierre parfaitement catholique en les mains duquel vous pourrez déposer la grâce de votre épiscopat pour qu’il la confirme. »

5) L’autorité du Pape n’est pas mise en question

Au vu de ce qui précède, il devrait être clair aussi que Mgr Lefebvre n’a jamais mis ni n’entend mettre en question l’autorité du Pape, que ce soit globalement ou pour certaines de ses prérogatives.

Il distingue, comme il est licite de le faire, entre la fonction du Pape et la personne du Pape ; celle-ci peut, en tout ou en partie « renuere subesse officio Papæ » (Cajetan), « se refuser à accomplir les devoirs de sa propre charge », en voulant, en favorisant ou en permettant une orientation ruineuse de l’Eglise (que ce soit par mauvaise volonté ou par négligence, par aveuglement ou par bévue personnelle plus ou moins coupable, peu importe, c’est à Dieu de juger).

C’est pour cela que Mgr Lefebvre, au moment même où il va procéder aux sacres épiscopaux en l’absence de mandat pontifical régulier, a écrit aux futurs Evêques : « Je vous conjure de demeurer attachés au Siège de Pierre, à l’Eglise Romaine, Mère et Maîtresse de toutes les Eglises, dans la Foi catholique intégrale, exprimée dans les Symboles de la Foi, dans le Catéchisme du Concile de Trente, conformément à ce qui vous a été enseigné dans votre Séminaire. »

La consécration épiscopale sans mandat pontifical régulier n’implique pas la négation du Primat, comme cela a été dit avec une incroyable légèreté ; cela non seulement parce que cette consécration est motivée et effectivement justifiée par un réel état de nécessité.

Mais aussi parce que l’on peut et que l’on doit raisonnablement présumer, en faveur d’un acte raisonnable posé pour le bien des âmes et rendu nécessaire par la situation, que le Pape l’aurait approuvé dans des circonstances normales, c’est-à-dire hors du cours extraordinaire des choses dans lequel se trouve objectivement l’Eglise aujourd’hui :

Il n’est pas pensable que le Vicaire du Christ puisse vouloir ou veuille la condamnation à mort des seuls séminaires catholiques où fleurissent des vocations qui ne trouveraient aucun autre cadre dans lequel recevoir une formation sacerdotale droite ;

Il n’est pas pensable qu’il puisse vouloir ou veuille la condamnation à mort de la seule œuvre catholique qui secourt autant d’âmes plongées dans une angoisse et une pénurie spirituelles extrêmes.

Ainsi que l’a redit encore Mgr Lefebvre à cette occasion, « le Pape (dans sa fonction de Pape) ne peut que désirer la continuation du sacerdoce catholique », c’est-à-dire de l’Eglise catholique dont l’édification est précisément toute sa raison d’être Pape.