Ouganda : tensions entre l’Eglise et l’Etat
la cathédrale Sainte-Marie de Kampala. [Daily Monitor]
Les relations déjà difficiles entre l'Eglise et le chef de l’Etat ougandais se sont encore détériorées depuis Pâques, après que l’archevêque de Kampala, la capitale du pays, a révélé l’existence d'un complot organisé au plus haut sommet de l’Etat dans le but de lui nuire.
Tout a commencé le 30 mars 2018, lorsque, le Vendredi saint, Mgr Cyprien Kizito Lwanga, archevêque de Kampala, a déclaré lors d'une visite d'une école qu'il était « espionné par des gens d’Eglise à la solde du gouvernement ».
Le prélat a réitéré ses déclarations dans son homélie le jour de Pâques, dans la cathédrale Sainte-Marie de la capitale, révélant qu’une source anonyme l’avait informé d’une conspiration du gouvernement visant à lui faire quitter ses fonctions à Kampala.
L’informateur du prélat lui aurait conseillé de prendre garde à ne pas devenir le prochain Janani Jakaliya Luwum, du nom de l’ancien archevêque anglican qui avait été accusé à la fin des années 70 d’être un agent de l’ancien président Apollo Milton Obote. Il fut arrêté et jugé coupable de trahison. Puis l’archevêque fut assassiné le 17 février 1977.
« Si Dieu permet que je meure de cette manière, qu’il en soit ainsi, mais il est criminel de faire mourir quelqu’un sur de fausses accusations », a déclaré Mgr Lwanga, à la fin de son homélie, expliquant que « tout est fait pour l’intimider » parce qu’il parle des « problèmes des gens de ce pays », mais que, en tant qu’homme d’Eglise, il ne peut « se taire ».
Le président Yoweri Museveni a réagi aux propos de l’archevêque de Kampala dès le lundi 2 avril, l’accusant de se tourner vers les médias afin de trouver un écho à ses griefs personnels.
Au fil des années, les relations se sont tendues entre le président ougandais et Mgr Lwanga, ce dernier l’accusant de violer les droits humains, d’être incapable d’assurer la sécurité du peuple ougandais, et de laisser certains membres des forces armées se conduire comme des hors-la-loi en toute impunité.
En 2016, l’archevêque de Kampala s’était prononcé contre l’amendement de la Constitution visant à supprimer la limite d’âge à l’élection présidentielle, ce que souhaitait Museveni afin de pouvoir se représenter.
Au pouvoir depuis 1986, le chef de l’Etat ougandais, qui est de confession évangélique, avait alors déclaré avec une certaine acrimonie : « certains de nos religieux sont si pleins d’arrogance. Ils parlent avec autorité sur tout et tout, même quand ils n’ont pas pris la peine de découvrir la vérité. Il n’y a aucune vérité en eux ».
Selon un recensement de 2014, 84,5% des 41,5 millions d’habitants de l’Ouganda sont chrétiens. Le catholicisme est la religion majoritaire, représentant 39% de la population totale du pays. Le pays a été évangélisé à partir de 1879 par les missionnaires français de la congrégation des Pères blancs.
(Sources : cath.ch/The Observer/AFP/Africa News/africa.la-croix – FSSPX.Actualités - 13/04/2018)