En Pologne, l’Eglise catholique souffle après la victoire de Nawrocki

Le Président Karol Nawrocki
L’élection présidentielle polonaise de 2025 a captivé l’attention non seulement par l’intensité de son déroulement, mais aussi par les implications profondes qu’elle pourrait avoir pour l’Eglise catholique dans un pays où la foi joue un rôle important.
Le scrutin présidentiel de 2025 a opposé deux figures aux visions radicalement différentes. D’un côté, Rafal Trzaskowski, incarnation d’une Pologne progressiste, soutenu par le Premier ministre Donald Tusk et sa formation politique « Plateforme civique ».
De l’autre, Karol Nawrocki, issu d’un milieu plus populaire, ancien boxeur amateur et fervent défenseur de l’identité catholique polonaise, devenu directeur de l’Institut de la mémoire nationale, une institution clé dans la préservation de l’histoire du pays.
Ces deux candidats ont porté des projets de société antithétiques, reflétant les fractures profondes de la Pologne contemporaine : entre tradition et progressisme, entre patriotisme et cosmopolitisme de l’Union européenne, entre foi catholique et sécularisation.
Les enjeux étaient d’autant plus cruciaux que le président polonais, bien que son rôle soit largement symbolique, dispose d’un pouvoir de veto législatif significatif.
Depuis l’arrivée au pouvoir de Donald Tusk en 2023, les ambitions réformatrices du gouvernement, orientées vers une libéralisation des mœurs et une sécularisation accrue, se sont heurtées à l’opposition du président sortant, Andrzej Duda, un catholique pratiquant affilié au parti Droit et justice (PiS).
Celui-ci s’était engagé à bloquer toute tentative d’élargir l’accès à l’avortement, une question particulièrement sensible dans un pays où les lois sur l’interruption de grossesse sont les plus restrictives de l’UE. L’élection de 2025 a donc été perçue comme un référendum sur la capacité de Donald Tusk à mener à bien son programme progressiste.
Pour comprendre les implications de la victoire de Karol Nawrocki, le site d’informations religieuses anglo-saxon The Pillar s’est entretenu avec Aleks Szczerbiak, professeur de sciences politiques à l’Université du Sussex (Royaume-Uni) et spécialiste de la Pologne.
Selon lui, la plupart des évêques polonais ont accueilli avec satisfaction l’élection du successeur d’Andrzej Duda : « Nawrocki est clairement quelqu’un qui partage un engagement personnel fort envers la foi catholique et des valeurs alignées sur l’enseignement de l’Eglise sur de nombreuses questions sociales », estime l’expert.
L’élection de Karol Nawrocki offre ainsi à l’Eglise catholique polonaise une forme de répit dans un contexte de sécularisation croissante. Depuis le retour de Donald Tusk au pouvoir, des projets de réduction des cours de religion dans les écoles publiques, de libéralisation des lois sur l’avortement et de diminution des subventions aux organisations religieuses avaient suscité l’inquiétude des évêques.
Le veto présidentiel du nouveau chef de l’Etat pourrait bloquer ces réformes, préservant ainsi l’influence de l’Eglise dans la sphère publique. Même si le rôle du président reste limité.
Au-delà de cette victoire, l’Eglise polonaise fait face à des défis majeurs. La sécularisation, particulièrement marquée chez les jeunes générations, érode la pratique religieuse et le soutien aux enseignements moraux catholiques.
Un rapport publié en 2023, baptisé « Church in Poland », révélait un fossé générationnel : si 88% des Polonais de plus de 50 ans s’identifient à l’Eglise, ce chiffre chute chez les moins de 40 ans.
(Source : The Pillar – FSSPX.Actualités)
Illustration : © Prezydent.pl