En Ukraine, le Vatican ne veut pas rester hors-jeu

Le cardinal Pietro Parolin
Alors que les Etats-Unis et la Fédération de Russie font jeu à part afin de mettre un terme au conflit qui ensanglante le flanc Est de l’Europe depuis plus de trois ans, le Saint-Siège – à l’instar des Etats voisins de l’Union européenne – intensifie ses efforts diplomatiques afin de ne pas rester totalement en dehors d’un futur processus de paix.
Alors même que la suite de l’actuel pontificat paraît s’écrire en pointillés, l’activité diplomatique du Saint-Siège n’a pas faibli. Le 17 mars 2025, le Vatican a publié un communiqué confirmant qu’un appel téléphonique avait eu lieu trois jours plus tôt entre le cardinal Pietro Parolin, secrétaire d’Etat du Saint-Siège et à ce titre, « numéro deux » du Vatican, et le président ukrainien Volodymyr Zelensky.
Le Saint-Siège a réitéré son souhait de voir émerger une paix « juste et durable » en Ukraine, un objectif réalisable uniquement à travers un dialogue sincère et exempt de préconditions : « Qu’il n’y ait pas de conditions préalables qui empêchent le début d’un dialogue », a souhaité le cardinal Parolin, dans une formule choisie afin de se démarquer des récentes déclarations du président russe Vladimir Poutine.
Ce dernier, le 13 mars dernier, a conditionné un éventuel cessez-le-feu, à la reddition des forces ukrainiennes dans les territoires occupés par la Russie, à des garanties contre une remobilisation ukrainienne et à la mise en place d’un mécanisme de suivi. Aux yeux du Vatican, de telles exigences risqueraient de bloquer toute tentative de négociation et de prolonger une guerre déjà dévastatrice.
Mais comme il faut toujours trouver un terrain d’entente avec ses interlocuteurs, le communiqué du 17 mars 2025 demande que « tout soit fait » pour faciliter la libération des prisonniers de guerre : une préoccupation humanitaire faisant écho aux efforts antérieurs du Saint-Siège, qui, sous l’impulsion du pape François, a déjà joué un rôle dans plusieurs échanges de prisonniers entre la Russie et l’Ukraine.
En avril 2023, le souverain pontife avait publiquement confirmé l’implication du Vatican dans des opérations, souvent menées par le cardinal Matteo Zuppi, envoyé spécial du Saint-Siège pour la paix en Ukraine. Or Moscou est prêt à s’engager dans cette démarche de nature humanitaire qui ne lui fait rien perdre sur le terrain militaire et qui permet de laisser un rôle à jouer à la diplomatie vaticane.
L’appel entre le secrétaire d’Etat du Saint-Siège et le chef de l’Etat ukrainien s’inscrit dans un contexte de négociations internationales plus larges. Une délégation ukrainienne a récemment rencontré le secrétaire d’Etat américain à Djeddah, afin de discuter d’un cessez-le-feu, dans une tentative de réparer les tensions apparues lors d’une rencontre explosive entre Zelensky et le président américain Donald Trump.
Le Vatican, en se positionnant comme un facilitateur neutre, cherche à soutenir ces efforts sans s’aligner explicitement sur une puissance particulière, une stratégie qui reste cohérente avec sa tradition de médiation. Le 18 mars dernier, le cardinal Pietro Parolin s’est d’ailleurs exprimé sur le sujet lors d’un événement organisé à l’ambassade du Maroc près le Saint-Siège, réunissant des diplomates et des représentants religieux du monde arabe.
Le haut prélat a renouvelé l’espoir du Vatican d’un prochain cessez-le-feu, saluant la volonté exprimée par l’Ukraine d’entamer un processus de trêve de 30 jours et a exhorté la Russie à manifester une ouverture similaire. « Que ce processus commence », a-t-il insisté, ajoutant que des négociations sincères pourraient mener à une paix durable.
Enfin, le cardinal Parolin a évoqué le thème de la santé du pape François, âgé de 88 ans et hospitalisé entre le 14 février et le 21 mars 2025. Interrogé par des journalistes en marge de l’événement à l’ambassade du Maroc, le chef de la diplomatie vaticane a précisé que ses collaborateurs « lui présentent les questions et les problèmes qui nécessitent une solution et le pape donne ses indications ».
Façon de dire que, même si le locataire de Sainte-Marthe s’est vu contraint de réduire drastiquement son activité, la vie continue oltretevere. Et peut-être encore mieux qu’avant.
(Sources : Crux/Vatican News – FSSPX.Actualités)
Illustration : © Vatican News