Syrie : Nouvelles persécutions des chrétiens par l' « Etat Islamique »

Source: FSSPX Actualités

Des combats au cœur de Tel Tamar dans le nord-est du pays.

 

Le 23 février, plus de 40 camionnettes de miliciens djihadistes du prétendu Etat Islamique (EI) ont attaqué 22 villages chrétiens assyriens sur la rive est de la rivière Khabur, du gouvernorat de Hassaké, dans le nord-est du pays.

 

Des centaines de chrétiens assyriens ont été pris en otage par les djihadistes et les églises incendiées ou endommagées. Mgr Jacques Behnan Hindo, archevêque syro-catholique d’Hassaké-Nisibi, confiait à l’agence Fides que « les terroristes ont attaqué les villages de Tel Tamar jusqu’à Tel Hormuz, où ils ont tout brûlé. (…) ils ont pris des dizaines d’otages, peut-être dans l’intention de les utiliser pour demander des rançons ou en vue d’un échange de prisonniers ». Il confirmait également que plus de 1.000 familles chrétiennes assyriennes et chaldéennes avaient pu fuir ces villages et trouver refuge, pour la plupart, à Hassaké.

L’archimandrite Emanuel Youkhana, des chrétiens assyriens, précisait à l’Aide à l’Eglise en Détresse (AED) : « Les combats ont commencé à 4h du matin (heure syrienne)… ils ont profité de l’engagement militaire du PYD (Parti démocratique de l’union Kurde) sur d’autres fronts pour avancer. Particulièrement à la frontière irako-syrienne. C’est pourquoi il y a eu moins de résistance pour combattre les djihadistes. »

« Je tiens à dire clairement, a déclaré Mgr Hindo le 24 février par l’intermédiaire de Fides, que nous avons la sensation d’avoir été abandonnés entre les mains de ceux du prétendu Etat islamique. Hier, les bombardiers américains ont survolé plusieurs fois la zone mais ne sont pas intervenus. Nous avons cent familles assyriennes qui ont trouvé refuge à Hassaké mais elles n’ont reçu aucune aide de la part du Croissant Rouge et des organismes gouvernementaux syriens d’assistance peut-être parce qu’elles sont chrétiennes. L’organisme chargé des réfugiés de l’ONU est lui aussi aux abonnés absents ».

Le 27 février, le nombre des chrétiens pris en otage et déportés par les djihadistes dans leurs places fortes a dépassé les 300. « Si les premières informations faisaient état de 90 otages, indiquait l’archevêque syro-catholique, maintenant, nous sommes en mesure de dire qu’ils sont environ 350 entre les mains des djihadistes », après vérifications et informations auprès des exilés.
 Parmi les prisonniers, se trouveraient également 40 miliciens kurdes et des miliciens assyriens appartenant à la brigade d’autoprotection Sutoro.

Le dimanche 1er mars, 19 chrétiens assyriens, habitants du village de Tel Goran, ont été relâchés par les djihadistes contre rançon. Parmi eux se trouvent deux femmes, dont l’une enceinte a dû laisser sa fille de 6 ans aux mains des djihadistes. « Il s’agit d’un petit groupe, si on le compare aux centaines de chrétiens encore prisonniers du prétendu Etat islamique mais les négociations se poursuivent afin de libérer également les autres et nous espérons que cela sera possible », déclarait Mgr Hindo.


Entre temps, les milices kurdes et l’armée syrienne ont repris le contrôle de secteurs de la zone proche de Quamishli mais n’ont pas encore tenté de reprendre les villages assyriens de la vallée de la rivière Khabur. « Depuis le début de l’offensive djihadiste sur ces villages, soulignait alors l’archevêque, les incursions aériennes de la coalition internationale contre les positions de l’Etat islamique ont étrangement été suspendues ».

Le long de la rivière Khabur, affluent de l’Euphrate, se trouvaient plus de 30 villages chrétiens fondés dans les années 1930, où avaient trouvé refuge les chrétiens assyriens et chaldéens ayant fui l’Irak suite aux massacres perpétrés alors par l’armée locale. Il s’agissait de villages florissants, comptant chacun des milliers d’habitants, avec des églises et des communautés très actives qui géraient également des écoles et des initiatives sociales. Mais, depuis le début de la guerre, presque tous s’étaient vidés de leurs habitants, certains ressemblant désormais à des villes fantômes. Hormuz comptait plus de 4.000 habitants avant le conflit, au cours des derniers mois sa population s’était réduite à moins de 300 âmes.

Mgr Hindo dénonce « les graves responsabilités de l’Occident dans le déclenchement des conflits qui bouleversent actuellement le Moyen-Orient ». L'archevêque explique à l'agence Fides que « par leurs politiques malheureuses, en particulier les Français et les Américains, avec les Anglais (précisait-il au micro de KTO), ont favorisé de facto la montée en puissance de l'EI. Maintenant, ils persévèrent dans l’erreur, commettant des fautes stratégiques grotesques telles que l’annonce d’une campagne de printemps visant à libérer Mossoul. De plus, ils s’obstinent à mener des interventions sans importance, au lieu de reconnaître que le soutien apporté aux groupes djihadistes nous a conduits à ce chaos qui a détruit la Syrie, nous faisant régresser de 200 ans ».

John Michael, membre du Mouvement Démocratique Assyrien au Royaume-Uni, souligne auprès du magazine catholique londonien Catholic Herald que les assyriens ne reçoivent aucun soutien occidental, contrairement au gouvernement irakien, aux peshmergas kurdes et aux milices chiites. « Un nouveau génocide se déroule devant nos yeux et le monde reste silencieux face à la tragédie des chrétiens assyriens innocents », dénonce-t-il.

(Sources : apic/fides/aed/catholicherald – DICI n°312 du 13/03/15)