Thomas More ou L’Homme libre de Jean Anouilh

Saint Thomas More par Hans Holbein le jeune
Publiée l’année de sa mort, cette superbe pièce de théâtre conclut en beauté l’œuvre de Jean Anouilh.
L’histoire est bien connue. Le roi d’Angleterre veut divorcer mais le pape refuse son autorisation. Henri VIII prend la décision de séparer l’Eglise d’Angleterre de Rome et d’en devenir le chef. Chacun doit prêter serment à ce schisme et peu refusent. Pour ceux-ci, c’est la hache du bourreau.
Thomas More est l’un d’eux, et pas n’importe lequel, puisqu’il est Lord Chancelier d’Angleterre. Henri VIII, ébloui par son intelligence et son honnêteté, l’aime par-dessus tout.
Il fera tout pour convaincre son ami et échouera. Pourtant Thomas hésite parfois, non qu’il doute de son bon droit et de sa conscience, mais il a peur, comme tout un chacun.
Il vaincra cette tentation et trouvera la paix de l’âme : « J’ai passé la nuit à avoir peur, fils Ruppert », dit-il à son gendre, « Je n’ai pas tellement de courage, tu sais. Mais ce matin que c’est fait, je n’ai plus peur. C’est merveilleux d’être arrivé dans cette clairière inondée de lumière, au bout de sa peur… On est un homme libre. »
Margaret, sa fille bien aimée, vient le voir en prison pour le convaincre de prêter serment : « Il a été dit, il faut rendre à César. » Il en faut plus pour troubler le futur martyr : « Ce qui appartient à César, mais quand César veut prendre autre chose, il faut qu’il y en ait un – un seul suffit presque toujours – qui dise non. »
L’homme libre va mourir heureux et Henri VIII a commencé son parcours sanglant.
On retrouve dans cette pièce des thèmes déjà abordés avec Becket ou Antigone : la conscience droite au prix de sa vie ou la force de résister à un mal accepté de presque tous. C’est évidemment de toutes les époques.
Au-delà du fond, la pureté de la langue d’Anouilh vaut à elle seule le détour. Cette lecture peut être aussi l’occasion de voir le beau film de Fred Zinnemann, Un homme pour l’éternité, qui raconte l’histoire de Thomas More avec beaucoup de sobriété et de justesse.
(Source : Les livres d’Antoine/DICI n°404 – FSSPX.Actualités)
Illustration : Hans Holbein, Domaine public, via Wikimedia Commons