Saint Augustin au coin du feu pour 2023
Saint Augustin n’a plus de secrets pour lui, hormis le nom de la jeune femme dont il était amoureux et qu’il a répudiée avant sa conversion. Il s’agit de Lucien Jerphagnon, biographe prestigieux et maître d’œuvre des traductions de saint Augustin, que les éditions de La Pléiade ont réuni dans un coffret, les Confessions précédées des Dialogues philosophiques, et La Cité de Dieu.
Comme il est d’usage dans La Pléiade, les deux volumes du coffret mis à la vente fin 2022 ne se contentent pas d’apporter des traductions dont le sérieux demeure inégalé, ils offrent au lecteur l’appareil critique permettant de remettre les œuvres dans leur contexte historique et philosophique.
« Saint Augustin – explique Lucien Jerphagnon – est d’abord connu comme l’auteur des Confessions, à partir desquelles s’est créée une sorte de légende : celle du ‘noceur’ touché par la grâce. C’est inexact (…) si péchés il y eut au cours de sa jeunesse, ce fut moins le péché de chair que celui, énorme, d’ambition. »
Aurelius Augustinus est né en 354 après J.-C. en Afrique romaine, à Thagaste, aujourd’hui Souk-Ahras en Algérie. Il meurt en 430 à Hippone – Annaba – la ville dont il était évêque, alors assiégée par les Vandales.
A sa naissance, le christianisme était déjà devenu la religion de l’Empire, ce qui n’empêchait pas les hérésies de pulluler, comme le donatisme puis le pélagianisme, contre lesquels le saint luttera durant la majeure partie de son existence. Il sera également le témoin de la déliquescence de l’empire romain, et verra en 410 le saccage de Rome par les Wisigoths d’Alaric.
Tout au long des quatorze livres de La Cité de Dieu, et des treize livres des Confessions, l’évêque d’Hippone déploie tous les trésors de la langue latine, mêlant son génie de philosophe à de larges touches de mysticisme, se faisant le précurseur d’un style autobiographique « psychologisant » qui devait s’imposer bien des siècles plus tard.
Les traductions de Lucien Jerphagnon parues dès 1998 dans La Pléiade n’ont pas tardé à susciter un réel engouement : « Je suis surpris – avouait alors le traducteur – qu’en notre curieux siècle, cette édition éveille un tel écho. (…) Sans doute parce que l’auteur des Confessions peut être d’un grand secours car il permet à chacun de prendre la mesure de soi-même.
« Au ‘connais- toi toi-même’ socratique, saint Augustin confère une autre dimension : l’injonction de Socrate était très profondément grecque. Elle signifiait : ‘Sache que tu n ‘es pas un dieu, que tu ne dois pas te hausser à leur niveau sinon la Némésis te punira.’ Avec Augustin, c’est découvrir que l’on n’est que soi-même par rapport à Dieu. On est soi-même par le fait qu’on découvre que Dieu est présent en chacun de nous. Il y a une nouvelle dimension spirituelle qui est apportée au ‘moi’ : le regard sur une finitude… »
Nul doute que les amateurs du siècle de saint Augustin ne trouvent dans cette nouvelle parution de La Pléiade suffisamment de matière pour agrémenter les longues soirées d’hiver, au coin du feu. Et non loin d’une bougie, en cas de coupure d’électricité…
Les Confessions, précédées de Dialogues philosophiques, et La Cité de Dieu, de saint Augustin, éditions établies par Lucien Jerphagnon, coffret de deux volumes 1 568 et 1 344 pages, Gallimard, coll. La Pléiade, 135 €.
(Source : La Pléiade – FSSPX.Actualités)