Rome encadre la réforme de la Communauté Saint-Martin

Source: FSSPX Actualités

Deux assistants pontificaux viennent d’être nommés par le Saint-Siège auprès de la Communauté Saint-Martin afin d’accompagner cette dernière dans la mise en œuvre de plusieurs réformes ayant comme point de départ l’inventaire de cet institut fondé en 1976.

La Communauté Saint-Martin est une association de prêtres et de diacres fondée par l’abbé Jean-François Guérin une dizaine d’années après Vatican II, dans la perspective d’appliquer le Concile à la lettre, notamment en ce qui concerne la formation sacerdotale et la réforme liturgique.

Avec 175 prêtres et diacres exerçant leur ministère dans une trentaine de diocèses en France et dans le monde, une centaine de séminaristes et de nombreuses vocations, l’œuvre – que l’on pourrait qualifier de « catholique conservatrice » – est florissante au regard de ce qui s’observe dans les séminaires diocésains.

En 2022, « après avoir demandé à deux reprises à être visité par le Dicastère pour le clergé (DC) dont la Communauté Saint-Martin dépend », note Famille chrétienne, son modérateur général, Dom Paul Préaux, a reçu quatre visiteurs romains afin d’établir un audit de l’œuvre. « Un rapport de 1300 pages a été rendu au Saint-Siège en janvier 2023, complété par un volet financier au mois de mars suivant », poursuit le journal.

En juillet 2024, le DC a rendu ses conclusions, demandant à la Communauté Saint-Martin de revoir « la pastorale des vocations » en vue d’un « meilleur discernement et d’une certaine prudence à l’entrée en formation ».

Dans cette perspective, le Saint-Siège a nommé deux « assistants apostoliques » auprès de la Communauté : Mgr Matthieu Dupont, évêque de Laval et le Révérend Père François Marie Humann, Père Abbé de l’abbaye de Mondaye, qui doivent guider l’œuvre dans son travail de réforme.

Si certains veulent voir dans la décision romaine une forme de « mise au pas » visant à « normaliser » un institut jugé trop conservateur, trop attaché à une lecture stricte de Vatican II et à l’enseignement moral traditionnel de l’Eglise, Dom Paul Préaux quant à lui refuse une telle exégèse.

Le modérateur général explique que l’audit, qu’il a lui-même demandé à Rome, était motivé autant par la croissance numérique de sa communauté – avec les nouvelles problématiques qu’elle a engendrées – que par la personnalité complexe du fondateur, l’abbé Jean-François Guérin : ce dernier « a été mis en cause pour des “délits à caractère sexuel” et des “abus d’autorité” », selon ce que rapporte Le Figaro du 18 juillet 2024.

Trois missions sont confiées aux assistants apostoliques : d’abord, aider une « relecture de l’histoire de la fondation, et de la vie de celui qui l’a initiée » explique The Tablet. A cet égard, Dom Préaux confie : « Au-delà de son enseignement [du fondateur] nous avons dû apprendre à faire la différence entre l’amour du sacerdoce qu’il nous transmettait et certains traits de son caractère. Les choses se sont faites par étape à notre arrivée en France en grandissant dans la liberté de parole à ce sujet. »

Ensuite, assurer « un meilleur discernement des vocations », du fait que la Communauté propose de nombreuses activités : internats, patronages, camps scout et pèlerinages, à des jeunes avec lesquels ses membres sont très souvent en contact, ce qui nécessite une formation adéquate.

Enfin, « accompagner le processus de renouvellement de la formation initiale et permanente à la lumière des normes romaines et nationales ». La Communauté Saint-Martin, que l’on pourrait dire « conciliaire de stricte observance », et dont les membres ne célèbrent que le novus ordo, est sans doute encore trop conservatrice pour certaines tendances progressistes romaines et de l’Hexagone.

De plus, sa réussite peut engendrer des jalousies. Toujours est-il que les zones de pénombre enveloppant certains aspects de la vie de l’abbé Guérin, pourraient être un bon prétexte pour aligner la Communauté sur une praxis davantage postconciliaire.