Réseaux sociaux : la manipulation des esprits
Depuis le récent scandale Cambridge Analytica, l’entreprise Facebook est accusée d’utiliser les données personnelles de ses utilisateurs afin d’influencer les mentalités dans un sens toujours plus libéral, tout en luttant contre les idées et informations jugées trop conservatrices.
Au mois de mars 2018, un ancien responsable de la campagne de Barack Obama en 2012, Carol Davidsen, a révélé que le géant des communications sociales Facebook avait permis à son équipe d'exploiter les informations personnelles de ses utilisateurs afin d’aider à la réélection du premier président noir des Etats-Unis : « les responsables de Facebook ont joué la carte de la franchise et nous ont permis de faire des choses qu'ils n'auraient pas permis à quelqu'un d'autre de faire, parce qu'ils étaient de notre côté », a-t-il expliqué.
L'ombre de Big Brother
Peu après a éclaté le scandale de la société de conseil Cambridge Analytica qui combine exploration, courtage et analyse de données avec des stratégies de communication dans le but d'influencer les comportements des internautes, et de peser sur les habitudes de consommation ou les choix électoraux. Au 4 avril 2018, les informations personnelles de 87 millions d'utilisateurs auraient ainsi été transmises à cette société via un questionnaire mis en ligne en 2014.
Le président de Facebook, Mark Zuckerberg, a admis plusieurs erreurs et une « violation de confiance avec ses utilisateurs » lors d'un entretien le 21 mars 2018. Il se dit préoccupé par les règles à établir entre protection des données personnelles, liberté d’expression, restriction des contenus dangereux et des discours de haine.
Ces scrupules paraissent peu crédibles aux yeux de Tucker Carlson, journaliste de la chaîne Fox News, qui affirme que « Facebook n'est pas un support neutre, mais répond au contraire à une stratégie politique. En début d'année, Facebook a modifié ses algorithmes pour que les utilisateurs voient un certain type d’informations bien ciblé, et cela aux dépens des idées conservatrices ».
En effet, selon une étude indépendante menée par The Western Journalism, le changement d’algorithme survenu en février 2018 a eu pour effet de faire baisser de 14% le trafic vers des pages aux idées jugées « conservatrices », et de promouvoir les pages favorables aux valeurs libérales ou progressistes (+ 2%). Et l’étude de conclure : « ce changement d'algorithme, intentionnel ou non, a eu pour effet de censurer les points de vue conservateurs sur la plus grande plate-forme de médias sociaux au monde. Ce changement a des ramifications qui, à court terme, pourraient amener les rédactions de journaux et sites jugés conservateurs à réduire leurs effectifs ou à disparaître complètement. A long terme, on pourrait voir basculer l’électorat – aux Etats-Unis et ailleurs dans le monde – vers des politiques orientées en direction d’idées toujours plus libérales ».
Ces événements révèlent une réalité bien connue, celle des moyens modernes de propagande et d'action sur les masses, par l'influence sur les comportements et la manipulation de l'opinion. Les médias dominants traditionnels ne sont plus désormais les seuls à manœuvrer les esprits. Depuis plusieurs années, des ouvrages et des publications ont averti des dérives offertes par les nouvelles technologies, et des dangers que représente la concentration des informations personnelles détenues par les « big data » (mégadonnées) et autres « GAFAM » – acronyme désignant les cinq principales firmes américaines dominant le marché du numérique (Google, Apple, Facebook, Amazon, Microsoft).
La voix de l'Eglise
Le pape François était intervenu sur le thème du numérique le 7 octobre 2017 à l’Université pontificale Grégorienne de Rome. Le souverain pontife relevait que, si le monde numérique est le « fruit d’un engagement extraordinaire de la science et de la technique », générant une certaine fascination, il convient de se demander « si nous sommes capables de gérer les processus que nous-mêmes avons mis en route, s’ils ne nous échappent pas, si nous faisons assez pour les garder sous contrôle ».
Plus profondément, il est du devoir de l’Eglise et de ses pasteurs de mettre en garde les hommes droits contre l'ennemi du genre humain et le père du mensonge qui se sert des libertés modernes pour diffuser l'erreur et le vice. Dès 1936, le pape Pie XI déclarait « nécessaire et urgent de veiller à ce que les progrès de l'art et de la science et de la technique, véritables dons de Dieu, soient ordonnés à la gloire divine, au salut des âmes, et servent à l'extension du Règne de Jésus-Christ sur la terre afin que nous puissions tous demander, comme l'Eglise nous enseigne, la grâce d'utiliser les biens temporels de façon à ne pas perdre les biens éternels. » (Encyclique Vigilanti cura, 29 juin 1936)
Vingt-cinq ans plus tard, Pie XII rappelait que l'Eglise étend son action aux techniques et moyens de diffusion comme à n'importe quel champ d'apostolat : « Le prêtre qui a charge d'âmes peut et doit savoir ce qu'affirment la science, l'art et la technique modernes en tant que cela concerne la fin et la vie religieuse et morale de l'homme. » (Encyclique Miranda prorsus, 8 septembre 1957)
L'Eglise doit agir « avec la prudence vigilante d’une Mère, afin de protéger de tout péril ses enfants engagés dans la voie du progrès », tant il est vrai, ajoutait avec son regard visionnaire le Pastor angelicus, que « les techniques nouvelles ont, comme il est clair, une puissante influence sur la manière de penser et d'agir des individus et des communautés ». Nihil novi sub sole.
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(Sources : Life Site/Recode/Fox News/La Documentation catholique/The Western Journal/Le Figaro - FSSPX.Actualités - 06/04/2018)