A qui profite la violation du secret du conclave ?
Dans un article intitulé "Ainsi avons-nous élu le pape Ratzinger", le journaliste Lucio Brunelli publie, dans la revue italienne Limes du 23 septembre 2005, le journal tenu pendant les deux jours du conclave, les 18 et 19 avril, par un cardinal dont le nom n’est pas révélé. – Limes est une revue de géopolitique bimestrielle, de tendance centre gauche.
Ce cardinal anonyme affirme ainsi qu’au premier tour de scrutin, dans la soirée du 18 avril 2005, Joseph Ratzinger aurait obtenu 47 voix contre 10 à l’archevêque de Buenos Aires Jorge Mario Bergoglio, 9 à l’archevêque émérite de Milan Carlo Maria Martini, 6 au cardinal vicaire de Rome Camillo Ruini, 4 au secrétaire d’Etat Angelo Sodano, 3 au hondurien Oscar Andrés Rodriguez Maradiaga, archevêque de Tegucigalpa, et 2 à l’archevêque de Milan, Dionigi Tettamanzi.
Au second tour de scrutin, dans la matinée du 19 avril, Joseph Ratzinger aurait ensuite recueilli 65 voix contre 35 à Jorge Mario Bergoglio. Cette majorité était insuffisante pour être élu à la majorité des deux tiers, soit 77 voix. Le cardinal italien Angelo Sodano aurait encore obtenu 4 voix et 11 votes se seraient dispersés entre plusieurs cardinaux.
Le troisième tour de scrutin, deuxième de la matinée du 19 avril, aurait porté à 72 le nombre de voix pour le cardinal Ratzinger, 40 au cardinal Bergoglio, plus 3 voix dispersées. C’est le quatrième tour, dans l’après-midi, qui aurait été décisif. Joseph Ratzinger aurait alors recueilli 84 voix contre 26 à Jorge Mario Bergoglio, et 5 votes dispersés. Le cardinal Joseph Ratzinger n’aurait ainsi obtenu que 84 voix, soit seulement 7 voix au-dessus de la nécessaire majorité des deux tiers de 77 voix.
Rappelons que, dans la Chapelle Sixtine, le 18 avril, devant les télévisions du monde entier, les 115 cardinaux participant au conclave avaient prononcé, en même temps que le doyen du Sacré collège le cardinal Joseph Ratzinger, un serment les tenant au secret le plus absolu concernant le vote. Puis, chacun des cardinaux avait prêté serment individuellement, la main droite posée sur les Evangiles, prononçant à haute voix la formule suivante : "Et moi, N. cardinal N., je le promets, j’en fais le vœu et je le jure. Que Dieu m’y aide ainsi que ces saints Evangiles que je touche de ma main".
On s’interroge sur l’identité du cardinal parjure et sur l’exactitude des chiffres avancés, invérifiable puisqu’en principe aucun cardinal ne pourra les confirmer en raison du serment. Mais les questions véritablement importantes sont les suivantes : A qui profite ce parjure ? Quel intérêt avait-on à faire ces révélations ?
De source romaine, il semble que certains prélats souhaitent rappeler à Benoît XVI qu’il doit tenir compte des électeurs qui lui ont accordé leurs voix sans pour autant appartenir à sa ligne doctrinale, ce qui est une façon de lui dire : "Qui t’a fait pape ?" Leur but très concret serait d’exercer une pression sur le souverain pontife pour obtenir un secrétaire d’Etat de la tendance progressiste radicale. Est-ce un hasard si dans l’article de Limes le nom du cardinal Attilio Nicora revient plusieurs fois ? La revue ultra-progressiste Golias lui reconnaît "un poids considérable en coulisse", et le situe dans "la ligne éclairée (sic) Martini/Silvestrini, convaincu des aspects positifs d’une sécularisation qu’il ne diabolise pas". Cet artisan de la désastreuse réforme du concordat italien, se donne une autorité en travaillant actuellement à un projet de réforme de la curie romaine… Un vaticaniste confie à mi-voix : Casaroli genuit Silvestrini, Silvestrini genuit Nicora… Basta !